On ne connaîtra donc jamais les circonstances exactes de l’assassinat en mai 2012 des 21 bérets rouges dont les corps ont été retrouvés plus tard dans une fosse commune à Dio dans la ville garnison de Kati à 15 km de Bamako.
Deux mois avant, le capitaine Amadou Aya Sanogo était sorti de sa ville-garnison de Kati pour renverser le président Amadou Toumani Touré, qu’il accusait de mollesse face à l’insurrection djihadiste au Nord.
C’est dans la guerre des bérets qui s’est ensuivie, les verts de Kati contre les rouges fidèles à ATT, que la vingtaine de commandos parachutistes qui ont tenté un contrecoup d’État ont été exécutés par leurs frères d’armes.
Neuf ans après les faits, la Cour d’assises de Bamako a ordonné le lundi 15 mars 2021 l’extinction de la procédure engagée contre le capitaine Sanogo, bombardé entre-temps général. Le chef des putschistes était poursuivi avec 17 autres personnes pour enlèvement, assassinat, complicité d’enlèvement et d’assassinat.
Arrêté le 27 novembre 2013, il a d’abord été détenu à Bamako, puis à Sélingué, ensuite à Manantili avant d’être assigné de nouveau à résidence à Sélingué.
Son procès s’ouvre le 30 novembre 2016 à Sikasso mais sera suspendu dès le 8 décembre de la même année. Retour ensuite au prétoire le 25 février 2021 pour un nouveau report au 11 mars 2021. Entre-temps, précisément le 28 janvier 2020, le natif de Ségou sera mis en liberté provisoire.
C’est donc un enterrement de 1ère classe de ce dossier qui vient d’être fait en vertu de la loi d’entente nationale votée en 2019 et sur la base de laquelle les ayants droit des victimes ont été indemnisés. En plus d’une villa de type F5, les familles des soldats reçoivent chacune 15 millions de francs CFA, celles des caporaux 20 millions, celles des sergents-chefs 30 millions, celles des adjudants 35 millions et les familles des lieutenants 40 millions. On passe ainsi en pertes et profits les nombreux cadavres qui ont jonché le bref règne du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE).
La vérité et la justice sont ainsi sacrifiées sur l’autel de la réconciliation nationale, une sorte de prime à l’impunité au détriment des familles des victimes qui ont explosé de colère une fois la décision rendue.
En vérité, la proximité de Sanogo avec les maîtres actuels de Bamako a pu jouer dans l’évolution de sa situation judiciaire. Certains des putschistes qui ont débarqué le président Ibrahim Boubacar Keïta le 8 août 2020 et qui jouent aujourd’hui les premiers rôles dans la transition malienne, à l’image du colonel Malick Diaw, actuel président du Conseil national de transition (CNT), n’avaient-ils pas déjà fait le coup de feu en 2012 avec celui qui est désormais ressorti libre le lundi 15 mars dernier de la Cour d’appel de Bamako ?
Youssouf Konaré
Source : Nouveau Réveil