Naguère déboussolée au point de confondre ses alliés avec l’ennemi et d’imputer chaque déroute à la sournoiserie de ses partenaires, l’armée malienne à défaut de capituler, semble se résigner à admettre l’évidence : une impuissance réelle à combler les attentes quant aux équations du septentrion et du Centre.
C’est ce qu’il ressort, en tout cas, de la posture mutique avec laquelle la haute hiérarchie militaire s’est illustrée devant les propos défaitistes de l’imam Mahmoud Dicko. Repris de nombreuses fois sur les réseaux sociaux, lesdites déclarations ne pouvaient passer inaperçues surtout qu’elles ont trait à là persistante polémique autour de l’opportunité ou non de prendre langue avec les groupes islamistes du Nord dirigé par Iyad Ag Ghali et du Centre par Amadou Kouffa. Selon l’ancien président du Haut conseil islamique, la situation n’a que trop duré et mérite que le noeud gordien soit tranché pour de bon. Mais au lieu d’inviter pour ce faire – comme jadis il l’avait fait – ses concitoyens à se saisir de gourdins et projectiles contre les envahisseurs, Mahmoud Dicko exhorte cette fois à la négociation avec les principaux chefs djihadistes de JNIM et de la Katiba du Macina. Quoique balayée d’un revers de main par les partenaires du Mali dans la lutte antiterroriste, cette option, aux yeux du leader religieux dans la peau d’acteur politique, se justifie autant par la lassitude de Maliens face aux nombreuses privations inhérentes à l’absence de l’Etat que par l’incapacité avérée des forces nationales à dénouer l’équation par les armes. La perception de l’imam Dicko, selon toute vraisemblance, n’est pas totalement dénuée de toute consistance, quoiqu’elle n’intervienne qu’une décennie après qu’une conviction similaire a pu coûter de la disgrâce et de l’antipathie au plus haut gradé des officiers supérieurs maliens descendu de son piédestal en pleine guerre, Feu Amadou Toumani Touré.
Il n’en demeure pas moins que lesdites déclarations sont propres à affecter le moral des troupes engagées sur les deux fronts et confortent autant la perplexité des opinions étrangères de moins en moins réceptives à la présence militaire de leurs armées respectives dans le « bourbier » sahélien. Toutes choses pour lesquelles un confrère de la place avait même essuyé des semaines et mois de détention, lors de la Transition de 2012, pour « démoralisation des troupes ».
Exit donc aujourd’hui le temps des subterfuges en rapport avec le détournement supposé des moyens (PGA et primes) et place à la réalité dont l’évocation ne semble guère déranger outre mesure les différentes composantes de FAMAs, désemparées aujourd’hui comme hier devant la guerre asymétrique et son corollaire d’embuscades meurtrières. En tout cas, aussi paradoxal que cela puisse paraître, les propos défaitistes de l’autorité religieuse n’ont effarouché ni n’ont inspiré le moindre démenti protestataire à aucun haut gradé d’une armée dont le mutisme s’apparente à la résignation voire un aveu d’impuissance face aux défis de reconquête de l’intégrité territoire du pays. Pas de quoi en définitive encourager à consentir tant de ressources à la LOPM dont l’objectif est de mettre les troupes dans l’état d’accomplir cette mission, ni fouetter l’ardeur des forces étrangères engagées auprès de l’armée nationale dans la lutte anti-terroriste.
A KEÏTA
Source : Le Témoin