Comme annoncé, le vendredi dernier a vraiment été un jour de colère dans la
capitale malienne, Bamako. Après la grande prière, des milliers de Maliens
ont répondu présent à l’appel à manifestation de l’imam Mahmoud Dicko et
du Chérif de Nioro. Une mobilisation historique. Difficile de faire un pas sur la
Place de l’indépendance, où une foule compacte a réclamé le départ des
forces internationales, la démission du gouvernement, la fin des terreries au
centre et de la grève des enseignants du secondaire.
L’initiateur principal de la manifestation, l’iman Mahmoud Dicko, a tenu un discours
responsable. Il a appelé non seulement à la cessation immédiate des
nombreuses tueries dans la 5ème région administrative du pays, Mopti, mais
également les deux communautés (Dogons et Peulhs) à la retenue et à ne
pas tomber dans le piège d’une guerre ethnique qu’on veut imposer et
instrumentaliser au Mali.
« Mes frères Peulhs, la vengeance n’est pas la solution; mes frères Dogons, il
faut déposer les armes. Qu’un Dogon sache que s’il tue un Peulh, il s’est tué
lui-même. Qu’un Peul sache que s’il tue un Dogon, c’est un Peulh qu’il a tué.
Je suis un Dicko, mais je suis aussi un dogon…», a déclaré le président du
Haut conseil islamique du Mali (HCIM), l’imam Mahmoud Dicko, fortement
impliqué dans des efforts de médiation. Avant de mettre en garde la France,
la Minusma, Barkhane… «Que les organisations internationales sachent que le
Mali ne leur appartient pas…le Mali appartient aux Maliens».
Cette marche historique qui a battu tous les records de mobilisation au Mali
doit interpeller les dirigeants. Ces derniers doivent prendre des dispositions
profondes rapidement pour répondre au cri de détresse du peuple. Le
président de la République IBK ne doit pas faire la sourde oreille.
Je demande au président de la République d’écouter son peuple avant qu’il ne
soit trop tard. La mobilisation sans précédent des Maliens dans leur diversité
prouve à suffisance que le pays va tout droit au mur. Cette marche vous
interpelle sur la situation chaotique du pays dans plusieurs secteurs clés. Il
s’agit notamment de la sécurité, de l’éducation, de la santé et, plus grave, du
risque de conflit inter communautaire au centre. A travers cette manif
d’envergure, le peuple qui vous a accordé sa confiance veut vous dire ceci: «
stop, trop c’est trop !», d’autant plus que vous ne lui n’offrez aucune
perspective jusque-là. Dans une démocratie, un chef de l’État doit écouter
son peuple. Un pays se gère sur la base des aspirations profondes du peuple.
C’est pourquoi je vous demande et vous implore d’écouter votre peuple avant
qu’il ne soit trop tard.
Vous devez tirer les enseignements de cette forte mobilisation du peuple. En
tout cas, vu la situation que traverse notre pays, nous devons tous nous
donner la main pour le sauver, dans le respect de ses institutions sinon nous
irons à la dérive ! Le Mali n’appartient à personne seule ; c’est notre héritage
commun. Alors, l’histoire nous retiendra responsable de sa destruction si
nous ne nous ressaisissons pas. Il est encore temps de nous mobiliser comme
un seul homme pour sauver la patrie en danger.
Aliou Touré.