Application intégrale de l’Accord pour la paix et la réconciliation : Bah N’Daw cède face à la pression de la France et de la CMA

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Bah N'daw et Emmanuel Macron
Bah N'daw et Emmanuel Macron

En dépit des fortes recommandations du Dialogue national inclusif (DNI), qui préconisent la relecture de certaines dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation, les autorités de la Transition sont dans le schéma d’une application intégrale dudit accord. Que se passe-t-il ?

 A quoi sert d’organiser des foras inter-maliens et ne pas appliquer ses conclusions ?

En décembre 2019, le Dialogue national inclusif a réuni toutes les couches de la société malienne et fait des recommandations. Il s’agit entre autres, de l’ouverture de négociations avec les djihadistes Amadou Koufa et Iyad Ag Ghali et autres pour « ramener la paix au Mali » ; la relecture de certaines dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale, issu du processus d’Alger.

Les participants avaient aussi souhaité le déploiement au plus vite des forces de défense et de sécurité reconstituées sur l’ensemble du territoire national. S’y ajoute la relecture de la Charte des partis politiques, pour y intégrer des critères mieux adaptés à la création de partis, et de la loi électorale.

Conscient de la pertinence des recommandations du DNI et pour avoir eu vent des mouvements de contestations, l’ancien chef de l’Etat, Ibrahim Boubacar Keïta, a accepté la relecture des textes de l’Accord contre l’avis des ex-mouvements rebelles.

Une année après les recommandations du DNI, qu’en est-il de  son application ? Des 4 grandes résolutions du DNI, ce sont deux qui sont en cours d’application. Il s’agit du redéploiement des forces de défense et de sécurité reconstituées, la relecture de la Charte des partis politiques. Si le premier a connu un début d’exécution, il a buté sur des problèmes dus à plusieurs incompréhensions entre les autorités maliennes de l’époque (régime d’IBK) et les ex-mouvements armés. Quant au second point, il est en cours d’exécution.

Là où les choses semblent se heurter à des obstacles de taille, c’est la relecture de « certaines dispositions » de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale, ainsi que l’ouverture de négociations avec les djihadistes d’Amadou Koufa et Iyad Ag Ghali.

Quelles explications données à cet état de fait ? Si pour l’heure, aucune information officielle n’a filtré du côté des autorités, toujours est-il que les discours prononcés par le président de la Transition, démontrent à suffisance que les autorités maliennes sont dans la dynamique de ne pas tenir compte de ce qu’à décider les Maliens lors du DNI en tout cas sur le point concernant la relecture des dispositions de l’Accord.

Le premier communiqué du CNSP (aujourd’hui dissout) comme pour faire plaisir aux mouvements armés et avoir l’accompagnement de la France, a fait mention de la volonté des nouvelles autorités à appliquer « intégralement » l’Accord pour la paix et la réconciliation.

Et du coup, Bah  N’Daw, désigné par les putschistes ne pouvait que se mettre dans le même schéma de ceux-là qui l’ont nommé au poste de président de la Transition.  Depuis, il  ne manque pas d’occasion pour dire avec vaillance que le gouvernement du Mali ne ménagera aucun effort pour l’application intégrale de l’Accord. Au meme moment, le Premier ministre Moctar Ouane parle d’application des recommandations du Dialogue national inclusif (DNI). Or, il s’avère qu’il est difficile voir impossible d’appliquer le DNI et vouloir aller à une application intégrale de l’Accord d’Alger, c’est deux choses contraire.

 

Quid de l’ouverture des négociations avec les djihadistes

Sans être dans les secrets de Dieu, nous ignorons les raisons des autorités de la Transition à agir à contre-courant des recommandations du DNI. Quelle est la visée de Bah  N’Daw ? A-t-il eu une pression de la France  et par ricochet de la CMA qui avait commencé à rougir ses yeux ?

La dernière interrogation est la plus plausible. On se rappelle que sous le régime défunt, l’annonce de la relecture des dispositions de l’Accord a été mal accueillie par Emmanuel Macron. Le président français avait trouvé inopportune que le Mali ait décidé de revenir sur un Accord qu’il a conclu solennellement. Autre explication, les autorités de la Transition en manquent de vrais soutiens au niveau national ne veulent pas avoir sur leur dos les ex-mouvements rebelles, mais également la « communauté internationale ».

Sur ce point, on se souvient que depuis qu’IBK a accepté de se ranger du côté du peuple, les relations entre lui et Macron avaient commencé à prendre un coup glacial. C’est pourquoi, dès le lendemain du coup d’Etat, et tirant les leçons du passé, le président Bah N’Daw et les militaires ont opté pour l’alliance Macron-CMA contre le peuple malien.

Cette volonté ferme d’aller à l’encontre de la volonté des Maliens aura quelle résonnance du côté de la société civile, des formations politiques et autres ? Les jours à venir nous en diront plus, étant donné que certaines associations, partis politiques  et leaders de jeunes ont sonné le glas de la résistance contre ce qu’ils qualifient la « trahison » des Maliens par le pouvoir.

Aussi sur l’ouverture de négociations avec les djihadistes Amadou Koufa et Iyad Ag Ghali, depuis que le Premier ministre Moctar Ouane, fraichement nommé, a rappelé au ministre des Affaires étrangères de la France en visite au Mali la volonté de l’Etat malien d’ouvrir des négociations avec les djihadistes, les choses se sont arrêtées à ce niveau.  Ce jour M. Ouane avait été applaudi par ses compatriotes  pour ses propos qu’on peut résumer en substance : « l’ouverture des discussions avec les djihadistes n’est ni plus ni moins qu’une des recommandations du DNI auxquelles les Maliens tiennent fermement ».

Sur ce point également, la France est en train d’exercer des pressions énormes sur les autorités maliennes afin qu’elles abandonnent leur projet. Cette volonté malienne à discuter avec les mouvements terroristes a semble bien payer, puisque la force française Barkhane a changé de fusils d’épaules sur le terrain. Les opérations ne sont plus faites en singleton. Les patrouilles et autres missions sont faites de concert avec l’armée malienne qui monte en puissance. Les autorités ne se sont pas toujours décidées s’il faut engager oui ou non des discussions avec les djihadistes.

Le moins que l’on puisse dire, cette façon unilatérale des autorités à engager les Maliens dans un processus de paix, n’aura surement pas d’impacte à hauteur de souhait si tous les fils et filles du pays ne regardent pas dans la même direction.

Djibril Diallo

Source : Arc en Ciel

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