Ligne de force : Situation aventureuse

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Le report, au prix d’une violation flagrante de la Constitution, avec la complicité de la Cour constitutionnelle, des législatives au 30 juin 2019, est certes un aveu tardif du pouvoir en place. Cela de ce que la présidentielle tumultueuse de juillet-août dernier a conduit le Mali à une crise de grande ampleur, malgré les efforts substantiels fournis pour la minimiser.

Cependant, le gouvernement et l’opposition, dans sa plus large expression, s’accordent sur un point.  Il doit être mis à profit pour apporter des réformes  au système électoral. Pour le rendre moins sujet à contestation. Et favoriser ainsi un climat post-électoral  plus apaisé.

Pour cette frange de l’opposition qui a fait de ces réformes la condition incontournable de sa participation aux législatives annoncées d’abord pour octobre, puis ajournées à novembre 2018, enfin reprogrammées pour juin 2019, celles-là doivent passer par le rétablissement de la CENI. Cela dans sa vocation originelle d’entité unique dans l’organisation des élections. Une vocation qu’elle a perdue. Cela après le désastre électoral de 1997 au bénéfice du ministère de l’Administration territoriale.

Lequel ne trouve plus grâce à ses yeux. Depuis la réélection cahoteuse d’IBK. Certaines de ses composantes en rendent responsable le ministre Mohamed Ag Erlaf dont elles réclament la tête à cor et à cri.

Changer le mode de désignation des membres de la CENI

Il reviendra à cette CENI portée à un haut degré de professionnalisation de reprendre toutes les prérogatives du ministère en charge des élections. Mais aussi celles par lui dévolues à la Direction générale des élections (DGE).  Singulièrement l’élaboration et la gestion du fichier électoral.

L’opposition est, en outre, convaincue que l’actuel mode de désignation des neuf membres de la Cour constitutionnelle est à l’avantage certain du président sortant. Du moins s’il est candidat à sa propre succession. Comme ce fut le cas pour IBK à la récente présidentielle. Actuellement, trois membres de cette Cour sont choisis par le président de la République, trois par le président de l’Assemblée nationale. Et les trois restants par le Conseil Supérieur de la Magistrature. Ce dernier est présidé par le président de la République.

Aussi ne manquera-t-elle pas de réclamer que ce mode de désignation soit modifié pour plus de partialité.

Ces réformes requerront une modification de la loi électorale. Pour celle afférente à la création de la CENI relookée et une révision de la Constitution pour celle concernant la composition de la Cour constitutionnelle. Si le vote des députés majoritairement issus du camp présidentiel suffit pour faire passer la première, la seconde exige un référendum en plus de son adoption par les élus nationaux.

«Cas de force majeure»

On a encore en mémoire la reculade spectaculaire du pouvoir sur le projet de référendum constitutionnel en juillet 2017. Un nouvel échec dans le genre l’acculerait à une position critique. Il compromettrait non seulement la mise en œuvre de l’accord du 20 juin 2015 en sa disposition relative à la mise en place du Sénat mais en plus la tenue des législatives elles-mêmes.

Aujourd’hui, la démocratie malienne ne tient déjà que par la prorogation du mandat parlementaire. Cela sur la base d’un «cas de force majeure» non spécifié par la Cour constitutionnelle. Elle se trouverait dans une situation atypique. Et, disons-le tout net,  aventureuse.

Saouti Haïdara

Source: L’Indépendant

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