APRÈS TROIS ANS D’EXISTENCE, LA FORCE DU G5 SAHEL PEINE À CONVAINCRE

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Un soldat de la force conjointe à Sévaré (Mali), (image d'archives)
Un soldat de la force conjointe à Sévaré (Mali), (image d'archives)

Une montée en puissance sans cesse reportée et des résultats en deçà des attentes: la force conjointe du G5 Sahel, coalition militaire régionale mise sur pied pour combattre les groupes jihadistes au sud du Sahara peine à convaincre de son efficacité, trois ans après sa création.

Composée de sept bataillons fournis par les cinq pays du Sahel (Mali, Tchad, Niger, Burkina Faso, Mauritanie), cette force a pour mission de faire évoluer ensemble les soldats sahéliens, toutes nationalités confondues, contre une menace jihadiste transfrontalière.

Trois couloirs, ou “fuseaux” de 200 km de large de part et d’autre des frontières communes, “constituent (le) domaine d’opérations” de ces bataillons, installés dans leur pays respectifs, selon l’état-major de la force, qui programme leurs opérations.

Mais sur le terrain, ces bataillons, environ 5.000 hommes au total mais dont les effectifs réels restent flous, répondent plus à leur commandement national qu’à celui de la force conjointe.

“On ne sait pas quand ils prennent leurs ordres de leur état-major national ou du commandement de la force conjointe”, explique une source militaire occidentale.

Lors d’une opération avec la force française antijihadiste Barkhane fin 2019, des officiers burkinabé avaient indiqué à l’AFP avoir reçu l’ordre de Ouagadougou de ne pas traverser la frontière vers le Mali, alors que le principe de la force est justement d’avoir de la profondeur transfrontalière.

Rien n’indique que cela ait changé un an plus tard.

Aussi, les armées peuvent demander quand elles le souhaitent “à ce que les troupes reviennent pour assurer leur propres opérations”, relève Ibrahim Yahya Ibrahim, de l’International Crisis Group (ICG).

– Forte dépendance –

Si plus de cinquante blindés ont été offerts par des partenaires comme l’Union européenne, la force du G5 manque toujours de matériels, de moyens financiers et de renseignements propres, ce qui la maintient dans la dépendance de ses alliés.

Au Mali, la mission de l’ONU (Minusma) livre cycliquement nourriture et carburant à des camps excentrés dont les éléments n’ont pas la capacité opérationnelle d’être autonomes.

Début décembre, Barkhane a aussi été sollicitée pour escorter des soldats de Boulkessi, un camp isolé dans la brousse du centre du Mali, afin qu’ils puissent être relevés.

Lors de l’escorte, soldats français et maliens sont tombés dans une embuscade jihadiste.”D’intenses coups de feu” ont été échangés, mais le “renseignement en permanence” et l’intervention de “l’aviation et des hélicoptères” de Barkhane ont permis à la colonne de rebrousser chemin sans victime, selon un compte rendu de l’état-major français.

Autant d’éléments que la force n’a pas: “Nous ne disposons pas de vecteurs aériens indispensables pour la lutte antiterroriste, ni de moyens technologiques de renseignement”, reconnaît une source à l’état-major de la force du G5.

– ‘Serpent de mer’ –

Début 2020, lors d’un sommet à Pau (France) consacré à la sécurité dans le Sahel, le Tchad a promis l’envoi d’un bataillon dans la zone dite des “trois frontières”, entre Mali, Niger et Burkina Faso.

Il devait être le premier bataillon déployé dans un autre pays que le sien.Mais l’annonce, faite à un moment charnière où l’allié français demandait un regain d’effort sahélien mais où N’Djaména faisait face à des attaques sur le lac Tchad, n’a pas été suivi d’effet.

Douze mois plus tard, ce “serpent de mer”, selon l’expression d’un diplomate sahélien, reste d’actualité, affirme N’Djamena.

La projection du 8e bataillon “se prépare bien comme prévu”, assure Cherif Mahamat Zene, le porte-parole du gouvernement tchadien.Il reconnaît toutefois qu’elle est suspendue à “un certain nombre de préalables” qui “font l’objet de discussions en cours” et dont il espère la conclusion “très prochainement”.

La force conjointe “est victime des promesses” des partenaires “qui ont une exigence de résultats immédiats”, regrette la chercheuse Niagale Bagayoko, qui plaide pour la patience.

Certes, les attaques jihadistes sont beaucoup moins nombreuses qu’il y a un an.Mais est-ce pour autant dû à cette “montée en puissance” si souvent annoncée?

“2020 a été une année où les armées ont pris le dessus” sur les jihadistes, convient Ibrahim Yahya Ibrahim.Mais le chercheur de l’ICG souligne qu’il y a “des périodes de haut et de bas”.”Est-ce que ça va durer?Ce qui est sûr, c’est que les groupes ne sont pas totalement anéantis”, dit-il.

Source : AFP

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