Dan nan Ambassagou : le gouvernement malien opterait-il pour une dissolution ?

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Colonel Wague
Le porte-parole du CNSP, le colonel-major Ismaël Wagué

Le colonel Ismaël Wagué, ministre de la Réconciliation national, a rencontré le mardi dernier, la milice Dan Nan Ambassagou. Une milice à laquelle des exactions sont reprochées dans le centre du Mali. Cette rencontre, contestée de part et d’autre, pourrait bien être une technique de la part du gouvernement d’aller vers un désarmement de cette milice.

Alors que les victimes des attaques d’Ogossagou (dont la plus meurtrière en mars 2019 a fait plus de 100 morts), village peul dans la région de Mopti, attendent que justice soit rendue, le gouvernement malien  rencontre cette milice soupçonnée d’exactions dans la région. Cette rencontre soulève plus de questions que de réponses.

17 violations graves contre des enfants

Plusieurs exactions sont reprochées à Dan nan Ambassagou dans le centre du Mali. C’est d’ailleurs ce qui avait conduit à sa dissolution, après l’attaque meurtrière de 2019 contre le village d’Ogossagou, par Soumeylou Boubeye Maïga, alors Premier ministre. Mais cette décision s’est butée à la résistance de la milice « d’autodéfense » dogon qui arguait : « Le gouvernement ne peut pas dissoudre Dan Na Ambassagou parce que ce n’est pas lui qui l’a créé », déclarait le chef de cette milice, Youssouf Toloba dans  Jeune Afrique.

Pourtant, cette milice est indexée dans les exactions au centre du pays. Dans son rapport trimestriel de décembre 2020 sur la situation au Mali, le secrétaire général des Nations Unies soulignait l’implication de Dan nan Ambassagou dans certaines violations des droits de l’homme au centre du Mali. « On rapporte que des membres des Forces armées maliennes auraient été impliquées dans de graves violations des droits humains : au moins 24 membres de la communauté peule auraient été sommairement exécutés et 3 autres auraient été blessés à Libé, dans la région de Mopti, le 22 octobre », indique-t-on dans ce rapport avant de préciser : « Ce jour-là, soutenus par des chasseurs traditionnels de la communauté dogon (dozos), ces membres des forces nationales auraient en outre brûlé des habitations et des greniers, pillé du bétail et détruit un réservoir d’eau ».Le même document souligne que cette milice est à l’origine de 17 violations graves contre des enfants dans la même région.

La MINUSMA n’est pas la seule à documenter ces exactions de la part de Dan nan Ambassagou. Human Right Watch, dans son rapport intitulé « Combien de sang doit encore couler ? », souligne : « Des groupes d’autodéfense dogons, notamment le groupe Dan Na Ambassagou, dont les attaques ciblaient la communauté peule, étaient impliqués dans la première atrocité commise en 2019 — le meurtre, le 1er janvier, de 39 civils peuls à Koulogon — ainsi que dans la pire atrocité qu’ait endurée le Mali dans son histoire récente, à savoir, le meurtre, le 23 mars, de plus de 150 civils peuls à Ogossagou ».

Les enquêtes pour situer les responsabilités des faits reprochés à ce groupe seraient toujours en cours.

« Une rencontre pour décrisper la relation » ?

Conscientes de toutes ces situations, les autorités de la transition oseraient-elles nouer une certaine relation avec cette milice ? En tout cas,le site lepaysdogon.net précise qu’il s’agissait d’« une rencontre pour décrisper la relation entre les autorités maliennes et le mouvement d’autodéfense Dan Na Ambassagou ».

Du côté gouvernemental, une lecture différente de cette rencontre est donnée : « “Ce n’est pas une caution,” assure d’emblée un cadre du ministère malien de la Réconciliation nationale, qui précise que des rencontres similaires ont également lieu avec d’autres groupes d’autodéfense, à la fois dogons et peuls », rapportent nos confrères de Radio France international (RFI) qui précisent que cette rencontre vise à stopper les hostilités et d’engager ensuite un processus de désarmement des milices.

Même s’il n’a pas souhaité se prononcer ouvertement sur cette rencontre, un membre de Tabital Pulaaku que nous avons contacté se dit indigné. Pour l’instant, laissons le temps au temps. À la manière forte, le gouvernement de la transition serait dans l’optique d’user de la diplomatie pour dissoudre cette milice pour que la soif de justice qui anime les uns et les autres puisse se concrétiser. Car faut-il le rappeler que sans justice, difficile de parvenir à une paix véritable ?

Fousseni Togola

Source : maliweb.net

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