Assimi Goïta dans l’œil de la françafrique : Morceaux choisis d’une prédation globale en Afrique

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Assimi Goita
Assimi Goita, le président de la transition

La françafrique a toujours prospéré en opposant des africains fantoches à ceux qui recherchent le bonheur de leurs peuples d’Afrique : Moïse Tshombé et Mobutu Sesse Seko contre Patrice Emery Lumumba au Congo, ce dernier a été arrêté et confié à son ennemi katangais Tshombé qui l’a tué, découpé et trempé dans l’acide pour que rien de lui ne puisse physiquement subsister sur cette terre ; Eyadema contre Sylvanus Olympio assassiné au Togo à cause du franc cfa; Odumegwu Ojukwu contre Yakubu Gowon au Nigeria à cause du pétrole ; Blaise Compaoré contre Thomas Sankara à cause de son panafricanisme; Alassane Dramane Ouattara contre Laurent Gbagbo dont le crime a été de vouloir donner une réalité à l’indépendance de son pays la Côte d’Ivoire. Le plus grotesque a été l’opposition David Dako- Bokassa, plusieurs coups d’État décidés de Paris.

Qu’est-ce qui sous-tend les admonestations de certaines personnes, hors du Mali, contre Assimi Goïta et les autres officiers de la Transition ?

Comment expliquer que le monde vive grâce aux ressources tirées du sous-sol africain et que ce continent reste à la traine de l’économie mondiale ?

Plusieurs causes peuvent être mises sur la table dans les deux cas qui, à priori, semblent n’avoir aucun lien. Pourtant…

L’analyse du système de la françafrique permet d’identifier au moins deux tropismes. Il est entendu que le tropisme renvoie à cette force inconsciente et irrésistible amenant une personne à adopter un comportement déterminé. Ce mouvement reflexe, donc ce tropisme, devenu concept, demeure ce qui préside aux actions, aux comportements des autorités françaises en Afrique et commande les réflexes de soumission des autorités de l’Afrique francophone aux oukases de Paris. Ne pas s’y soumettre revient à s’exposer à la mort ou à des campagnes de déstabilisation massives avec les médias globaux appelés média mainstream. Les symboles récents sont les cas de Thomas Sankara au Burkina Faso et Laurent Koudou Gbagbo. Et dans les deux cas, comme toujours, les donneurs d’ordre avaient choisi trois exécutants africains. Blaise Compaoré pour Thomas Sankara et toujours le même Blaise pour L. K. Gbagbo auquel on a adjoint Fatou Bensouda , la reine des preuves fabriquées de la CPI et Alassane Dramane Ouattara, le maestro des tripatouillages électoraux et coups tordus.

De ce point de vue la françafrique est une vraie mafia, il n’y a pas de codes écrits, la seule règle est l’imposition de diktats politique et économique aux pays subsahariens francophones.

Assimi Goïta et ses compagnons, en faisant chuter le régime IBK ont grippé cette machine bien huilée au Mali. Ils sonnent le début d’une rupture avec le paternalisme et le larbinisme rampant des Félix Houphouët Boigny, Etienne Eyadema entre autres.

C’est ainsi depuis la création de la 5ème république en France, le 28 septembre 1958 et sa promulgation le 04 octobre suivant. Charles De Gaulle, Jacques Foccart et d’autres comme le réseau Elf-Aquitaine, ont mis en place un système permettant la tenue en laisse des dirigeants francophones d’Afrique. On leur impose ou ils s’appliquent volontairement un voyage, à l’Élysée, au quai d’Orsay pour des séances d’allégeance ressemblant à s’y méprendre au rituel moyenâgeux qu’est la cérémonie de l’hommage durant laquelle “le chevalier” ou petit seigneur africain est adoubé par le suzerain (président) du moment. Et tout heureux de cet adoubement, il revient dans son pays pour appliquer le service de l’ost ordonné par son maître : il défend les intérêts étrangers contre son peuple. Pour ce faire, il peut s’en donner à cœur joie tant qu’il reste un fidèle serviteur tel ce Blaise Compaoré qui, le 05 juin 2013 a reçu cet hommage de Élisabeth Guigou alors présidente socialiste de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée Nationale française à la suite de son audition : « Monsieur le Président de la République, merci. Ces applaudissements, qui ne sont pas systématiques dans notre Commission, témoignent de notre gratitude pour le rôle que vous jouez et pour la vision que vous avez du développement de votre pays et du continent africain ».

Voilà, on remercie la bête de somme de la françafrique. “Gratitude” pour les sulfureuses besognes accomplies dont l’assassinat de son “frère” Thomas Sankara et bien d’autres crimes commis pour complaire à ses suzerains. Blaise Compaoré, pour rappel, est impliqué dans l’assassinat de Thomas Sankara ; dans les trafics de diamant du Libéria et de l’Angola avec l’UNITA ; trafic de cacao de la Côte d’Ivoire durant la guerre civile dont il est en partie responsable ; l’accueil des membres du MNLA etc.

Soit dit en passant, le 26 septembre 2013, Charles Taylor a été condamné à 50 ans de prison par le tribunal spécial pour la Sierra Léone. On lui reprocha crime de guerre et crime contre l’humanité, Blaise Compaoré aurait dû comparaitre à ses côtés parce qu’il vendait les diamants de la guerre selon plusieurs sources. Voilà ce qu’en dit Francis Kpatindé sur RFI le 01 novembre 2014: ” Les gens du RUF (revolutionary united front, rebelles de la Sierra Léone) ont été entraînés à Pô (Burkina Faso), là où l’armée, les parachutistes s’entraînent. Le rapport des Nations unies dont vous parlez a été établi et écrit par des chercheurs et a fait beaucoup de bruit depuis sa publication. On peut s’étonner, d’ailleurs, dans ces conditions que, lorsque Charles Taylor a été jugé par le Tribunal spécial pour la Sierra Leone à La Haye, Blaise Compaoré n’ait pas été appelé, même comme témoin”.

C’est cet homme que Français, Étasuniens et Anglais soutenaient en Afrique. Dans le camp français la gauche et la droite de l’échiquier politique sont toujours d’accord quand il faut piller l’Afrique. Seuls quelques communistes et membres de la France insoumise osent parfois mettre le pied dans le plat.

Et voilà ce qui est tacitement demandé à Assimi Goïta et ses compagnons : qu’ils baissent pavillon et se rangent dans le camp des renégats ; qu’ils jettent le peuple malien par-dessus bord au nom des intérêts néocoloniaux occidentaux.

Seule la mobilisation du peuple malien derrière ses dirigeants peut les faire reculer, eux et leurs porte-flingues de la CEDEAO, de l’UA, de la Francophonie. L’Union Africaine et la CEDEAO sont largement financées par des capitaux extra-africains. Alors ils aboient à la commande. On y reviendra.

Des siècles de miasmes intellectuels sur la hiérarchie des groupes humains sont à l’origine de ce tropisme de domination ou d’élimination souvent physique de ceux qui résistent. Écoutez Carl Siger (Charles Henri Eugène Régismanset (1873-1945)) que cite Aimé Césaire dans “le discours sur le colonialisme » : « Les pays neufs sont un vaste champ ouvert aux activités individuelles, violentes, qui, dans les métropoles, se heurteraient à certains préjugés, à une conception sage et réglée de la vie, et qui, aux colonies, peuvent se développer plus librement et mieux affirmer, par suite, leur valeur. Ainsi, les colonies peuvent, à un certain point, servir de soupape de sûreté à la société moderne. Cette utilité serait-elle la seule, elle est immense ». Cette lecture nous plonge dans la Françafrique telle qu’appliquée par Charles De Gaulle et ses successeurs.

S’en était mêlé le Révérend Père Muller avec fracas : « que l’humanité ne doit pas, ne peut pas souffrir que l’incapacité, l’incurie, la paresse des peuples sauvages laissent indéfiniment sans emploi les richesses que Dieu leur a confiées avec mission de les faire servir au bien de tous ». Il est inutile de les citer entièrement, mais des passages du livre, “La Réforme intellectuelle et morale” d’Ernest Renan donnent la nausée, pourtant l’écrit est toujours présenté comme “un texte capital de notre patrimoine intellectuel.” Lisez : « La régénération des races inférieures ou abâtardies par les races supérieures est dans l’ordre providentiel de l’humanité. L’homme du peuple est presque toujours, chez nous, un noble déclassé, sa lourde main est bien mieux faite pour manier l’épée que l’outil servile. Plutôt que de travailler, il choisit de se battre, c’est-à-dire qu’il revient à son premier état. Regere imperio populos, voilà notre vocation. Versez cette dévorante activité sur des pays qui, comme la Chine, appellent la conquête étrangère. Des aventuriers qui troublent la société européenne, faites un ver sacrum, un essaim comme ceux des Francs, des Lombards, des Normands, chacun sera dans son rôle. La nature a fait une race d’ouvriers, c’est la race chinoise, d’une dextérité de main merveilleuse sans presque aucun sentiment d’honneur ; gouvernez-la avec justice, en prélevant d’elle, pour le bienfait d’un tel gouvernement, un ample douaire au profit de la race conquérante, elle sera satisfaite ; une race de travailleurs de la terre, c’est le nègre ; soyez pour lui bon et humain, et tout sera dans l’ordre ; une race de maîtres et de soldats, c’est la race européenne. Réduisez cette noble race à travailler dans l’ergastule comme des nègres et des Chinois, elle se révolte. Tout révolté est, chez nous, plus ou moins, un soldat qui a manqué sa vocation, un être fait pour la vie héroïque, et que vous appliquez à une besogne contraire à sa race, mauvais ouvrier, trop bon soldat. Or, la vie qui révolte nos travailleurs rendrait heureux un Chinois, un fellah, êtres qui ne sont nullement militaires. Que chacun fasse ce pour quoi il est fait, et tout ira bien ».

Ce livre a été écrit au moment de la défaite française de 1870-1871 contre l’Allemagne et la perte de l’Alsace-Lorraine.

Des idées d’un autre temps, je vous l’accorde. Des idées révolues dans le temps, je vous dis non. Certains hommes politiques actuels en sont imbibés, ils biberonnent ces inepties intellectuelles qui sont les postulats de départ permettant de justifier leurs jactances en Afrique et au Mali. Pour ces gens l’Afrique subsaharienne est une réserve, une forêt dans laquelle ils viennent prélever ce qu’ils veulent et si l’Africain, qui pour eux est un gibier, s’y oppose on le flingue ou on le fait occire par les mains d’un de ses frères.

Encore aujourd’hui, les basses manœuvres sont confiées à des locaux comme cela avait été le cas avec le “beau Blaise”. A Bamako certains de ces sous-fifres ont commencé, ils vitupèrent et tonitruent dans certains médias. Certains jouent volontairement contre le peuple malien en attaquant ces jeunes officiers auxquels je ne donne pas de blanc-seing mais qui ont donné des gages de leur engagement pour le Mali. La nomination de Monsieur Mamoudou Kassogué au ministère de la justice en est une preuve tout comme le lancement d’un mandat d’arrêt international contre Karim Keïta. D’autres se comportent en nigauds, en naloma kolomba qui hurlent contre tout sans rien comprendre aux dessous des cartes, des esprits en régression à enfermer dans la cage de sambadanse.

La françafrique a toujours prospéré en opposant des africains fantoches à ceux qui recherchent le bonheur de leurs peuples d’Afrique : Moïse Tshombé et Mobutu Sesse Seko contre Patrice Emery Lumumba au Congo, ce dernier a été arrêté et confié à son ennemi katangais Tshombé qui l’a tué, découpé et trempé dans l’acide pour que rien de lui ne puisse physiquement subsister sur cette terre ; Eyadema contre Sylvanus Olympio assassiné au Togo à cause du franc cfa; Odumegwu Ojukwu contre Yakubu Gowon au Nigeria à cause du pétrole ; Blaise Compaoré contre Thomas Sankara à cause de son panafricanisme; Alassane Dramane Ouattara contre Laurent Gbagbo dont le crime a été de vouloir donner une réalité à l’indépendance de son pays la Côte d’Ivoire. Le plus grotesque a été l’opposition David Dako- Bokassa, plusieurs coups d’État décidés de Paris.

Avant de revenir aux jeunes colonels, je voudrais ajouter une chose essentielle. Elle est que même les autorités françaises ayant de l’estime pour les peuples d’Afrique francophone peuvent difficilement nous aider. Pourquoi ?

Parce que nous avons accepté d’aliéner un pan entier de nos souverainetés à travers le franc cfa. Un pays qui ne frappe pas sa monnaie est à la merci de celui que le fait. Un pays qui arrime sa monnaie à une autre se pose en vassal, comme le cfa à l’euro.

Nous refusons de voir qu’après l’accaparement de la souveraineté monétaire nous sommes en train de passer au gel, voire la remise en cause de nos souverainetés territoriales. Le cas malien est le signe avant-coureur de cette entreprise. La force « Takuba » en est le signe annonciateur. Elle fait appel aux forces de l’OTAN sans même consulter les autorités du Mali, c’est dire le niveau de suffisance de ces gens. Il parait que la force « Takuba » a vocation à lutter contre le terrorisme-djihadiste dans les frontières sud de l’Europe, selon Florence Parly, le généralissime du ministère français des armées.

Mais nous savons que ce terrorisme djihadiste est venu au Mali depuis l’assassinat de Mouammar Kadhafi par Nicolas Sarkozy, David Cameron et le lâchage des armes par l’OTAN en Libye. Le chaos a été volontairement planifié et exécuté dans la zone Sahélo-Saharienne. On a mis le feu au champ et on revient avec quelques seaux d’eau pour l’éteindre. Un plan machiavélique ourdi pour s’installer durablement sur les territoires africains.

Pendant ce temps, des politiciens maliens se battent en interne pour les couverts et les bibelots d’un pays en perdition, pour certains, après l’avoir pillé. Ces mauvais maliens qui ont fait fortune en aspirant les maigres ressources d’un pays à l’agonie. Et comble de l’ironie il y en a parmi eux qui se préparent à l’assaut de la magistrature suprême. Ils vont distribuer une infime partie de l’argent volé aux pauvres diables afin de les inciter à voter pour eux. Quelques-uns frétillent dans la presse juste pour obtenir un poste, une fois ce besoin satisfait, “seou”, ils se taisent. Ils oublient les critiques formulées. Bref, beaucoup de candidats des prochaines élections présidentielles seront des milliardaires, des milliards venus d’où ? Vaste débat.

Pour le Président de la transition, il est très important de lutter contre les injustices sociales afin de potentialiser le soutien qu’il a du peuple malien. Ce soutien est incontournable pour lutter contre les puissances qui se veulent rois du Mali à la place des Maliens et leurs acolytes intérieurs, ces bouffons besogneux.

Un autre paramètre majeur est l’implication de la société civile au Mali et en Afrique dans la gestion politique et à la lutte contre les actes des faux-amis qui vous approchent pour mieux vous planter le couteau dans le dos. Cet éveil doit se faire à l’échelle locale et sous-régionale. Les peuples ne doivent plus accepter que les bons dirigeants soient vilipendés ou assassinés pendant que les mauvais roulent carrosse.

Yamadou Traoré

Analyste politique

Source : L’Aube

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