Le Mali face au COVID 19 : Pouvons-nous être à la hauteur ?

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Moussa Mara
Moussa Mara

Chapitre 1 : Volets sanitaire et communicationnel A la fin du mois de mars dernier, la pandémie du COVID 19 avait officiellement touché plus de 700 000 personnes dans le monde et causé plus de 35 000 décès. Selon les estimations des organisations internationales, le pire serait encore à venir. Le Président des Etats-Unis a indiqué que ce pays, le plus puissant de la terre, s’attendait à près de 200 000 morts alors qu’il n’en compte qu’un peu plus de 3000 à la fin du mois de mars. Cela augure de lendemains difficiles dans le monde.

Quid de l’Afrique et particulièrement du Mali ?

Tout le monde reconnait que notre continent est le plus faible sur le plan de l’organisation sanitaire et a les moyens les plus limités pour riposter au mal. Or, le Mali figure parmi les pays les plus fragiles du continent et souffre déjà d’handicaps majeurs du fait de la crise sécuritaire qu’il traverse depuis quelques années. Comment un pays comme le nôtre devrait-il donc s’y prendre pour faire face à un problème que les nations les plus riches ont des difficultés à gérer ? C’est le thème principal d’une série de contributions publiées, au nombre de trois, dont la première traite des aspects communicationnels et sanitaires de la riposte souhaitable.

Dans le domaine sanitaire comme dans d’autres, la communication et l’information sont décisives pour mobiliser les citoyens et les convaincre à accompagner les autorités face au défi commun. L’information et la communication doivent privilégier la vérité et la transparence pour consolider la confiance entre les autorités et les populations. En la matière, nous avons des efforts importants à fournir. D’abord il convient rapidement d’expliquer aux maliens la raison mystérieuse qui explique pourquoi le nombre de cas, le nombre de malades et le nombre de décès ne sont pas aussi significatifs dans notre pays alors qu’il est touché depuis presqu’un mois. Cette raison doit être scientifiquement expliquée. Est-ce parce que nous ne pratiquons pas les tests à une ampleur peu élevée ? Ou dû à d’autres facteurs ? Est-ce les effets du climat ? Où serions-nous plus résistants que les européens et américains ?

Nous devons améliorer de manière radicale la qualité et la quantité d’information donnée quotidiennement aux maliens. Là également, en faisant preuve de plus de transparence. Par exemple, le nombre de tests effectués, les résultats obtenus des tests précédents, le nombre de contacts suspects confinés, testés ou non, les contacts recherchés, les quarantaines en cours, les hospitalisations, les guérisons, les décès, les malades en détresse, etc. Nous devons impérativement renforcer le contenu de nos bulletins quotidiens. Il faut alarmer les populations et leur donner l’information juste pour qu’elles soient sensibilisées à la profondeur du mal. C’est cela qui leur permettra d’ajuster leur quotidien et d’adopter les comportements indispensables à leur propre protection. En voulant éviter la panique par des informations « stérilisées », on crée les conditions de paniques ultérieures plus importantes et non maîtrisables.

Les stratégies d’information et de communication, devant associer des professionnels de ces domaines en plus des scientifiques, doivent être conçues et déployées en tenant compte des impératifs développés précédemment.

Sur le plan sanitaire, en partant de l’hypothèse que la pandémie est grave et menace sérieusement notre pays, la protection du personnel soignant doit être la priorité. Il faut renforcer les effectifs (rappel des retraités, plus grande implication des stagiaires et des étudiants…). Il convient d’orienter prioritairement les aides vers le personnel afin de le préserver. Nous devons anticiper d’appeler à la rescousse la diaspora malienne dans ce domaine. Il est impératif de renforcer rapidement les moyens du système sanitaire à la hauteur de la menace. Toutes les mesures exceptionnelles nécessaires pour s’inscrire dans cette trajectoire seront bonnes à prendre en commençant par l’accroissement significatif du budget du secteur, les réquisitions de stocks privés, l’utilisation des capacités militaires, les arrangements réglementaires permettant d’accélérer les processus d’achats de biens et services, etc.

Au cœur de la stratégie de réponse sanitaire, le dispositif de détection précoce des porteurs du virus sera crucial. C’est ce qui a permis à des pays comme la Corée du sud ou Singapour de s’en sortir rapidement. Il faut améliorer le système de détection et de confinement des suspects ainsi que de leurs contacts. L’accroissement des tests disponibles avec un objectif de tester au moins 10% de la population d’ici fin août 2020 est souhaitable. Les tests prioriseront les zones à risques comme Bamako. Les autorités pourront chercher le soutien des pays ayant vécu le traumatisme du COVID 19 comme la Chine et tendre vers la réalisation d’au moins 50 000 tests en avril, 200 000 en mai, 400 000 en juin, 800 000 en juillet et 1 000 000 en août.

Nous devons investir massivement dans le renforcement des capacités d’accueil et de traitement, identifier tous les lieux pouvant servir à cela, dans chacune de nos villes, nous préparer à réaliser des hôpitaux de campagne, commander des lits médicalisés dotés de respirateurs et chercher toutes les aides possibles pour ce faire.

La Constitution d’un stock significatif d’hydroxychloroquine est à lancer rapidement comme l’ont fait de nombreux pays comme le Maroc. Ce médicament est à ce jour le seul en mesure d’aider dans le traitement du nouveau coronavirus, même s’il ne bénéficie pas des autorisations scientifiques requises. Le stock doit être suffisant pour traiter des centaines de milliers de personnes dans l’hypothèse pessimiste d’évolution de la maladie au Mali. Nous devons chercher les aides disponibles, participer aux initiatives régionales ou internationales en la matière, savoir mobiliser notre secteur privé ainsi que les laboratoires étrangers et nationaux.

Face à une crise sanitaire, l’urgence d’agir est d’abord et avant tout sanitaire. Avec au préalable un devoir de vérité sur la réalité de la menace et de son évolution probable ainsi que de notre aptitude à y faire face.

Moussa MARA

SourceSoleil Hebdo

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