Le Colonel Assimi Goita et ses compagnons d’infortunes, auteurs du double coup d’Etat, sont en quête de légitimité. C’est pourquoi après leur forfait contre Bah N’Daw et Moctar Ouane, respectivement Président et premier ministre de la transition, ils ont déroulé le tapis rouge devant le M5 RFP, le mouvement de contestation contre le régime IBK. Si ce mariage est loin d’être incestueux, il ne serait pas non plus fondé sur l’amour, mais plutôt sur des intérêts. Sans ambages Assimi Goita veut, contre vents et marées de la communauté internationale, garder le pouvoir et pour cela il compte sur le soutien du mouvement populaire M5 RFP, qui jouera le rôle de gilet pare-balles protecteur. La Cour Constitutionnelle vient de le conforter dans sa machiavélique et démesurée ambition. Choguel Maiga et ses camarades du M5 RFP vont-ils cautionner le coup d’Etat en contrepartie du poste de PM ? Le piège tendu par la junte militaire n’est-il pas mortel politiquement parlant pour le M5 RFP ? Est-ce la mort programmée de la démocratie malienne ?
Nous aurions tout vu dans ce pays, une classe politique en faillite, décrédibilisée, réduite à la recherche éhontée des strapontins, une société civile dolosive, opportuniste et inefficace et une armée défaillante, politisée et sans ambition pour le pays. Voici le sombre tableau du Mali d’aujourd’hui. Le pays de Modibo Keita est devenu un vaste champ de ruine où se côtoient la médiocrité, la corruption, le népotisme et l’amateurisme, le tout débouchant sur une mauvaise gouvernance criarde. Sinon comment comprendre qu’au moment où le Mali a consacré dans sa loi fondamentale, qui est la Constitution, que le coup d’Etat est un acte imprescriptible, que des démocrates vont accepter, après avoir voté cette constitution, d’aller s’accoquiner à des putschistes pour former un tandem contre la République et la démocratie. Le M5 RFP en acceptant de cautionner la présidence d’Assimi Goita à la tête de la transition aura non seulement trahi sa conviction, mais aussi et surtout ses leaders comme Modibo Sidibé, Mme Sy Kadiatou Sow, Me Mountaga Tall auront renoncé à leurs idéaux, ceux du 26 mars 1991. Le pouvoir étant pour le M5 RFP, il ne lui revient pas de se compromettre, il doit plutôt exiger son plein et entier exercice, au lieu de se contenter d’une portion incongrue. Le Poste de Premier ministre seul ne suffit pas, il doit revendiquer la Présidence de la transition car c’est le M5 RFP qui s’est battu pour qu’il y ait le changement.
Choguel et ses camarades ne doivent nullement accepter que les militaires dirigent la transition. Ils doivent, au contraire, exiger d’Assimi Goita et ses compagnons d’infortunes de regagner les casernes pour éviter au Mali un embargo. La place des militaires n’est pas sur la scène politique, mais au front et dans les casernes. En tout cas si par boulimie du pouvoir, le M5 RFP acceptait de faire d’Assimi Goita le Président de la transition, ils auraient écrit l’une des pages les plus sombres de l’histoire du Mali, car ce serait cautionner le coup d’Etat comme mode de prise du pouvoir au Mali. Autrement dit, s’en est fini pour la démocratie.
Si Choguel et ses camarades du M5 RFP pensent qu’ils peuvent porter le projet pour lequel ils sont sortis pour combattre IBK, ils ont tout faux, car le fusil à la nuque, ils peuvent connaitre le même sort que Bah N’Daw et Moctar Ouane, c’est-à dire se voir débarquer manu militari par les hommes d’Assimi si une seule virgule manquait à un rapport.
Le piège que Choguel Maiga et ses camarades doivent éviter à tout prix c’est de cautionner la présidence d’Assimi à la tête de la transition. En le faisant, ils auraient signé leur arrêt de mort politique, car aucun pays sérieux n’acceptera de collaborer avec un régime militaire. Donc au finish, le pays se trouvera bloqué et le risque d’un soulèvement populaire n’est nullement pas à écarter.
Youssouf Sissoko
Source : Inf@sept