Il ne sera pas une surprise d’attendre à la fermeture des bureaux de vote le 18 juin que le oui l’a massivement remporté. Ils sont tous mobilisés pour montrer aux militaires au pouvoir qu’ils sont les seuls maîtres à bord de la scène politique. Alors que la réalité est tout autre.
De conférences en conférences, des associations, mouvements politiques et des partis politiques, soutiens déguisés de la transition, rivalisent d’ardeur sur le terrain de la vulgarisation du projet de la nouvelle Constitution pour leur survie et des intérêts cachés.
Appelés aux urnes, le 18 juin, les électeurs maliens auront le choix entre le oui pour une nouvelle Constitution et le non pour son rejet. Avant ce jour de vérité, beaucoup d’eau aura coulé sous le pont. Subitement, la période consacrée à la vulgarisation du projet de la nouvelle Constitution s’est vite transformée en une véritable campagne dont l’ouverture est prévue pour le 2 juin. Au lieu d’expliquer le contenu du projet de Constitution pour mieux édifier le citoyen sur ce que sera le Mali de demain si le oui l’emporte, on préfère entretenir l’assistance sur le bilan de la transition. Cette confusion est sciemment entretenue par les soutiens de la transition pour qu’avec l’ouverture de la campagne proprement dite qu’ils économisent sur les fonds débloqués en organisant moins d’activités durant cette période.
Les habitudes ont la vie dure, dit-on. À chaque changement de régime au Mali, on s’attend à un changement de comportement de la part du citoyen malien pour un nouveau départ. Du 19 novembre 1968 au 20 août 2020, en passant par le 26 mars 1991, des slogans ont été savamment élaborés pour accompagner l’enthousiasme des femmes et des hommes qui croyaient dur comme fer aux paroles mielleuses des princes du jour. Mais en fait, il ne s’agissait que d’une duperie des nouveaux hommes pour être en osmose avec le peuple, juste le temps de mieux s’implanter pour bien profiter des richesses nationales. Dans ce dessein funeste, le Comité militaire de libération nationale (CMLN, 1968) met en avant la ‘‘liberté’’. La suite est connue de tous. Les tombeurs du général Moussa Traoré en 1991 parlent de ‘‘Kokadjè’’. On le sait, ils ont été les vrais bourreaux du peuple malien durant ses trente dernières années. La transition actuelle crée le slogan ‘‘Mali Koura’’. Un concept sans contenu qui plonge les masses populaires dans l’incertitude. Et malgré tout cela, les Maliens n’arrivent pas à changer de comportement vis-à-vis de leurs dirigeants dont la grande majorité ne vise que leurs propres intérêts. Malheureusement, aucun de ces slogans n’a porté les fruits escomptés.
Cet accompagnement aveugle aura de beaux jours devant lui. Le Malien change au gré de ses intérêts personnels. Depuis l’annonce par le gouvernement d’une campagne de vulgarisation du projet de Constitution, le pays vit au rythme d’une véritable campagne électorale. Ils sont tous mobilisés pour montrer aux militaires au pouvoir qu’ils sont les seuls maîtres à bord de la scène politique. Alors que la réalité est tout autre. De conférences en conférences, des associations, mouvements politiques et des partis politiques, soutiens déguisés de la transition, rivalisent d’ardeur sur le terrain de la vulgarisation du projet de la nouvelle Constitution pour leur survie et des intérêts cachés. Chacun veut montrer aux hommes forts du pouvoir qu’il est le premier soutien et attend le retour de l’ascenseur. Une véritable hypocrisie en fond de toile.
Des hommes et des femmes qui ont combattu la révision constitutionnelle du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK, paix à son âme) sont au-devant de la scène pour magnifier le projet de Constitution de la transition dont beaucoup de parties sont des reprises de la copie du président défunt (Sénat, pouvoir renforcé du président de la République…). Ils ne le font pas par conviction, mais pour se sauver de poursuites judiciaires.
Quant aux responsables des associations et mouvements politiques, ils considèrent le référendum comme un test de leur implantation dans l’arène politique. Beaucoup d’entre eux pensent que le référendum sonnera le glas des formations politiques décriées et tenues pour responsables de la situation actuelle du pays. Pour ce dirigeant, c’est le début du changement générationnel de la classe politique qui s’est rendue coupable de l’affaiblissement de l’État au profit de ses intérêts. Cet autre déclare qu’ils bénéficient du soutien de la transition pour renverser la tendance aux élections générales prévues pour 2024.
Aussi, serait-il envisagé après le référendum une nouvelle équipe gouvernementale pour réconcilier les Maliens avec eux-mêmes. Dans les coulisses, beaucoup pensent être appelés dans ce gouvernement pour services rendus à la transition. D’autres lorgneraient les cabinets ministériels, les ambassades et autres structures dans lesquelles ils peuvent trouver un point de chute.
Tous ces intérêts se cachent derrière le oui au détriment de l’intérêt général. Dommage pour notre pays que des gens sans conviction deviennent les porte- étendards d’un changement.
Yoro SOW