La santé et les droits sexuels et reproductifs (SDSR) relève de la santé publique et des droits humains. Aussi, chaque femme devrait avoir la liberté de tomber enceinte où pas. Sauf que les déficientes mentales n’ont pas toujours la latitude de faire ce choix. Abusées à cause de leur situation de vulnérabilité pour des raisons parfois occultes, de nombreuses déficientes mentales portent des grossesses sans en connaître l’auteur. Ce, en violation de leurs droits !
C’est un secret de polichinelle que dans nos sociétés les déficientes mentales sont régulièrement abusées. Pour des pratiques occultes ou par perversion, certains hommes profitent de leur vulnérabilité car selon certains préjugés : « avoir un rapport sexuel avec une handicapée mentale ouvre la voie à la félicité ; conjure le mauvais sort … ». Si par inadvertance, elles tombent enceintes, la plupart d’entre elles ne bénéficient d’aucun suivi médical durant la période de grossesse.
« La fille handicapée mentale tout comme la fille déficiente mentale, est très exposée. Elle constitue une proie facile pour certains hommes sans scrupule », indique Mme Diallo Assitan Traoré éducatrice spécialisée à l’Amaldem (association malienne de lutte contre les déficiences mentales). Mme Diallo témoigne de beaucoup de cas d’abus sexuels sur des filles déficientes mentales dont elle a eu la charge au cours de sa carrière. « C’est très courant et malheureusement on ne connait pas les auteurs de ces crimes. Car des fois, la fille n’arrive même pas à montrer son agresseur. Sinon pour les cas dont nous avons connaissance nous pouvons les traduire en justice. Tout récemment, une de nos pensionnaires a été abusée et séquestrée par un boutiquier du quartier pendant 3 jours. La fille avait été envoyée par sa mère, le boutiquier qui avait pris l’habitude de lui faire de petits gestes, a fini par abuser d’elle. Et comme la fille saignait, il avait pris peur et l’a séquestrée durant des jours. C’est seulement à la suite de recherche approfondie qu’on avait retrouvé la fille chez lui. Nous avons fini par porter plainte contre lui », témoigne l’éducatrice spécialisée de l’Amaldem très révoltée. Dont les ressentis sur l’abus des déficientes mentales sont partagés par beaucoup de citoyens.
« C’est vraiment triste que des personnes malintentionnées abusent de ces filles. Moi ce qui me révolte surtout c’est qu’il est difficile de les prendre la main dans le sac. On voit seulement ces pauvres filles portant des grossesses dont on ignore l’auteur », se lamente Ibrahim Touré un jeune cadre de la place. Des grossesses dont on ignore la provenance et sans suivi médical.
Pour le Dr Amadou Bocoum, gynécologue obstétricien, la grossesse doit être programmée chez les déficientes mentales. Et d’ajouter que leur grossesse a besoin d’être suivi de très près, pour éviter des malformations ou toute autre complication. De plus la déficiente mentale enceinte doit être surveillée pour la protéger, protéger la grossesse et le futur bébé à venir, soutient le Dr Bocoum. En effet, à l’instar de tout autre humain, la personne déficiente mentale a droit à satisfaire ses besoins sexuels et au besoin de procréer, mais par choix et non par suite d’abus sexuel.
La juriste, experte en études genre, Fatoumata H. Traoré Samaké affirme qu’au Mali, il existe des lois protégeant les personnes déficientes. En plus de la constitution malienne, il existe la loi n° 2818 du 12 juin 2018 relative aux droits des personnes vivant avec un handicap. Et l’article 26 de cette loi déclare que les femmes et les enfants vivant avec un handicap bénéficient de mesures spécifiques, ‘assistance et de protection contre l’exportation de toute nature. La santé et les droits sexuels et reproductifs sont des droits humains.
Khadydiatou SANOGO, Ce reportage est publié avec le soutien de JDH et FIT en partenariat avec WILDAF-Mali et la Coalition des OSC/PF
Source : Maliweb.net