Le régime d’Ibrahim Boubacar Keïta est décidément dans l’œil cyclone. De Sikasso à Bamako en passant par Kayes, les manifestations se suivent pour dénoncer la mauvaise gouvernance qui mine le pays. Par tout le ras-le-bol des populations se fait entendre de façon violente. La colère est là !
Le vendredi 8 mai 2020, le calme était revenu à Sikasso, après les violentes manifestations survenues le jeudi 7 mai. En effet, plusieurs manifestants ont blessés, le jeudi 7 mai, pendant les affrontements avec les forces de sécurité. Des éléments de Bamako ont été envoyés en renfort. Certains habitants de Sikasso ont dénoncé « l’utilisation excessive de la force » de la part des forces de l’ordre qui ont violemment réprimé les manifestants par des tirs de gaz lacrymogènes jusque dans les domiciles ou des tirs à balles réelles comme en témoigne certaines images sur les réseaux sociaux.
Cette grogne populaire fait suite à l’annonce fin avril des résultats définitifs des législatives de mars-avril, qui ont attribué au parti au pouvoir un certain nombre sièges de plus que lors de l’annonce des résultats provisoires.
Egalement en cause, le couvre-feu mis en place par le gouvernement, avant d’être levé samedi, pour faire face à la crise sanitaire du coronavirus, qui a de nombreuses victimes sur plus d’un millier de cas recensés.
Trois morts à Kayes
Lundi 11 mai 2020 dans la soirée, soit deux jours après la levée du couvre-feu au Mali, un groupe de jeunes faisaient des acrobaties à moto en banlieue de Kayes, quand un policier leur a intimé l’ordre de s’arrêter. Le policier a alors « fait usage de son arme, tuant l’un des jeunes du nom de Seyba Tamboura », 18 ans, a relaté Mamadou Zoumana Sidibé, le gouverneur de la région de Kayes.
Estimant qu’il s’agit d’un « incident regrettable pour la police », Seydou Diallo, directeur régional de la police de Kayes, a en outre indiqué que « le policier n’était pas en mission (…) encore moins en patrouille ».
La nouvelle de la mort du jeune homme a provoqué une flambée de violences et d’affrontements entre jeunes et forces de l’ordre, au cours desquels au moins 3 personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées. Des manifestants en colère ont incendié un commissariat, saccagé un poste de police et érigé des barricades sur le pont de la ville. Les manifestations, qui ont démarré lundi soir, ont continué encore le lendemain, mardi.
« Devant la gravité de la situation », le gouvernement a dépêché mardi matin à Kayes une « mission de haut niveau du ministère de la Sécurité » qui compte notamment le directeur général de la police nationale et l’inspecteur en chef des services de sécurité et de la protection civile, a fait savoir Yaya Sangare, le ministre de la Communication, appelant « les populations au calme ».
Idem à Bamako
Vendredi 5 juin dernier, une marée humaine a répondu a appelle du FSD-CMAS-EMK pour dénoncer la mauvaise gouvernance, les tentatives de partition du pays, les dérives antidémocratiques au plan électoral et socio-politique et la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta. Occasion pour ces trois organisations d’exiger la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta.
Prenant la parole, l’imam Mahmoud Dicko a rappelé que les tentatives de corruption ne lui fera pas taire contre les scandales de corruption, les arrestations arbitraires, le non-respect des textes, l’enlisement de l’insécurité au Nord et au Centre, à l’incapacité du régime de construire une armée républicaine capable d’aller conquérir l’Azawad. « Quand j’ai dénoncé cette situation, ils ont décidé de m’arrêter et m’envoyer au camp I. C’est eux qui méritent d’être envoyé au Camp I, qui doivent rendre compte au peuple », a déclaré l’imam Mahmoud Dicko, qui a durci le ton en lançant un ultimatum au président de la République.
« Cette mobilisation n’est qu’un début contre le régime IBK. Il va continuer. Je jure que si ce rassemblement ne lui sert pas de leçon, l’histoire racontera la manière dont son pouvoir prendra fin », a-t-prévenu.
A côté de lui, plusieurs intervenants ont réclamé le départ du président Ibrahim Boubacar Keïta pour son « incapacité de satisfaire les revendications légitimes de la population relatives à l’éducation, la santé, l’économie, la sécurité, l’emploi… ».
Auparavant, plusieurs quartiers de Bamako ont été secoués par des manifestations pour demander la levée pure et simple du ouvre. En effet, l’épidémie de coronavirus avait fini de créer des tensions avec ses mesures de prévention. De nombreuses personnes ont manifesté, mardi soir 2 mai 2020, un peu partout dans les quartiers de la ville de Bamako contre le couvre-feu instauré pour endiguer la propagation du coronavirus.
Les manifestants ont fait part de leur amertume et de leur «ras-le-bol» de la situation à ne pas pouvoir circuler la nuit en plus des coupures intempestives d’électricité. Blocage et barricade des routes, pneus enflammés sur les voies goudronnées, face à face avec la police, sont autant d’actes posés pour dire non au couvre-feu. Des contestataires mobilisés un peu partout à travers la ville scandaient «On en a marre du couvre-feu», «On meurt de faim ou on meurt de coronavirus ?», «À bas le couvre-feu, on sort pian !». A cela s’ajoutait aussi la frustration issue des résultats des élections législatives. Des échauffourées ont même éclaté entre les contestataires et les forces de l’ordre. En réponse aux jets de pierre et des insultes graves, les forces de l’ordre ont dispersé les manifestants à l’aide de gaz lacrymogène. Mais ces derniers se repliaient un peu plus loin et brûlaient des pneus sur la voie publique. Dans des vidéos, largement partagées sur les réseaux sociaux, on peut voir des manifestants scander des slogans dénonçant les délestages de l’EDM-SA en cette période de forte chaleur.
Mohamed Sylla
Source : L’aube