Après le combat à la fois héroïque et patriotique mené par Choguel Kokalla Maiga et ses camarades, il serait politiquement inadmissible et logiquement incorrect que le M5 RFP soit réduit à une portion incongrue rasant le mur pour se faire entendre. Et pourtant, au lendemain du putsch, les colonels n’ont pas hésité à prendre part au meeting géant organisé par le Mouvement du 5 juin et à clamer haut et fort le rôle combien de fois capital joué par le mouvement. Les colonels putschistes avaient même reconnu avoir parachevé la lutte patriotique d’une frange importante du peuple incarnée par le M5. Alors pourquoi les putschistes ont-ils eu outrecuidance de marginaliser le mouvement qui aurait dû être leur soutien et qui pourrait même leur permettre d’avoir une certaine légitimité ? Ce sont-ils laissés manipuler par les anciens dignitaires et autres officiers de l’ancien régime IBK, aujourd’hui déboussolés et qui sont à la recherche d’un nouveau souffle ? Les colonels putschistes apparaissent aux yeux de l’opinion comme des officiers félons pour n’avoir pas respecté leurs engagements.
Nul ne pourrait contester la légitimité des revendications portées par les leaders du Mouvement du 5 juin Rassemblement des Forces Patriotiques, M5 RFP. Ils sont des acteurs incontournables du changement pour lequel ils ont consentis d’énormes sacrifices y compris en vies humaines. Donc, qu’ils soient écartés du centre de décision ou payés en monnaie de singe est tout simplement une trahison de l’ex Conseil National pour le Salut du Peuple, CNSP, dont la seule qualité est de posséder les armes. Les putschistes, après avoir choisi le Président de la transition, le Premier ministre, ils auraient dû permettre au M5 RFP d’avoir la tête du ConseilNational de la Transition, CNT, l’organe législatif et surtout des ministères régaliens. Mais, comme obnubilés par le pouvoir, les colonels putschistes se sont accaparés des postes juteux de l’administration et nommés leurs partisans à la tête des ministères importants. Par souci d’équilibre et pour mener à bien les réformes et les changements auxquels le M5 aspire, il devrait y avoir un partage des responsabilités entre les acteurs majeurs qui ont permis le changement intervenu le 18 Août 2020.
Bah N’Daw et Moctar Ouane vont-ils enfin s’affranchir de la tutelle de la junte pour équilibrer le jeu politique et accorder au M5 RFP toute la place qui lui revient dans la gestion de la transition ? Tous les regards sont désormais tournés vers les deux têtes de l’exécutif afin de donner un nouveau souffle à la clopinante et chancelante transition. Ils doivent procéder, au prime abord, à la diminution du surpoids des militaires au gouvernement, ensuite accorder au M5 RFP toute la place qui est la sienne dans les instances de décisions de l’Etat. Ensuite, mettre en place un gouvernement de large ouverture, mais en écartant tous ceux qui étaient hostiles au changement.
En somme, Bah N’Daw et Moctar Ouane ont désormais une occasion idoine d’entrer par la grande porte de l’histoire de notre pays, en organisant une transition inclusive gage de toute réussite et en dotant le pays d’institutions fortes, à l’issue d’élections transparentes et crédibles.
Youssouf Sissoko
Source : Inf@sept