Abdoulaye Diop, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, absent lors du vote du nouveau mandat de la Minusma au Conseil de sécurité de l’ONU, s’est réjoui de l’abstention des deux pays amis. D’après lui, c’est une première depuis 11 ans.
«C’est vrai que la résolution a été adoptée par 13 voix contre 2 abstentions, notamment la Chine et la Russie. Depuis la mise en place de la Minusma par la résolution 2100 en 2013 à aujourd’hui, la Russie et la Chine se sont toujours joints aux autres Etats membres pour adopter la résolution par consensus. C’est la première fois en 11 ans que ces deux pays s’abstiennent », s’est réjoui Abdoulaye Diop.
Pour le chef de la diplomatie malienne, ces deux abstentions constituent une victoire diplomatique pour le Mali qui n’est pas encore membre du Conseil de sécurité de l’ONU. Et ils travaillent pour mobiliser les membres autour des préoccupations du pays, et il estime que les préoccupations essentielles ont été prises en compte.
Donc, pour lui, s’abstenir est un message. Ça veut dire pour ces deux pays amis que l’argument de l’Etat malien, c’est-à-dire que mener des enquêtes indépendantes sans son accord viole sa souveraineté, tient. D’après lui, cela signifie aussi que ces pays comprennent qu’il y a beaucoup de manœuvres politiques qui sont derrière cela. « Même si le Gabon, un pays africain, a voté pour la résolution, il a fait une déclaration pour dire que cette résolution viole la souveraineté de notre pays», a-t-il dit.
A en croire le ministre Diop, la résolution est adoptée avec la prise en compte des conditions fondamentales émises par le Mali. Il s’agit du soutien aérien à Barkhane, de la non-association du Mali au G5 Sahel, et la question des droits de l’Homme qui a été adoptée avec la prise en compte de la voix du Mali.
A ses dires, le Mali ne s’est pas opposé au renouvellement du mandat de la Minusma, mais il avait émis des resserves le 13 juin. Ces conditions étaient l’opposition ferme au recours à Barkhane pour un appui aérien français à la Minusma pour exécuter son mandat. Cette première condition, d’après lui, les membres du conseil l’ont suivie et la question a été enlevée de la table. La deuxième, c’était de ne pas associer le nom du pays au G5 Sahel. Et la troisième grande préoccupation du Mali, pour lui, c’était la question des droits de l’Homme, où ils constatent un certain nombre de pays qui s’abritaient derrière cette question pour pouvoir créer de problème au Mali. À ses dires, c’est ce qu’ils ont appelé la politisation, l’instrumentalisation des droits de l’Homme. « C’est inacceptable que des ressortissants de certains pays, présents au sein de la Minusma, utilisent cette mission à d’autres fins. Nous l’avons dénoncé », a-t-il insisté.
Cependant, d’après le ministre, le Mali n’est pas opposé à la question des droits l’Homme, mais à la demande spécifique de dire qu’il faut que la Minusma fasse des enquêtes. «Nous trouvons que ce sont des prérogatives régaliennes de l’Etat malien qui doit faire des enquêtes nécessaires, qui doit promouvoir les droits de l’Homme sur son territoire. La mission des Nations Unies ne peut-être que l’accompagner », a-t-il précisé.
Avant d’éclaircir: « Notre objection sur la question des droits de l’Homme était de dire non pour donner une liberté totale de mouvement à la Minusma de mener des enquêtes là où elle veut, quand elle veut sans l’accord préalable de l’Etat malien ».
Sur cette question spécifique des droits de l’Homme, il dira que le Conseil de sécurité est divisé parce que le pays peut compter désormais sur deux membres permanents qui se sont alignés de son côté. Y compris beaucoup de membres, même s’ils n’ont pas voté contre, qui estiment que l’argument du Mali par rapport à cette question a du poids.
Donc, dire que la Minusma va enquêter sur le territoire malien sans l’autorisation des autorités est impossible, selon les explications du ministre. D’après lui, ça n’arrivera pas. Pour les autorités maliennes, ce qui est prévu, c’est que la Minusma doit appuyer le Mali pour pouvoir avoir l’accès à ces sites ou mener des enquêtes. « Notre position est très claire. C’est ce que l’ambassadeur Konfourou a indiqué dans sa déclaration. Que le Mali n’appliquera pas cette disposition et que si la Minusma doit faire quoi que ce soit en matière d’enquêtes sur les droits de l’Homme, elle doit s’en référer aux autorités compétentes maliennes. C’est dans ce sens que nous allons continuer de travailler avec la Mission », a-t-il expliqué.
«Sur cette question spécifique, la souveraineté et les prérogatives régaliennes de l’Etat malien doivent être respectées. Nous n’accepterons pas qu’il y ait des malices derrière la question des droits de l’Homme pour pouvoir atteindre d’autres objectifs pour déstabiliser l’Etat malien», a-t-il insisté.
Moussa Sékou Diaby
Source : Le Tjikan