A quelques jours du début du Ramadan, les inquiétudes se lisent sur le visage de bon nombre de maliens dû à la cherté des produits de première nécessité. Malgré l’assurance des plus hautes autorités pour un approvisionnement correct pendant cette période, la réalité est tout autre dans les marchés où les prix débordent.
C’est une réalité, faire nos courses, nous coûte plus cher depuis un certain temps. Le constat est là : le bidon de 5 Litres d’huile passe de 5000 F à 6000 voir 7500F, le lait en poudre de 25 Kilos passe de 11.000 F à 14.000 F, le sucre passe de 500F le Kilo à 600 F, la farine de 500F à 600 F le kilo, n’en parlons pas du prix du charbon et du gaz butane qui ont eux aussi augmenté. Ce sont là quelques produits consommés au quotidien par les populations surtout pendant le mois béni du Ramadan qui n’est qu’a deux pas. Cette année est doublement marquée par les lourdes sanctions infligées à notre pays par la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) appuyées par l’UEMOA depuis le 9 Janvier 2022 et par la flambée mondiale des prix alimentaires.
Face à cette situation qui peine les chefs de famille, les autorités avaient pris quelques mesures pour les rassurer. D’ailleurs, le Directeur Général du Commerce, de la Consommation et de la Concurrence (DGCC), Boukadary DOUMBIA s’est prêté pour la première fois à un exercice qui aurait dû être une habitude depuis le début de cette flambée des prix, il s’agit d’un café de presse tenu le vendredi 25 mars dernier au Grand Hôtel de Bamako au cours duquel il a expliqué le contexte difficile et les solutions préconisées.
Puisque « la Direction Générale du Commerce, de la Consommation et de la Concurrence a pour mission d’élaborer les éléments de la Politique nationale en matière de commerce, de consommation et de concurrence et d’assurer la coordination, le contrôle et la mise en œuvre de ladite politique….» selon l’Ordonnance N°2017-013/P-RM du 6 mars 2017, article 2, le Directeur DOUMBIA avait affirmé que « pour assurer l’approvisionnement du pays, il faut s’attaquer à deux problèmes : permettre la disponibilité du produit, ensuite rendre accessible le produit ». Ainsi, à travers une analyse, selon lui, il a été démontré que les sanctions n’ont eu finalement qu’un effet marginal sur les niveaux des prix et l’approvisionnement du pays a continué son cours normal. Les difficultés constatées, toujours selon lui, montrent à suffisance que la situation est plutôt exacerbée par des facteurs liés à la crise sécuritaire et sanitaire.
A cet effet, pour atténuer les effets de l’augmentation qui est « d’origine externe plus qu’interne », l’effort du Gouvernement en cours en matière de distribution portera sur un plan d’urgence de sécurité alimentaire. Ce plan permettra d’importer plus de 200.000 tonnes de riz, a indiqué le DGCC.
Après ce bel échange avec le Directeur DOUMBIA, nous avons décidé de faire un tour au marché pour comprendre le phénomène, en un mot, faire notre travail de vérification.
C’est ainsi qu’est né le concept « sosoribougou » « se débrouiller » qui venait à chaque fois qu’on interviewait une commerçante de la place.
Commençons par cette dame qui vent presque tout type de produits. Déjà à vue d’œil, on sentait la tristesse dans ses yeux dû à une mauvaise journée. Quant on lui demande pourquoi, elle a affirmé qu’elle a quitté chez son fournisseur hier et que les produits coutent de plus en plus cher. « Aujourd’hui, j’ai essayé de voir ce que je vais arrêter de vendre et les prix que je dois revoir. Les clientes ne font que crier seulement, j’ai même honte de donner le prix de certains de mes produits tellement que c’est exorbitant. Nous aussi, on cherche les 50F,100F ou 200 F sur les produits, si à la base c’est cher, on ne peut qu’augmenter pour ne pas perdre. Les clientes pensent que nous sommes en train de se faire une fortune sur leur dos alors que cela ne dépend pas de nous. Le marché est devenu sosoribougou maintenant ».
Effectivement, elle n’était pas la seule à vivre cette réalité, une autre vendeuse de savon et de henné, cette fois-ci a déploré le manque de certains produits connus sur le marché et l’augmentation de ceux qui n’étaient pas prisés. D’ailleurs, il se peut bien que mes dames vous aurez à payer un peu plus cher vos tatouages traditionnels cette année si le prix d’un kilo de henné qui était autre fois à 400 F, reste à 750 F CFA. « On vient ici juste pour ne pas rester à la maison. Sinon, il n’y a rien à gagner. Les grossistes nous font fuir nos clientes puisque qu’on est obligé d’augmenter le prix vu qu’on achète les produits chers chez eux ».
Du côté des grossistes nous avons pris un râteau qu’on n’est pas prêt d’oublier, c’est aussi ça la réalité du terrain. Bref certains grossistes, nous ont fait clairement comprendre qu’il y a des difficultés mais lesquelles, difficile pour eux d’y répondre. Tout porte à croire que certains d’entre eux n’ont pas d’arguments solides pour défendre la hausse des prix dans leurs magasins, ce qui sous-entend qu’ils sont en train de profiter de la situation exceptionnelle de notre pays sous embargo pour augmenter les prix.
Ce que pensent les consommateurs
Cette année, certains chefs de famille ont trouvé le slogan idéal pour passer cette période. Il s’agit de « Ramadan sans Pression », ils nous expliquent.
« On ne va pas se fatiguer cette année, la galère n’est plus cachée. Le matin on prend de la bouillie, à la coupure on mange du riz. Les Kinkélibas, jus, les fruits, les soupes etc… c’est autres choses. En tout cas, ils ne seront pas au menu chez moi » dixit Moussa Fané.
Aussi M.Guindo, chef de famille, a affirmé que rien ne changera dans ses habitudes du moment où sa famille ne mange que deux fois par jour. « On ne mange que deux fois ici. On va juste manger pour la coupure, le matin chacun se débrouille ».
Pour finir, cette mère de famille se dit prête à « affronter » le mois de Ramadan, même si elle n’a rien prévu. « Face à tous ces problèmes, la cherté de la vie, il ne faut pas se tracasser avec les préparatifs du ramadan. La Période va passer dans peu de temps, on va toujours rester dans la même situation. Donc pas de pression ».
Ainsi dit, nous ne pouvons que vous souhaiter de passer un bon mois de ramadan, tout en espérant que la DGCC continuera ses contrôles au niveau des marchés et en entendant les 200.000 tonnes de riz. A vous de voir si vous voulez le passer avec ou sans « pression ».
AFANOU KADIA DOUMBIA
Source: Malijet