SECURITE, DIALOGUE, RELANCE ECONOMIQUE… LES GRANDS CHANTIERS D’IBK AU MALI

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Ibrahim Boubacar Keïta, réélu pour un nouveau mandat de cinq ans à la tête du Mali, devra relever de nombreux défis. Tour d’horizon.

Ibrahim Boubacar Keïta a été proclamé vainqueur du second tour de l’élection présidentielle du 12 août, selon des résultats encore provisoires qui doivent être confirmés par la Cour constitutionnelle. Mais si ses partisans ont célébré sa victoire, l’enthousiasme est loin de celui qui prévalait en 2013, lorsqu’il a été élu pour son premier mandat. Cinq ans après, les attentes demeurent immenses.

  • Ramener la paix

IBK est avant tout attendu sur la question sécuritaire, qui préoccupe aussi bien les Maliens que les pays voisins, et au-delà. Pendant la campagne, le président sortant a défendu son bilan, ne cessant de répéter que l’armée malienne « se porte mieux ». « Elle est mieux formée et mieux équipée grâce aux investissements de l’État », martelait-il lors de ses meetings.

Mais dans les faits, en cinq ans, IBK n’a pas réussi à ramener la paix dans le Nord. Pis, les troubles gagnent du terrain, et les six principales organisations jihadistes ont étendu leurs zones d’influence au centre du pays.

Certaines ont même montré leur puissance de frappe en menant des attaques hors des frontières du Mali. En mars, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, coalition jihadiste dirigée par le Malien Iyad Ag Ghaly, a ainsi revendiqué le double attentat meurtrier de Ouagadougou contre l’ambassade de France et l’état-major général des armées.

Outre la menace terroriste, un nouveau foyer de violence a fait son apparition au cours de ces dernières années dans le centre du pays : des conflits intercommunautaires opposant des éleveurs peuls et des chasseurs dogons ou bambaras ont fait des centaines de victimes, principalement dans la région de Mopti.

  • Restaurer la confiance

Ibrahim Boubacar Keïta devra également retisser le lien de confiance avec ses compatriotes. Le scrutin présidentiel a en effet été marqué par un retour en force de l’abstention, un mal récurent au Mali qui avait cependant reculé lors de la précédente présidentielle. Au second tour, le taux de participation a été 34,54%, bien loin des 48,98 % de 2013. Signe d’une désaffection, voire d’une défiance, d’une large part de la population malienne vis-à-vis de ses hommes politiques.

IBK devra aussi faire face à la défiance de l’opposition. Si Soumaïla Cissé n’est pas parvenu à rallier les principaux candidats dans l’entre-deux-tours – Aliou Diallo et Cheick Modibo Diarra  choisissant chacun pour des raisons propres de « laisser libres » leurs électeurs -, l’opposition a parlé d’une seule et même voix pour dénoncer des « fraudes » lors du premier tour. Le chef de file de l’opposition, crédité de 32,83%, a annoncé qu’il engagerait tous les recours à sa disposition pour remettre en cause les résultats du second tour.

IBK peut cependant se féliciter de l’organisation effective de la présidentielle, sur laquelle de nombreux doutes planaient il y a quelques mois encore. Bien qu’émaillé de nombreux incidents, dont la mort d’un président de bureau de vote dans la région de Tombouctou, le vote a eu lieu.

Les partenaires internationaux, qui s’impatientent de la lenteur de la mise en application de l’accord de paix signé en 2015, pourraient voir d’un bon œil l’implication des groupes signataires de l’accord qui ont supervisé le vote dans le nord. « À Kidal, c’est la CMA [Coordination des mouvements de l’Azawad, ex-rébellion], qui s’est occupée de la sécurisation de l’élection. C’est un élément concret qui démontre que la confiance s’installe entre la CMA et le gouvernement », estime Ahdama Ag Bibi, ancien cadre d’Ansar Eddine et député du RPM (majorité présidentielle). Un acquis sur lequel IBK pourrait capitaliser afin de faire avancer le processus.

  • En finir avec la corruption

IBK avait placé son premier mandat sous le signe de la lutte contre la corruption et l’impunité. Mais les nombreuses mesures annoncées n’ont pas porté leurs fruits. Selon le classement annuel réalisé par Transparency International sur la perception que les populations ont de la corruption dans leur pays, le Mali arrive en fin de peloton, à la 122e place sur 180.

Les affaires – en particulier celles de l’achat de l’avion présidentiel et de la surfacturation de matériels militaires – ont ébranlé la confiance des Maliens dans le gouvernement dès les premières années du quinquennat d’IBK. D’autres affaires ont suivi, portant sur des engrais agricoles de mauvaise qualité ou encore des soupçons de surfacturation de matériels agricoles, dont l’opposition n’a pas manqué de se saisir pour dénoncer un problème de gouvernance.

 

  • S’appuyer sur les bons indicateurs économiques pour réduire la pauvreté

L’économie est sans doute l’un des principaux chantiers du quinquennat qui s’ouvre. Pour Mahamadou Amara, sociologue au centre Max Weber de Lyon et à l’université de Bamako, auteur du livre Le Mali rêvé, le nouveau président devra surtout s’atteler à « réformer le pays ». « Il devra encadrer le secteur informel qui n’est pas pris en compte, réformer le système éducatif et assurer une meilleure redistribution des richesses », estime le chercheur.

L’économie malienne s’est rétablie depuis la crise de 2012. La croissance a atteint 5,3 % en 2017, d’après les chiffres préliminaires du FMI, soutenue par de bonnes récoltes et une bonne performance du secteur tertiaire. Selon le département américain de l’Agriculture, le pays est redevenu le premier producteur de coton africain, avec une récolte de 1,330 million de tonnes pour la campagne 2017-2018, contre 1,3 million de tonnes pour le Burkina. Et les perspectives demeurent favorables.

Cette bonne performance macroéconomique ne s’est cependant pas traduite par une réduction significative de la pauvreté et des inégalités, note le Fonds monétaire international dans son rapport de mai 2018 consacré au pays. Ce document dresse quelques pistes de réformes afin de rendre la croissance plus inclusive. Voici les principales :

Améliorer la fourniture d’électricité. Selon le Fonds monétaire international, l’accès à l’électricité est faible et son coût est élevé. Ces coûts énergétiques augmentent le coût des affaires et réduisent l’attrait du pays pour les investisseurs. « La compagnie publique d’électricité malienne (EDM) est mal gérée et ses indicateurs de performance se sont détériorés ces dernières années. Pour combler l’écart entre ses coûts et ses revenus, EDM s’appuie sur des subventions gouvernementales mal ciblées qui profitent principalement aux plus riches vivant dans les centres urbains desservis par EDM », explique le FMI.

Mobiliser les recettes publiques. « Malgré des améliorations récentes, le ratio impôts/PIB du Mali reste bien en dessous de l’objectif de 20% de l’Uemoa, soulignant le potentiel existant pour mobiliser des recettes fiscales supplémentaires en élargissant l’assiette fiscale, une taxation plus efficace du secteur minier et en renforçant l’administration fiscale », note le FMI.

Diversifier l’économie. « La structure de la production du Mali a peu changé au fil du temps et le pays reste très dépendant au coton et l’or pour ses exportations, ce qui l’expose aux fluctuations des prix internationaux aux événements climatiques locaux », souligne l’institution internationale. En 2016, ces deux produits comptaient pour 80 % des exportations maliennes.

SourceJeune Afrique

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