La présidente de la Cour constitutionnelle du Mali vient une fois de plus d’étonner par une incursion malencontreuse. Après sa surprenante irruption dans le débat d’interdiction du chicha par le Maire Commune IV – décision qu’elle a jugée conforme à la constitution -, elle s’est illustrée la semaine dernière par une non moins surprenante correspondance adressée à Alpha Oumar Konaré.
La missive, dont la confidentialité pouvait difficilement résister aux curiosités, invite l’ancien patron de la Commission de l’UA à son devoir patriotique de venir au chevet d’un pays malade, aux crochets duquel il jouit d’une paisible retraite assurée par un statut d’ancien président. “Le pilier de celle-ci (la République, NDLR) sont fortement fragilisés par la crise multidimensionnelle qui prévaut dans notre pays”, explique la correspondance de celle qui, en 2018, présentait un corollaire de la crise, l’insécurité en l’occurrence, comme un phénomène assez circonscrit et résiduel pour ne pas remettre en cause la sincérité du scrutin présidentiel.
C’est la substance de l’arbitrage par laquelle Maïnassa Danioko a battu en brèche les griefs soulevés par les adversaires du président de la République, quant à la garantie d’une égalité des chances sur un territoire électoral jonché de menaces djihadistes. Il en a découlé un malaise avec certains protagonistes électoraux tel que les juges constitutionnels paraissent disqualifiés pour la partition que voudrait leur attribuer la présidente dans la même correspondance. “La Cour constitutionnelle n’est pas une institution figée, elle a pour rôle profond de créer les conditions d’une pacification des rapports socio-politiques”, peut-on lire dans les passages alors même que le bras-de-fer entretenu avec l’opposition au mépris de son devoir d’impartialité semble plus de nature à entretenir les clivages socio-politiques qu’à les juguler.
En appelant le président Konaré à prendre part aux initiatives en cours, la Cour constitutionnelle prétend au rôle de vecteur de cohésion nationale sans lever les équivoques sur la partition déstabilisatrice ayant son parcours et qui pourrait avoir semé les germes de la crise qui sous-tend son initiative. Par-delà l’élection présidentielle de 2018, l’institution porte un lourd passif historique fait d’inversions de résultats électoraux et partant de légitimités, de fabrication de leaders politiques au gré d’intérêts inavouables, de verdicts peu distincts de l’arbitraire, etc. Des pratiques susceptibles, somme toute, d’ébranler les équilibres socio-politiques sur lesquels reposait la stabilité de la Nation.
À KEÏTA
Source : Le Témoin