L’expulsion de l’ambassadeur de France à Bamako

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Les ministres Yves le Diran et Abdoulaye Diop
Les ministres Yves le Diran et Abdoulaye Diop

L’expulsion de l’ambassadeur de France à Bamako, Joël Meyer, par le gouvernement du Mali le 31 janvier 2022, a été motivée par le comportement arrogant des autorités françaises qui pensent pouvoir toujours diriger le Mali à partir de Paris. Cette décision est sans nul doute une réponse aux propos hostiles et outrageux du ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, à l’égard des autorités maliennes.

« C’est la junte qui est illégitime et qui refuse le suffrage universel, la vérification démocratique. Il y a une véritable fuite en avant de la junte qui n’est pas acceptable ». Voilà les proposés de discorde entre le Mali et France. Lesquels ont été tenus le 27 janvier 2022 par le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian sur la radio RTL et rapportés par l’Agence France Presse (AFP), suite au refus du Mali de recevoir un contingent danois au sein de la Force européenne, Takuba.

En réaction à ces propos jugés hostiles par les autorités du Mali, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, a vigoureusement réagi dans une interview exclusive accordée à RFI/ France 24, le 28 janvier 2022. «Je crois que Monsieur Le Drian doit comprendre que l’engagement avec le Mali ne doit pas se faire à travers les médias et que si ce type de questions est en discussion, nous sommes tous des diplomates et il y a d’autres canaux pour pouvoir discuter de ces questions… Les menaces, les insultes, les invectives doivent cesser pour donner la place à un engagement réaliste, un engagement constructif entre responsables pour pouvoir voir ensemble comment surmonter ces difficultés, comment surtout faire face aux défis que nous avons, qui sont des défis sécuritaires », a-t-il déclaré.

Le chef de la Diplomatie malienne a également tenu à préciser : « Cette attitude agressive, hostile à l’endroit du Mali n’a rien à voir avec les raisons qui sont mises en avant liées au respect de la démocratie, au respect des droits de l‘homme, à des coups d’État. Non. Le Mali est puni, parce que le choix politique des autorités du Mali ne convient pas à certains. Je crois que nous devons pouvoir sortir de ça, parce que même les coups d’État dont on parle, la France applaudit des coups d’État quand cela va dans le sens de ses intérêts. Elle condamne quand ça va dans le sens contraire de ses intérêts. Non. Cette politique de deux poids deux mesures aussi doit cesser. »

Soixante-douze heures après cette interview, soit le 31 janvier 2022, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale convoque l’ambassadeur de France à Bamako, Joël Meyer, et lui notifie la décision du gouvernement qui l’invite à quitter le territoire national dans un délai de 72 heures. « Cette mesure fait suite aux propos hostiles et outrageux du ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères tenus récemment et à la récurrence de tels propos par les autorités françaises à l’égard des autorités maliennes, en dépit des protestations maintes fois élevées », a précisé le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale dans un communiqué publié dans la journée du 31 janvier 2022.

LA FRANCE PREND NOTE…

Les autorités françaises n’auraient jamais imaginé que le Mali pourrait un jour expulser leur ambassadeur. C’est ainsi que les réactions ne sont pas fait attendre. A quelques heures de l’annonce de l’expulsion de Joël Meyer, Marine Le Pen, candidate du Rassemblement national (RN), réagit sur son compte twister : « Face à l’attitude de la junte malienne, il faut bloquer l’aide au développement et le transfert de fonds, y compris individuels, qui partent de France vers le Mali (12% du PIB du Mali !). Je ne supporte pas que notre Armée soit humiliée par le gouvernement malien ! »

Quant à Jean-Luc Mélenchon de La France Insoumise, il a déclaré également sur son compte twister : « Avant que les sacrifices et nos morts au Mali n’aient été rendus vains, avant que la déchirure soit complète, il est temps pour la France de revenir au réel et de vider l’abcès avec le pourvoir malien actuel. Et que l’Assemblée nationale soit saisie et décide d’un plan d’actions. » Deux réactions plutôt distinctes, mais qui défendent toutes les intérêts de la France. Sauf que ces deux personnalités politiques ignorent que les autorités maliennes ont été aussi investies pour défendre également les intérêts de leurs pays et non pour obéir à la France. Même si les autorités françaises disent avoir pris note de la décision de Bamako et rappellent donc Joël Meyer à Paris, il faut tout de même s’attendre à d’autres réactions de part et d’autre dans les prochains jours.

MACRON DOIT SE RESSAISIR !

Quoique l’on dise, Jean-Yves Le Drian est en mission pour le président français, Emmanuel Macron, donc : La France. Cela ne doit pas d’ailleurs surprendre. Quand on sait qu’il (Macron) n’a jamais senti les militaires au pouvoir. La vérité est qu’il a toujours voulu décider de l’avenir du Mali depuis l’Elysée. En se voyant refuser cela par les autorités actuelles, Macron s’est mis dans tous ses états et veut mobiliser le monde entier par tous les moyens derrière lui pour déstabiliser les autorités, donc le Mali. L’on se souvient toujours de sa déclaration faite le 30 septembre 2021 : « Je rappelle que le Premier ministre malien est l’enfant de deux coups d’État, si je puis dire. Puisqu’il y a eu un coup d’État en août 2020 et un coup d’État dans le coup d’État. Donc, la légitimité du gouvernement actuel est démocratiquement nulle. Alors qu’hier nous avons présidé à l’hommage national au sergent Blasco et qu’aujourd’hui il est enterré parmi les siens, ce qu’a dit le Premier ministre malien est inadmissible. C’est une honte. Et ça déshonore ce qui n’est même pas un gouvernement. »

Il faut le dire, c’est la somme du mépris au peuple malien et l’inaction de la force Barkhane, justifiée par des autorités françaises à travers des propos arrogants, discourtois et hostiles envers les autorités maliennes que nous en sommes là aujourd’hui et si la France veut maintenir ses bonnes relations d’amitié avec ses anciennes colonies, dont le Mali, elle a intérêt à revoir sa politique extérieure. Parce que les jeunes générations deviennent de plus en plus conscientes et n’hésiteraient pas à rompre les liens historiques tissés sur l’esprit de la domination.

Ousmane BALLO

Source : Ziré

 

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