L’idole du peuple est là ! » : les cris ont retenti dès que l’avion s’est posé à Abidjan. L’ex-président Laurent Gbagbo est arrivé dans la liesse en Côte d’Ivoire, avec des milliers de personnes dans les rues pour l’accueillir aux cris de « Gbagbo ou rien ».
L’avion touche le sol vers 16H30 (heure locale et GMT). « C’est une joie énorme. Le président Laurent Gbagbo vient d’atterrir ! », crie une femme en pagne à l’effigie de l’ex-président, acquitté en mars par la justice internationale qui le jugeait pour crimes contre l’humanité.
Seuls quelques centaines de notables, de membres de son parti et de proches ont pu accéder à la cour du pavillon présidentiel qui lui a été réservé.
À l’extérieur, la frustration était énorme chez ses jeunes partisans venus des quatre coins de la ville pour voir leur champion. Ils n’ont pas pu accéder aux abords de l’aéroport, et des gaz lacrymogènes ont été tirés pour les tenir éloignés.
Quelques minutes avant l’atterrissage de l’avion, les détonations s’entendent encore depuis l’aéroport.
Et puis une explosion de joie. Une fois l’avion sur le tarmac, les chefs traditionnels, assis depuis le matin sous des chapiteaux installés pour l’occasion, se lèvent, sourire aux lèvres. Des dizaines de personnes, portant tee-shirts et pagnes imprimés de portraits de Laurent Gbagbo, se précipitent devant les grilles qui donnent sur le tarmac.
On aperçoit Laurent Gbagbo furtivement descendre un escalier de l’aéroport, entouré de dizaines de fans. Des cris de joie retentissent. « C’est lui que Dieu a offert à la Côte d’Ivoire et au monde », lance un homme.
Tout le personnel de l’aéroport semble avoir arrêté de travailler. Eux aussi brandissent leur téléphone pour saisir ce moment qualifié d’historique dans le pays : voilà dix ans que Laurent Gbagbo, président jusqu’en 2011, n’a pas touché le sol de la Côte d’Ivoire.
Pour ses adversaires, il continue d’être celui qui a précipité le pays dans le chaos lors de la crise électorale de 2010-2011. Mais pour ses partisans, c’est une « idole », un sauveur.
Son gros 4×4 noir aux vitres teintées avance difficilement dans l’enceinte de l’aéroport, tant il y a des journalistes et de supporters. Le président Alassane Ouattara lui avait accordé le pavillon présidentiel, mais Laurent Gbagbo n’y met pas les pieds.
Probablement pour des raisons de sécurité, Laurent Gbagbo renonce à sortir de sa voiture.
La foule, la cohue
Il sort de l’aéroport et là, très vite, c’est la liesse. Sur des kilomètres et des kilomètres, son cortège traverse Abidjan du sud au nord. Des milliers de personnes courent sur le bord de la route pour le saluer. Les mêmes refrains sont chantés dans différents quartiers : « On va installer Gbagbo ! », « Respecter l’arrivée de Gbagbo ! », « Le véritable président est là ! ». « Akwaba (bienvenue) au président Laurent Gbagbo ! ». « Gbagbo, c’est la paix », entend-on aussi.
« Le prési (président, NDLR), il est là, il est arrivé », proclame une femme, survoltée.
« Depuis ce matin six heures, nous sommes là pour accueillir notre président, parce qu’il a été blanchi. Il a été innocenté par la CPI (Cour pénale internationale, NDLR) et comme il a été absent sur la terre ivoirienne pendant dix ans, nous ses militants, nous ses sympathisants, nous avons décidé de lui réserver un accueil chaleureux », complète un partisan.
L’excitation est totale. Souvent dans une ambiance assez bon enfant. Mais ici et là, des tensions éclatent, des gaz lacrymogènes sont tirés.
Laurent Gbagbo arrive en début de soirée à son ancien QG de campagne de la présidentielle de 2010, situé dans le nord d’Abidjan. Là encore, c’est la foule, la cohue. « On est arrivé ce matin pour fêter le woody », l’homme courageux, dit une femme dans un grand sourire.
Quand Laurent Gbagbo apparaît devant les militants, ils chantent en chœur : « Gbabgo Ayooo ». Et les premiers mots de l’ex-chef d’État tombent : « Je suis heureux de retrouver la Côte d’Ivoire et l’Afrique ». La fête a continué jusque tard dans la nuit dans les quartiers pro-Gbagbo.