L’attribution des logements sociaux a donné lieu à des scandales qui ont failli ternir l’image d’une Transition qui se dit intransigeante avec les pratiques de « l’ancien Mali ». Le PM, lui-même, est sorti faire son mea-culpa, suite à la dénonciation massive de l’attribution d’un logement, réservé aux pauvres, à sa fille qui pouvait certainement s’en passer. On lui accordera le bénéfice du doute, non en raison du fait que sa fille loge actuellement dans une « entrer-coucher », mais parce qu’il pourrait avoir ignoré les faits dénoncés au moment de leur commission. S’il est dédouané des faits, c’est donc la Commission d’attribution et ou le ministre en charge qui doivent répondre sur le banc des accusés. S’ils sont comptables de l’attribution du logement à l’insu du PM, on ne pourrait pour autant leur en tenir rigueur, le bénéficiaire demeurant un malien comme un autre.
Cependant, compte tenu des circonstances actuelles, la prudence aurait commandé de s’abstenir de poser un acte aussi suspect. Cette erreur d’appréciation ne pouvait passer inaperçue tant les problèmes de transparence dans le « Mali Koura » omnibulent les maliens. Ils ont connu toutes sortes de forfaitaire de la part de la classe dirigeante. Ils savent que quand on a à faire à une administration, il vaut mieux connaître quelqu’un qui connait quelqu’un. Ils savent que pour avoir un droit reconnu par la loi, il faut se lever très tôt et être prêt à encourager le fonctionnaire qui a perdu tout sentiment de redevabilité.
Par ailleurs dans ledit dossier, le doute était permis, certains bénéficiaires n’ayant à peine fait l’effort de demander l’attribution des logements qu’on leur a attribués. Nous y voyons une récurrence des pratiques anciennes, auxquelles nous étions certes habituées, mais que nous n’acceptions que par résignation.
Face à l’ampleur du scandale, son excellence Monsieur le président a cru bon d’annuler le décret et de dissoudre la Commission d’attribution. On lui sait gré de cette décision qui vient tout de même confirmer certaines inquiétudes. Désormais recomposée autrement, la nouvelle Commission aura-t-elle le recul nécessaire pour éviter un nouveau scandale ? Ensuite, ceux qui avaient des droits acquis pourraient-ils être dépossédés légalement et légitimement ?
Si l’annulation du décret produit ces effets de façon rétroactive, la question demeure toutefois. Enfin, les mêmes causes produisant les mêmes effets, une nouvelle Commission n’est pas la solution adéquate à ce problème de transparence. En effet, son impartialité sera toujours remise en cause si la sélection des méritants se fait à l’insu du public. Aussi, seul le recours au tirage au sort nous semble la meilleure alternative. Très généralement les maliens n’ont pas confiance en la transparence de nos procédures administratives parce qu’ils connaissent les mauvaises habitudes entretenues depuis plus de trente ans. La corruption, le trafic d’influence et la camaraderie sont des maux qui rongent le pays depuis fort longtemps. Donc quelle que soit la décision de la nouvelle Commission, un soupçon de partialité planera sur ce dossier.
Mais en revanche, si chaque citoyen candidat à l’acquisition était tiré au sort, sous la supervision des huissiers assermentés en direct sur la chaîne nationale, il y aurait moins de suspicion. Le procédé n’est pas parfait et il est certainement plus compliqué à mettre en œuvre (en raison du nombre de demandeurs) mais il a le mérite de faire taire les contestations. Par ailleurs, il permet d’offrir une chance à chaque candidat à l’acquisition. Les demandes, classées par catégories (type 1 au type 4) peuvent figurer sur des listes tirées au sort au fur et à mesure. Doivent être exclus, en dépit du fait qu’ils sont maliens, tous les proches de ministre et ou ceux des membres du CNT. C’est de la discrimination positive qui est justifiée par les circonstances du moment.
Dr DOUGOUNE Moussa