Selon une enquête réalisée par le gouvernement, les fortes pluies qui se sont abattues sur la capitale, dans la nuit du 15 au 16 mai 2019 ont touché 368 ménages et fait 16 morts.
Vous êtes généralement, face aux sinistres ou autres catastrophes naturelles, émus par l’ampleur des dommages humains, sociaux et matériels (décès, déplacés, maisons et voitures emportées par les eaux, etc.). Les dégâts financiers sont souvent énormes mais passent inaperçus parce qu’ils ne sont pas régulièrement documentés et évalués, surtout dans nos pays. Une étude, intitulée : évaluation rapide des dommages, des pertes et des besoins post-inondation à Bamako (Rapid PDNA) s’est intéressée à la question. Nombre de personnes s’en souviennent encore, dans la nuit du15 au 16 mai 2019, de fortes précipitations, estimées à 138 mm, se sont abattues sur le District de Bamako provoquant des inondations dans quatre Communes. Elles ont tué 16 personnes à Niamakoro, Kalabancoro, Missabougou et Faladié et touché 368 ménages, soit environ 2.500 personnes. Plusieurs routes, ponts, écoles, centres de santé et autres infrastructures communautaires ont été endommagés. Des quartiers comme Banconi, Daoudabougou, Baco-Djicoroni, Tiébani, Kabala, Yirimadio, Niamakoro, Missabougou, Kalabancoura et Sotuba ont été submergés par ces eaux.
Pour connaître les causes et les conséquences de ces inondations, une enquête a été conduite auprès de 157 ménages pour recueillir des informations précises sur les effets de la catastrophe et sur les caractéristiques socio-économiques de la population affectée, révèle le rapport de Rapid PDNA.
Publié en juillet 2019, il a été préparé par le gouvernement avec l’appui conjoint de la Banque mondiale, de l’Union européenne et le Système des Nations unies au Mali. Les différents acteurs de la prévention, préparation, réponse et relèvement aux crises et catastrophes au Mali ont participé à sa réalisation.
Ainsi, six jours durant, l’équipe composée de chercheurs de l’Université des sciences, techniques et technologies de Bamako, des agents de la Protection civile et des volontaires de la Croix- rouge a sillonné les quartiers des trois Communes les plus touchées. Elle a interrogé les ménages sinistrés et collecté des données à l’aide d’un questionnaire préétabli. Grâce à cette étude, d’autres dégâts comme les pertes de céréales, d’effets vestimentaires, de mobiliers et d’outils de travail, d’ustensiles de cuisine et des documents d’état civil, ont été signalés. Les morts d’animaux domestiques n’ont pas été recensées de manière exhaustive, mais le rapport signale la disparition de 57 têtes de bétail et volaille.
L’étude dresse un profil clair des habitations touchées par ces inondations. Elles ont concerné les servitudes le long des collecteurs naturels et les zones marécageuses occupées par l’habitat dans les quartiers à réhabiliter ou les quartiers réhabilités dans le cadre du programme spécial «Opération sauvons notre quartier», non achevé. «Plus de 95% des maisons écroulées sont construites en banco dans les quartiers spontanés insalubres, dont le processus de réhabilitation n’est pas achevé et qui sont situées dans les servitudes des collecteurs naturels. 59% des dommages causés aux logements ont eu lieu en Commune VI, 30% en Commune V et 11% en Commune II», indiquent les enquêteurs qui estiment à 39 le nombre total de logements entièrement écroulés. La Commune V a été la plus touchée.
Les dégâts financiers sont énormes. Le coût global des dommages causés aux logements est estimé à 1,1 milliard de Fcfa. Ce montant est réparti entre les logements totalement détruits évalués à 442 millions de Fcfa, les habitations partiellement détruites estimées à 458 millions de Fcfa et l’ensemble des biens ménagers détruits pour plus de 169 millions Fcfa. Le coût des dommages causés aux cinq logements en dur totalement détruits est estimé à 100 millions de Fcfa, contre 144 millions de Fcfa pour les 12 logements semi-durs. La valeur des 22 habitats en banco totalement détruits est estimée à 198 millions Fcfa. Le coût des dommages causés aux 46 logements en banco partiellement détruits est de plus de 186 millions Fcfa, celui des 22 logements semi-durs à 119 millions de Fcfa. Quant aux 17 logements en dur partiellement détruits, leur valeur est estimée à 153 millions de Fcfa. Les pertes liées aux revenus des locations sont de l’ordre de 3 millions de Fcfa. Cette estimation est basée sur un coût moyen de 30.000 de Fcfa de loyer mensuel perdu par 44% des maisons totalement effondrées durant 6 mois, note l’étude.
Les défis futurs consisteront à dresser et à résoudre durablement toutes les insuffisances de nos mécanismes de prévention, de réponse et de relèvement aux catastrophes, révélées par cette évaluation exhaustive intersectorielle, ont écrit les enquêteurs. Cela, qu’elles soient d’ordre technique, politique, financier ou simplement opérationnel. Selon l’étude, il est nécessaire aujourd’hui de planifier la reconstruction des secteurs affectés et de construire des conditions favorables au rétablissement des moyens de subsistance pour nos concitoyens. Il faut noter que ces dommages sont estimés à près de 5 milliards de Fcfa, alors que le coût des besoins de relèvement et reconstruction est évalué à environ 20 milliards de Fcfa.
évoquant les causes, les enquêteurs concluent que Bamako est dans un environnement urbain et naturel très complexe, avec de multiples facteurs de risques. Les plus importants sont l’urbanisation non maîtrisée, l’utilisation anarchique des terres, la morphologie creuse et la topographie accidentée. S’y ajoute le manque de systèmes adaptés de drainage des eaux et de gestion des déchets liquides et solides, etc. La ville des Trois caïmans est aussi exposée et vulnérable à de nombreux risques et catastrophes, dont les plus prégnants sont les inondations et la sécheresse. C’est aussi une ville insuffisamment dotée de capacités de réponse à la dimension des risques encourus.
Synthèse de
Lassana NASSOKO