L’ex Première dame du Mali était attendue partout comme une providence. Même depuis son exil dakarois, l’humaniste reste de cœur avec ses concitoyens, notamment les populations démunies, vulnérables et sinistrées. Pourtant, l’épouse de l’ancien président Amadou Toumani Touré n’a pas commencé à aider et à sauver les populations maliennes en 2002 (quand son mari accéda démocratiquement au pouvoir), ayant auparavant consacré près d’une trentaine années de sa vie à la cause de la santé maternelle et infantile.
A la veille du 08 mars, Journée internationale de la femme, Journée d’hommages aux grandes dames qui ont marqué leur temps et l’histoire, nous revenons sur les traces de cette grande de coeur.
Si en reconnaissance à l’amitié qu’ils vouaient au chef de l’Etat, Amadou Toumani Touré, les Tout-petits de la décennie 1990 entonnaient « ATT, an bè sa i nofè » (nrdl : ATT, nous mourrons pour toi), beaucoup d’autres Maliens auraient donné leur vie pour rendre son épouse, Lobbo Traoré, éternelle.
Pour beaucoup d’observateurs, c’est à partir de 2002 que Mme Touré Lobbo Traoré a commencé ses actions humanitaires quand elle a pris en main les destinées de la Fondation pour l’Enfance (FPE). Certes, c’est un repère incontournable, mais Lobbo était déjà une grande Dame de cœur. Une valeur inculquée en elle depuis que la trajectoire de sa carrière a choisi la médecine, une profession où l’on sauve des vies.
La sage-femme
Née à Diré (région de Tombouctou), de Ba Aly et d’Aïcha Baby, Lobbo a été inscrite à l’école en 1962. Elle fait le premier cycle à Bandiagara (où son père servait en qualité de commis à l’Agence spéciale (actuelle perception) sous les ordres de Hassane Diallo), Niafunké et Diré. Puis le second cycle à Mopti où elle obtient le Diplôme d’études fondamentales (DEF) en 1972.
Enfin, direction l’Ecole secondaire de la santé (ESS) de Bamako d’où elle sort, en 1976, nantie du diplôme de sage-femme d’Etat, avec mention Bien. Débute ainsi, dès l’année suivante, une longue carrière de sage-femme. Après la période de stage, elle est titularisée en 1978 et affectée à la maternité du Camp I de Bamako. Un service qu’elle ne quittera plus jusqu’en 2002. En 1991, elle avait été promue Maîtresse sage-femme. La même année, elle prend du recul provisoire pour « accompagner » son mari, Amadou Toumani Touré, nouveau chef d’Etat, durant la Transition démocratique au Mali (26 mars 1991 au 08 juin 1992).
Passionnée de médecine, Madame Touré Lobbo Traoré n’a jamais cessé de se perfectionner tout au long de sa carrière : cours de recyclage en santé familiale à Bamako (1981) ; stage au Centre régional de formation en santé familiale pour l’Afrique, à Pamplemousse-Île Maurice, assortie d’un certificat de compétence en formation et régulation de la fécondité (1988) ; cours théoriques et pratiques à l’Office national de la famille et de la planification, en Tunisie, sanctionnés par une attestation en matière de planification familiale et espacement des naissances et en formation de formateurs (1993) ; formation sur la Périnatalité (1996) ; formation continue sur la santé de la reproduction (1998) ; formation sur les procédures des services de santé de la reproduction et de la planification familiale (1999). La même année, toujours avec sa soif d’apprendre, Lobbo participe au IVème congrès de la société ORL et de chirurgie cervico-faciale d’Afrique francophone à Bamako ; puis, en 2000, au IVème congrès de la Société africaine des gynécologues obstétriciens (Sago) à Ouagadougou.
Madame Touré est membre de l’Association des sages-femmes du Mali, de l’Association des malades de la drépanocytose du Mali, et présidente d’honneur de l’Association pour le développement social de la femme et de l’enfant.
Dans le cadre de la culture de la paix, Lobbo Traoré est membre du Mouvement des Premières dames d’Afrique pour la Paix, et de la coordination des associations maliennes luttant pour le renforcement de la paix.
Les 25 années d’exercice de sage-femme de Mme Touré Lobbo Traoré ont été entièrement consacrées à sauver des vies. Celles de ces nombreuses femmes en couches qui perdent souvent la vie en donnant la vie. Celles de ces bébés qui meurent avant de venir au monde, ou en y venant ou peu après leur naissance. Avec le taux qu’offre la mortalité maternelle et néonatale, la sage-femme qu’est Lobbo a forcément eu le cœur tendre depuis les salles d’accouchement de la maternité du Camp I. Le transformer en actions humanitaires fut un pas que la nouvelle Première dame du Mali franchit allègrement à partir de 2002 quand elle prit la présidence effective de la Fondation pour l’enfance.
Une Dame de cœur
Depuis le 17 juillet 2002, la toute nouvelle Première dame a pris le relai de son mari à la Fondation pour l’enfance, créée en 1993. Cette structure caritative se donne pour objectifs d’œuvrer au développement économique et social des populations maliennes en luttant contre la pauvreté et l’exclusion, surtout au profit des couches sociales en circonstances difficiles (les mères, les enfants, la jeunesse) ; de favoriser la protection de l’environnement pour un cadre de vie meilleur ; d’encourager l’intégration régionale, sous-régionale africaine, en vue d’un partenariat nouveau ; de s’investir dans le maintien de la paix et de la démocratie ; et de faciliter l’accès des populations à l’éducation et à la santé.
De 2002 à 2012, Lobbo a mené des activités humanitaires et de solidarité dans des domaines aussi divers et variés que l’éducation, la santé, la culture, le sport, l’environnement, la lutte contre la pauvreté et l’exclusion etc. Toutes les couches sociales du Mali, ont bénéficié, de près ou de loin, des bienfaits des actions de Lobbo. Au fil des ans, Madame Touré s’est érigée en véritable personnage providentiel. Et désormais, chaque localité du Mali attend une visite de Lobbo.
Lors des Journées nationales de vaccination, la FPE participe avec une contribution financière dans l’organisation, l’achat de vaccins pour le ministère de la santé (méningite, rougeole, fièvre jaune, polio), et mobilisation sociale et plaidoyer auprès des partenaires surtout nationaux. Il y a aussi des activités de promotion du dépistage volontaire et de lutte contre la stigmatisation et la discrimination des personnes vivant avec le Vih ; de plaidoyer en faveur de l’amélioration du statut de la femme et de la lutte contre les pratiques néfastes à la santé de la mère et de l’enfant ; de lutte contre la mortalité maternelle et néonatale.
Au plan de l’éducation et de la formation, la fondation organise des cours de vacances en faveur des enfants démunis ; procède au parrainage scolaire des enfants démunis et des enfants orphelins de Vih/sida, et à l’encadrement social des enfants de la rue. Autres activités : lutte contre l’analphabétisme des femmes à travers le parrainage de filles de la 1ère à la 6ème année fondamentale, appui en supports didactiques aux femmes néo-alphabètes, participation à la lutte contre la sous-scolarisation des filles et l’implication dans le processus de maintien de celles-ci à l’école, formation professionnelle en coupe et couture des filles précocement déscolarisées, et parrainage de promotion.
Des mosquées, medersas, centres de santé communautaire ont été construits à travers le pays. Plusieurs villages ont eu des forages et de points d’eau potable. Des associations féminines ont été équipées en moulins et machines à coudre.
En 2002, la présidente de la FPE a distribué du matériel et de l’argent à hauteur de 162 millions de FCFA au titre du mois de la solidarité, et 57 millions de FCFA au titre du mois de ramadan.
En 2003, elle a apporté un appui conséquent aux femmes musulmanes pour le Maouloud.
Les actions de l’ex Première dame sont aussi très visibles à travers le centre hospitalier Mère Enfant le “Luxembourg”, un établissement privé à caractère public dédié en premier lieu aux femmes et aux enfants. Il prend en charge toutes les spécialités qu’un hôpital public à savoir : la gynécologie, la pédiatrie, la chirurgie, la traumatologie….Presque tous les examens y sont possibles. Doté d’un scanner, c’est un hôpital résolument tourné vers l’informatisation.
A travers cet hôpital, la fondation pour l’enfance sauve plusieurs enfants (et femmes) chaque année avec une prise en charge gratuite, noire des évacuations sanitaires pour des maladies graves. Un repère de taille : dans le cadre du Cinquantenaire de l’indépendance en 2010, l’hôpital Mère-enfant le Luxembourg et l’association humanitaire française, Rayon d’espérance ont pris en charge 50 enfants maliens malades du cœur, à l’image du petit Abdoulaye Santara, âgé de 3 ans et qui souffrait de cardiopathie. Beaucoup d’enfants comme lui ont été sauvées par cet hôpital. Et régulièrement, des experts étrangers viennent procéder à des consultations et interventions chirurgicales (gratuites ou semi subventionnées) sur invitation de l’hôpital.
Des dons à gogo !
En 2011, la présidente de la FPE a fait des dons d’une valeur de plus de 270 millions de FCFA dont 170 millions dans le cadre de l’« Opération ramadan ».
En effet, pour la 10ème année consécutive, Mme Touré Lobbo Traoré a procédé, le 30 juillet 2011 au lancement de l’«Opération Ramadan ». Elle offre des produits vivriers d’une valeur de près de 170 millions de FCFA pour une première distribution à Bamako et environs. Entre autres, 230 tonnes de riz, 73 tonnes de mil, 100 tonnes de sucre, 35 tonnes de datte, 60 bidons d’huile végétale. Plus 4, 845 millions de FCFA pour le prix de condiments et le transport des produits, destinés à diverses associations et organisations musulmanes, à des leaders religieux ainsi qu’à des structures d’assistance sociales telles que les associations de veuves, d’orphelins ou d’handicapés.
L’Union nationales des femmes musulmanes du Mali, a reçu 46 tonnes riz, 11 tonnes de sucre, 6 tonnes de datte et une somme de 2,4 millions de FCFA pour le prix de condiments et le transport. Ce n’est pas tout.
Le 6 août de la même, 134 imans des mosquées de Bamako et leurs personnels ont réceptionné au siège de la fondation 60 tonnes des céréales et produits alimentaires évalués à 30 millions de FCFA, et composés de riz, de sucre, de pâtes alimentaires et de dattes. La donation comprend également 1140 exemplaires du Coran et 1 140 litres de Zam-Zam (eau bénite en provenance de la Mecque), plus 670 000 FCFA, représentant les frais d’acheminement des produits jusqu’à leurs destinations finales.
Trois jours plus tôt, ce sont les femmes, les jeunes, les fidèles musulmans, bref les populations de Koulikoro qui étaient à l’honneur. Divers dons d’une valeur estimée à 102 millions de FCFA ont été distribués par Lobbo : 17 plates-formes multifonctionnelles, 13 kits maraîchers, 19 charrettes métalliques avec autant d’ânes, 6 motopompes, 7 pirogues, 3 charrues, 2 forages, 3 puits maraîchers, 28 machines à coudre.
Les jeunes ont réceptionné 10 jeux de maillots, 10 ballons de football et 10 ballons de basket-ball et des équipements sportifs. Pour atténuer les rigueurs du mois de Ramadan, le Haut conseil islamique de la région a reçu 5 tonnes de riz, autant de mil et de sucre. Et des groupements de femmes ont bénéficié de 42,3 tonnes de céréales et une enveloppe d’un million pour les frais de transports.
Même étant à Dakar, Mme Touré Lobbo Traoré est de cœur avec ses concitoyens notamment les couches démunies, vulnérables et sinistrées.
Source: L’Aube