Le président de la Transition malienne Bah N’Daw a signé, le 09 novembre dernier, deux décrets très importants que polémiques pour la création du Conseil National de Transition (CNT). Le premier Décret n°2020-0142/PT-RM du 9 novembre 2020 fixe les modalités de désignation de ses membres alors que le second Décret n°2020-0143/PT-RM du 9 novembre 2020 fixe la clé de répartition entre les composantes du CNT. La part belle revient aux colonels du CNSP. Furieux, les partis politiques et syndicats renoncent d’y siéger. Quelles sont les raisons qui motivent ce renoncement de la classe politique et des syndicats au CNT ?
Dans la clé de répartition de cet organe législatif transitoire : les Colonels du Comité National de Salut du Peuple (CNSP) s’octroient la part du « Billisi » soit 22 membres sur 121 que compte le CNT ; 8 places sont réservées au M5-RFP (le mouvement sociopolitique à l’origine de la chute du régime défunt) ; 11 aux partis politiques ; 4 aux Centrales Syndicales du Mali et le reste des 71 sièges entre les autres forces vives de la nation à savoir : les groupes signataires de l’accord de paix, les mouvements de l’exclusivité, les organisations des défenses des droits de l’homme, des jeunes, des femmes, des maliens établis à l’étranger et les groupements syndicaux, les ordres professionnels, les confessions religieuses, les autorités transitionnelles, les chambres consulaires, les faitières de la presse et des arts et de la culture. En somme, le premier Décret octroie la plus grande représentativité au sein du CNT alors que le second autorise le colonel Assimi Goïta, vice-président de la Transition et non moins président du CNSP de procéder tout seul au choix de l’ensemble des membres du CNT.
Comme l’on pouvait s’y attendre, la publication des deux décrets a vivement fait beaucoup réagir l’ensemble de la classe politique malienne et les Centrales Syndicales. Le Comité stratégique du Mouvement du 5 juin a aussitôt décidé de ne plus participer au CNT. Ses responsables dénoncent « une militarisation des institutions et une négligence envers les partis et mouvements politiques ». Idem pour la Coalition des forces patriotiques (COFOP). Celle-ci dénonce non seulement, « l’absence de concertation et une tentative de confiscation du rôle des politiques » mais aussi et surtout, les responsables de la COFOP considèrent les deux décrets comme: « Une entrave à la démocratie, et un danger pour l’avenir du pays ».
Même la coalition politique Ensemble Pour le Mali (EPM), les ex soutiens du régime déchu, sont enfin sortis de leur léthargie pour dénoncer l’accaparement de la junte des Colonels sur la Transition en cours dans notre pays. Ainsi, les Partis et Regroupements Politiques : Alliance Ensemble Pour le Mali (EPM), COFOP, ARP, Alliance JIGIYA KURA, le Parti PSP (membre du FSD-SAP), le Parti PRVM FASOKO, le Parti ADP MALIBA, le Parti YELEMA, les Partis NON ALIGNES, exhortent l’ensemble de la classe politique en « une union sacrée » afin d’observer ce devoir de la non-participation des représentants des partis politiques au Conseil National de la Transition (CNT). Même son de cloche pour les centrales syndicales, notamment la CSTM, qui renoncent à leur participation à l’organe législatif de la Transition. Ils s’insurgent contre le manque de concertation qui devait être un préalable à la mise en place de ce Conseil.
Si le mot d’ordre du boycott du CNT est bien suivi par l’ensemble de la classe politique et les Centrales syndicales, les colonels du CNSP auront désormais la mainmise totale sur ce Parlement de Transition. N’était-il pas d’ailleurs leur objectif inavoué ?
Falaye Keïta
Source : Le Pélican