L’exécutif s’est rangé à l’idée d’une prorogation de la transition politique de deux ans – après une première proposition de cinq ans, ramenée à quatre – quitte à affronter un inévitable conflit frontal avec tout ce que le pays compte d’opposants – politiques et sociaux – et l’organisation sous régionale.
L’enfer de la Primature ce n’est pas pour lui. Les Maliens ont reconnu volontiers que “Choguel est le meilleur des Premiers ministres”. Et contrairement à bien de ses prédécesseurs, c’est autant pour son sens inné de la formule que pour son nationalisme de bon aloi, que le ” Lion” est vanté dans les villes et dans l’arrière –pays. En dépit la crise avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cédéao) qui perdure et s’aggrave, l’attitude du réformateur inflexible, loué, n’autorise plus de douter que le duo ne fera pas d’autres reculades. L’exécutif s’est rangé à l’idée d’une prorogation de la transition politique de deux ans – après une première proposition de cinq ans, ramenée à quatre – quitte à affronter un inévitable conflit frontal avec tout ce que le pays compte d’opposants – politiques et sociaux – et l’organisation sous –régionale. Mais peu importe, car c’est devant le Conseil national de la transition que le point a été fait sur les quatre axes de son Programme d’action gouvernementale, à savoir le renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire national, les réformes politiques et institutionnelles, l’organisation des élections générales, la promotion de la bonne gouvernance et l’adoption d’un pacte de stabilité sociale. Une manière de dire aux conseillers : à vous de juger maintenant.
Trois mois gaspillés
Sans ambages, le Premier ministre a fait sien ce trait d’esprit de Winston Churchill : « un bon politicien est celui qui est capable de prédire l’avenir et qui, par la suite, est également capable d’expliquer pourquoi les choses ne se sont pas passées comme il l’avait prédit ». Sur le fond, en dépit de leur faible taux d’exécution -33,87% -le Premier ministre ne s’est pas avoué vaincu, bien au contraire, les trois mois gaspillés dans d’infructueuses négociations avec la Cédéao pouvaient être mis à profit pour administrer un coup de barre de fer à des actions entamées. Reste que le Mali ne va pas se rendre, il ne va pas renoncer à sa souveraineté à cause des « sanctions illégitimes, illégales et inhumaines ». Le pays continue de survivre- assure son fonctionnement régulier – remporte de victoires éclatantes sur des hordes de terroristes partout sur le territoire national.
Les consensus sont rares au Mali mais s’il en est un qui ne souffre aucune discussion, c’est bien la montée en puissance des forces armées. Un résultat né d’une combinaison d’actions portant notamment sur le « renforcement des capacités de nos forces armées et de sécurité à travers le recrutement de 6 000 éléments, l’acquisition de 9 aéronefs et la remise en opération de plusieurs autres, la mise en place de 18 « bulles de sécurité », la réalisation de 11 500 patrouilles de sécurité visant à rechercher et à détruire les forces ennemies, à rassurer les populations et à marquer la présence de l’État. Aussi, la construction et l’opérationnalisation de 43 postes de sécurité (le poste frontalier de Benena, 41 postes de sécurité à Bamako, 1 poste de sécurité de Koulikoro – Tanabougou), et la construction de 26 unités de sécurité (13 commissariats, 3 brigades, 2 Centres de Secours, 1 poste de secours routier, 2 pelotons de la Garde, 1 légion de gendarmerie, 1 groupement de la Garde) ont été effectuées. Il faudrait aussi capitaliser le renforcement des effectifs des forces paramilitaires avec le recrutement de 4 250 agents (3 250 au compte de la Police nationale et 1 000 pour la Protection civile), et l’acquisition de 52 ambulances type véhicule de secours et d’assistance aux asphyxiés et blessés (VSAB) et d’autres matériels et équipements majeurs pour les forces de défense et de sécurité. Nous enregistrons également des actions de renforcement du cursus de formation à savoir, l’ouverture de l’École de guerre du Mali (EGM) et la réouverture de l’École militaire d’administration le 1er octobre 2021, après deux (02) ans de fermeture ».
Pilule oui, nettoyeur aussi
Choguel Kokalla Maïga est convaincu que la corruption est nuisible, car elle fait obstacle à la croissance et au développement économiques, entame la confiance du citoyen dans la légitimité et la transparence des institutions et entrave l’adoption de lois justes et efficaces, ainsi que l’administration et l’exécution des lois et l’action des tribunaux, En conséquence, il a évoqué la répression de la corruption dans le cadre. D’un côté, les scandales sont une pilule difficile à avaler, mais, d’un autre côté, ils peuvent permettre de faire un grand nettoyage parfois nécessaire, et toujours salutaire, dans la société. Tenez ! Tous les dossiers, objets des rapports de contrôle du Bureau du Vérificateur Général et d’autres organismes de contrôle de l’État ont été systématiquement remis à la justice. Ainsi, des poursuites judiciaires ont été engagées dans les dossiers d’équipements militaires, les tueries et exactions des 10, 11 et 12 juillet 2020 à Sikasso, Kayes et Bamako sont en cours de traitement devant les juridictions compétentes, les enquêtes relatives aux tueries de Ogossagou I et II ont été bouclées, l’affaire de Sobane Da est en instruction.
S’il était très attendu aussi sur le terrain glissant de la lutte contre la corruption que d’aucuns ont jugé lente l’évolution des dossiers pendants devant les tribunaux, le débat sur l’opportunité pour le Mali de sortir ou non de la zone Franc et de la Cédéao a refait surface depuis les derniers mois, drainant beaucoup de passion et débouchant presque sur une opposition frontale entre ses partisans et ses détracteurs. La discipline monétaire assez stricte imposée aux deux banques centrales, à travers le compte d’opération, est perçue comme étant de nature à réduire le volume de financement disponible pour les économies nationales afin d’accompagner les investissements et la croissance. D’aucuns associent la zone Franc au faible accès au crédit bancaire, au niveau jugé élevé des taux d’intérêt débiteurs et à la prédominance des crédits à court-terme, notamment les crédits de consommation, sur les prêts à plus long terme destinés à financer l’investissement. Un autre argument sur lequel les partisans de la sortie de la zone Franc s’appuient est la conquête de la souveraineté monétaire. Mais, le Premier ministre a balayé d’un revers de main ces aspirations, en indiquant que « le Mali ne quittera la Cédéao et que la question de la création d’une monnaie n’est pas sur la table ».
Georges François Traoré
Source : L’Informateur