Comme des papillons volant de fleur en fleur dans les jardins, irrésistible est bien la tentation d’occuper un fauteuil ministériel, fût-il un strapontin de bois.
Tant que les chèvres ne dédaigneraient pas l’aliment bétail, il serait fort bien aisé de constituer un gouvernement d’union nationale. Cet optimisme affiché côté pouvoir se fonde sur le passé. Contre vents et marrées, des opposants jusqu’au bout des ongles ont troqué leur chemise délavé et leur pantalon d’un autre âge contre des costumes griffés de ministre, leur vieux tacot contre des limousines climatisées, des 4×4 rutilants. Le scénario semble à nouveau se répéter. Des consultations sont en cours dans le grand secret, comme l’exige la circonstance. Evidemment le tambour battant ne sied pas en la matière. Jetant un trouble dans les rangs du front anti-IBK au point de chauffer à blanc les soupçons portant sur d’éventuels départs. Toutefois, nul n’est en mesure de dire avec précision qui mordra ou pas à l’hameçon.
Ces inquiétudes réelles ou supposées semblent repousser à plus tard la prise de décision sur la marche à suivre. La pause voulue ou dictée par l’évolution de la situation découle également d’une flopée de médiations, notamment de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), du Conseil national de la société civile (CNSC) qui se sont soldé par un échec cuisant.
Le Mouvement du 5 juin est resté droit dans ses bottes en brandissant son unique revendication relative à la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta, affectueusement appelé par ses initiales IBK, au pouvoir depuis sept ans.
La dernière manifestation de rue a été un franc succès. Une véritable démonstration de force qui a arraché le pouvoir de son silence. IBK est sorti de la bulle dans laquelle il s’était enfermé depuis le début de la contestation. En dévoilant une batterie de réponses sensées ramener le calme. Qui vont de la résolution de la crise scolaire à la sécurisation des personnes et des biens, en passant par un plan de logement, de réinsertion et de réhabilitation des déplacés du centre du pays, la recherche de solution idoine et urgente aux frustrations nées des dernières législatives, sans passer sous silence un plan de modernisation des hôpitaux. Une pile de propositions qui n’ont pas convaincu les opposants au régime de saisir la main tendue du président IBK.
Un épouvantail qui ne fait peur qu’aux moineaux
Pas tous. Puisque d’aucuns sont tentés de saisir la balle au bond. Mettant ainsi à rude épreuve l’unité affichée depuis le déclenchement de la lutte contre le pouvoir en place. D’où la multiplication de messages sur les réseaux sociaux s’inscrivant en faux contre l’amorce de négociations en vue de la formation d’un gouvernement d’union nationale. A y faire une petite promenade on découvre un Bakary Togola très en verves, du haut de son piédestal de président de la Chambre d’agriculture du Mali, suggérer à IBK de glisser entre les dents carnassières de ses opposants de quoi leur clouer le bec. La manœuvre consiste à peindre les hommes politiques sous les traits de véritables caméléons changeant de couleurs au gré d’intérêts qualifiés à tort ou à raison de sordides. Vu sous cet angle, d’aucuns seraient moins tenter de frapper à la porte du gouvernement du Dr Boubou Cissé reconduit le jeudi 11 juin.
Un épouvantail qui ne fait peur qu’aux moineaux. Qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente, un papillon ne peut s’empêcher de voler de fleur en fleur dans les jardins. Il y va de son intérêt, de sa survie, pour paraphraser un ponte du régime qui a requis l’anonymat.
Georges François Traoré
Source : L’informateur