A peine la liste du nouveau Gouvernement rendu public, ce lundi 24 mai, des militaires proches de l’ « ex junte du Comité National de Salut du Peuple » (CNSP) ont interpellé manu-militari le président de la Transition, Bah N’Daw et son Chef de Gouvernement, Moctar Ouane ainsi que le Secrétaire Général de la présidence et le tout nouveau ministre de la Défense. Le lendemain matin, le Vice-président, Col Assimi Goïta, n’a pas tardé d’assumer la paternité du coup de force, en annonçant, par le biais d’un communiqué, que les deux Chefs de l’exécutif transitoire sont déchus de leurs prérogatives pour « avoir enfreint la charte de la transition, laquelle va se poursuivre comme prévu ».
Une Charte dont son article 7 limite les pouvoirs du Vice-président aux questions de défense et de sécurité. Ce qui signifie que c’est le Vice-président qui devrait donner son aval aux nominations aux postes de ministre de la Défense comme de la Sécurité intérieure. L’Homme fort de la Transition malienne et ses collègues du CNSP, avec ce nouveau coup de force contre le président et son PM, ont certainement tenu de protester contre leur violation de la Charte mais aussi contre leur gestion calamiteuse des Affaires publiques. Une mauvaise gestion dont Assimi Goïta est convaincue que c’est « la conséquence d’une consternation générale marquée par la persistance des grèves de l’Union Nationale des Travailleurs du Mali (UNTM), dont l’issue est finalement une grève illimitée. Cet état de fait constitue une véritable asphyxie de l’économie malienne et, partant, la garantie d’une instabilité aux conséquences incommensurables…. ».
Mais après tout, la légitimité du président de la Transition et de son PM ne dépendait-elle pas de celle des militaires de l’ « ex CNSP », acquises par les armes ? Dans l’affirmative, il n’y a donc pas de raison de s’offusquer lorsque des contradictions internes entre les promis et leurs obligés débouchent sur l’éviction des premiers. Tant une sagesse du Mali nous enseigne que: « La main qui met le mil dans le sac est la même main qui le retire du sac ». Si cette assertion est une vérité, alors le coup de force d’Assimi et ses collègues est bien justifié que logique. Ils ne pouvaient pas admettre que leurs promis, dont la légitimé est liée à la leur, puissent s’émanciper en niant la Charte qui les lie.
Il est en tout cas une évidence que notre pays, le Mali, est plongé depuis plusieurs mois dans une crise sociopolitique. Que depuis l’avènement de la Transition malienne en septembre 2020, sur des bases biaisées avec la légitimité des armes et non du peuple souverain, la présidence et le Gouvernement de Transition ne sont jamais parvenus de fournir un cadre de concertation crédible avec l’ensemble des partenaires sociopolitiques.
En conséquence, les problèmes sociopolitiques à la base de la chute du régime IBK ont subsisté. Le M5-RFP, à l’origine de cette chute mais mis à l’écart, était même prêt de retourner dans les rues pour manifester à nouveau. Sans compter qu’un bras de fer s’était désormais engagé entre le Gouvernement Ouane I et l’UNTM. Et tout laissait croire que le Gouvernement Ouane II, dont la composition, a servi, lundi 24 mai 2021, de prétexte au nouveau coup de force, serait certainement dans la même dynamique de politique de faux fuyant.
Donc osons espérer, avec le recul de huit mois, que l’ « ex junte du CNSP », les vrais détenteurs du pouvoir transitionnel, puisse se ressaisir et comprendre que le Mali, pour se sortir de sa crise multidimensionnelle, a plus que jamais besoin de refondation. Laquelle ne peut s’obtenir que dans la vraie inclusivité. Mais évidemment, avec des vrais acteurs sociopolitiques qui veulent que cette refondation ait réellement lieu. Sans faire l’apologie d’un coup d’Etat quelconque, nous souhaitons que cette nouvelle action des militaires puisse servir de déclic afin de permettre aux maliens de s’unir dans une même communauté de destin! Qu’Allah sauve le Mali !
Gaoussou Madani Traoré
Source : Le Pélican