Éditorial : l’imam et le virus

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Imam Mahamoud DICKO
Imam Mahamoud DICKO

Il y a quelques semaines, l’imam Mahmoud Dicko accueillait Ouverture Média au siège de son mouvement (Coordination des mouvements, associations et sympathisants). Dans sa déclaration d’une vingtaine de minutes au web-média, il disait que dans le cadre des mesures contre la pandémie de coronavirus, il ne pouvait recommander ni même décider la suspension des prières collectives dans les mosquées.

L’imam rappela alors qu’il n’était plus en responsabilité, faisant sans doute allusion à sa mission à la tête du Haut conseil islamique qu’il a quitté. C’est pourtant la responsabilité du « pouvoir » qu’il pointa. C’est à l’autorité politique de décider l’interdiction des prières collectives, ajouta-t-il, allant jusqu’à insinuer que le Prophète Mohamed (PSL) avait balisé la voie pour l’Umma islamique en cas de crise sanitaire.  Ce mardi 14 avril 2020, l’imam est encore revenu à la charge. En verve sur la chaîne de télévision France 24, qui filmait la mosquée dont il a la responsabilité et où les fidèles priaient épaule contre épaule. Le jour même où le ministère de la Santé et des Affaires sociales déclarait, pour cette seule journée du mardi, 21 nouvelles infections au Covid-19, toutes à Bamako, portant à 144 les cas positifs au niveau national.

Mahmoud Dicko n’ignore pas, cependant, qu’en Arabie Saoudite, la référence pour tout musulman, la décision de fermer les mosquées, y compris les lieux saints, avait été inspirée par le collège des Ulémas local. Il sait qu’en Iran, ce sont les Ayatollah qui étaient à la manœuvre. Il sait également qu’au Sénégal, c’est le consensus des chefs religieux qui avait prévalu. Il sait ensuite qu’au Maroc, c’est le commandeur des croyants, donc le Roi, qui s’est assumé dans l’intérêt ultime des musulmans, face à un péril dont les ravages sont connus. Et  il sait qu’ici au Mali, le clergé, catholiques comme protestants, n’est passé par aucune malice et n’a attendu personne, visant seulement l’intérêt de sa communauté.

D’ailleurs, s’il a évité de se prononcer pour l’ensemble des musulmans du pays -ce qui est dans les cordes du Haut conseil islamique-, Chérif Ousmane Madani Haïdara, le patron de ladite institution, a décidé la fermeture des mosquées relevant de son commandement direct. Parce qu’à la fin, c’est pour le bien des fidèles qu’il faut agir. L’imam Dicko l’a dit, le Prophète Mohamed (PSL) avait tranché en dissuadant, dans un hadith authentifié, tout musulman de se rendre dans un endroit qu’il sait être la proie d’une épidémie ou de quitter cet endroit pour une autre direction.

Le fait que le gouvernement évite de prononcer l’interdiction des prières collectives (certainement pour absence de consensus) ne dédouane pas les imams de leurs devoirs de protection vis-à-vis de l’Umma islamique. Sauf s’ils ne croient pas en l’existence ou au caractère préoccupant du Covid-19. Or, celui-ci a déjà tué plus de cent mille personnes dans le monde et il pénètre le Mali à une vitesse préoccupante. Regrettable fuite en avant, l’on tente en plus de justifier l’ouverture des mosquées par le maintien des législatives. Or il s’agit, pour éviter la contagion, de ne pas favoriser les attroupements, cinq fois par jour, pendant des semaines ou des mois, face à une pandémie qui est sans pitié.

Par Bokar Sangaré

Sourcebenbere

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