Crise sociopolitique au Mali : Les propositions du M5-RFP aux dirigeants de la CEDEAO

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Chogeul Kokala Maïga
Chogeul Kokala Maïga

Les chefs de l’Etat du  Ghana, du Niger, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire et du Nigeria ont  séjourné, ce jeudi, à Bamako  pour tenter,   à leur tour, après l’échec des négociations avec  les deux premières de la délégation de la CEDEAO,  d’obtenir un accord par  rapport à la contestation qui secoue  le Mali depuis maintenant  plus d’un mois.  Cette énième médiation  n’est pas parvenue à un accord final tant le M5-RFP  avec  à sa tête l’imam Dicko est resté campé à sa position de demande de démission du Président de la République.  Sans tirer une conclusion officielle, ces dirigeants de la CEDEAO ont prévu, dans les prochains jours, un sommet par vidéoconférence pour entériner une décision.   En attendant, Maliweb.net  vous propose l’intégralité des propositions du M5  qui ont été soumises à la délégation des chefs  de l’Etat de la CEDEAO.

  1. LES CAUSES DE LA CRISE ACTUELLE :

Le Président Ibrahim Boubacar Keïta a, dès son élection en 2013, mis en place un système de prédation fondée sur la corruption et l’impunité qui ont gravement impacté l’ensemble des secteurs de la vie sociale, économique, politique, administrative, culturelle et surtout la situation sécuritaire du Mali, voire de la sous-région.

Avec sa famille et ses amis, il a mis en place un véritable système de captation des richesses nationales, de mainmise sur l’appareil d’Etat et sur l’administration publique, de prise d’intérêts personnels dans tous les secteurs économiques et financiers.

Cette façon de gérer a empêché l’Etat d’assumer ses fonctions régaliennes de sécurité et de développement, et a conduit le Mali au bord du gouffre et compromet la stabilité dans le Sahel.

  1. LES MANIFESTATIONS ET LES CONSEQUENCES DE LA CRISE AU MALI :

Ainsi, des faits et pratiques graves ont cours au Mali depuis l’élection de M. Ibrahim Boubacar Keïta, comme notamment :

▪ l’immixtion flagrante d’intérêts privés qui ont pris le contrôle total de la gestion des affaires publiques ;

▪ les détournements massifs et documentés des fonds alloués, y compris ceux alloués à nos Forces de défense et de sécurité, pour un pays en guerre et sous assistance africaine et internationale ;

▪ l’instrumentalisation de la crise au nord et au centre du pays ;

▪ le développement de toutes sortes de trafics et de pratiques impactant la sous-région ;

▪ la remise en cause de l’unité nationale et du vivre-ensemble par la création et l’entretien de milices ethniques, intercommunautaires ;

▪ le laxisme et les complicités dans la lutte contre le terrorisme qui a finalement pris racine dans des pays voisins et qui font de notre Pays, l’épicentre et le maillon faible dans la déstabilisation de la sous-région ;

▪ le non-respect de multiples engagements pour la décrispation de la situation sociopolitique et sécuritaire ;

▪ l’abandon de secteurs entiers de la vie socio-économique (école, santé, secteur agricole, infrastructures …) ;

▪ les disparitions forcées, les arrestations arbitraires et les incarcérations ;

▪ les violations réitérées de la Constitution ;

▪ les fraudes électorales qui ne permettent plus aux élections de jouer leur rôle régulateur, notamment lors du scrutin présidentiel de 2018 et des deux (2) tours de l’élection des députés en mars et avril 2020 ;

▪ les répressions sanglantes des dernières manifestations populaires, ayant causé au moins vingt-trois (23) morts et plus d’une centaine de blessés graves, par des forces spéciales antiterroristes (FORSAT) usant d’armements de guerre et de balles réelles contre des manifestants pacifiques à mains nues, dans les rues, les sièges des organisations politiques, les domiciles privés et même dans des lieux de culte.

III. LA RESPONSABILITE PLEINE ET ENTIERE DE M. IBRAHIM BOUBACAR KEÏTA :

En 2013, M. Ibrahim Boubacar Keïta a été quasiment plébiscité et nul n’a durablement contesté cette élection.

A l’inverse, son élection de 2018, largement entachée de fraudes, a été longuement contestée entraînant une profonde crise post-électorale.

C’est précisément une mission de la CEDEAO du 18 octobre 2018 conduite à Bamako par le Ministre des Affaires Étrangères du Nigeria, Président du Conseil des Ministres qui y a mis un terme en préconisant ce qui suit :

« Prenant acte de la prolongation de la législature actuelle selon l’avis de la cour constitutionnelle et au regard des dysfonctionnements largement reconnus et évoqués par tous les interlocuteurs lors du scrutin présidentiel passé, il est impératif que le Gouvernement et tous les acteurs socio-politiques conviennent, de manière consensuelle, d’entreprendre des réformes courageuses des cadres légaux, y compris la Constitution de février 1992, et du système électoral avant de s’engager dans les prochaines échéances électorales que compte mener le pays… ».

Au demeurant, les pratiques de mal-gouvernance voire de non-gouvernance instaurées par M. Ibrahim Boubacar Keïta et son régime ont :

  1. a) rendu inopérantes les conclusions des différents Dialogues politiques internes ;
  2. b) causé une rupture totale de la confiance entre le Chef de l’Etat, l’opposition politique et une bonne partie du corps social, en particulier les forces syndicales ;
  3. c) conduit à une instabilité gouvernementale avec notamment les nominations de six (6) premiers ministres et autant de ministres chargés respectivement des secteurs régaliens de la Défense, de l’Administration territoriale, des Affaires étrangères, de Chefs d’Etats-Majors Généraux des Armées, alors que le Mali est en guerre contre le terrorisme et menacé de partition ;
  4. d) et enfin, entrainé l’illégalité et la perte de légitimité de toutes les institutions de la République sans exception.
  5. LA SOLUTION : LA DEMISSION DE M. IBRAHIM BOUBACAR KEÏTA ET LA REFONDATION DE L’ETAT :

Après avoir essayé, sans succès, toutes les voies du dialogue et celles de droit pour résorber les conséquences de la crise, et pris acte de la confiscation du mécanisme électoral ôtant aux élections toute signification et toute fonction régulatrice du système démocratique, le M5-RFP, soucieux du devenir et de la survie du Mali, s’est engagé à :

1) Organiser des manifestations légales et pacifiques sur l’ensemble du territoire national et dans la diaspora pour amener M. Ibrahim Boubacar Keïta à prendre lui-même la décision de démissionner de la présidence de la République du Mali.

2) Agir exclusivement dans le cadre de la Loi, dans le strict respect de la Constitution et des engagements communautaires et internationaux du Mali.

3) Tirer les conséquences de la caducité du Mémorandum du 30 Juin 2020 qui proposait à M. Ibrahim Boubacar Keïta des solutions politiques de sortie de crise qui n’y a jamais répondu.

4) Eviter un vide au sommet de l’Etat et la rupture de la chaine de commandement militaire et sécuritaire par des discussions avec M. Ibrahim Boubacar Keïta.

Au constat de la volonté affichée de M. Ibrahim Boubacar Keïta de gagner du temps, et surtout, suite aux répressions meurtrières des manifestations populaires reprises à partir du 10 juillet 2020, le M5-RFP, lors des échanges avec une Mission de Médiation de la CEDEAO dépêchée au Mali sous la conduite de M. Goodluck JONATHAN, a soumis un document articulé autour de 4 points qui, malheureusement n’ont connu aucune suite.

5) A présent, les tueries de masse des 10, 11 et 12 juillet 2020 de 23 manifestants aux mains nues par des forces spéciales antiterroristes (FORSAT) ont ôté à M. Ibrahim Boubacar Keïta toute légitimité pour continuer à gouverner le Mali. Le M5-RFP travaille d’ailleurs au dépôt d’une plainte devant les juridictions nationales et la Cour Pénale Internationale (CPI) ;

6) Enfin, pour le M5-RFP, M. Ibrahim Boubacar Keïta manque manifestement de leadership et de capacité à présider aux destinées du Mali en tant que Nation en crise. Au demeurant, il a abandonné cette mission à des personnes qui n’en ont ni la légitimité, ni les compétences requises, ni même le souci du devenir du Mali.

En conclusion, le M5-RFP sollicite des Chefs d’Etats de la CEDEAO l’accompagnement du Peuple malien dans sa quête de sécurité, de paix et de prospérité socioéconomique, à travers la restauration d’un Mali démocratique, républicain et laïc, avec une gouvernance responsable et vertueuse.

La rédaction

Source : Maliweb.net

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