Décision scandaleuse sur le délai de 24 mois proposé par les autorités maliennes de transition : Pourquoi la CEDEAO veut plonger le Mali dans le chaos?

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Le président de la république du Ghana Nana Akufo-Addo et le président de la transition Assimi Goita
Le président de la république du Ghana Nana Akufo-Addo et le président de la transition Assimi Goita

C’est sans appel : le processus de vassalisation du Mali est désormais en cours. Depuis, il est vital pour les puissances occidentales, avec en tête de file, la France et leurs alliés africains ; notamment, à travers la CEDEAO, de plonger absolument le Mali dans le chaos. D’où des séries de sanctions inhumaines contre le Mali et les autorités transitoires.

Pour la France et ses alliés, il faut éviter que la Mali devienne un exemple. En bloc, il faut tout faire pour que la transition au Mali échoue. Parce que si jamais cette transition réussit et aboutit à des élections justes et transparentes, alors le Mali aura démontré qu’on peu dire non à l’impérialisme et s’en sortir. Et naturellement, ceux qui veulent maintenir l’Afrique dans ce climat de dépendance permanent craignent qu’un succès du Mali retentisse sur tous les autres pays africains qui sont encore sous le joug des puissances coloniales, avec la complicité, bien entendu, de leurs alliés à la tête de certains de ces États.

En revanche, à travers cette décision inique de la CEDEAO, on comprend directement qu’il a été décidé de punir le Mali, de punir les autorités maliennes actuelles pour justement éviter qu’elles soient présentées comme des modèles. Il ne faut absolument pas que le Mali soit un exemple. C’était déjà le cas où Haïti dans les années 1800 a courageusement réclamé son indépendance ; tous les mécanismes ont été développés pour empêcher à Haïti de briller. C’est ainsi que les avoirs de Haïti, comme ceux de l’État malien aujourd’hui ont été bloqués. C’est aussi comme cela qu’une dette coloniale insupportable a été imposée à Haïti pour l’empêcher de devenir un exemple. Et ce n’est pas le fait du hasard, si certaines zones, aujourd’hui, appelées la France d’outre-mer ont renoncé à leur indépendance pour ne pas être comme Haïti. L’exemple était tellement frappant qu’aucune autre partie colonisée ne voulait suivre ce chemin.

L’autre exemple également pour revenir en Afrique, c’est ce qui s’est passé en République de Guinée en 1958, après le nom historique de Sékou Touré qui a mené une opposition contre la politique de la France en Guinée. Tous les  mécanismes ont été mis en œuvre pour punir la Guinée. Même l’opposition guinéenne a été armée pour créer un climat d’insécurité perpétuel dans ce pays et essayer de renverser Sékou Touré.

La France et ses valets africains à la manœuvre 

Aujourd’hui, ce qui se passe au Mali, n’est pas anodin. Les groupes rebelles qualifiés, aussi tantôt de djihadistes, sont effectivement là pour créer un climat d’insécurité permanent au Mali et fragiliser de ce fait l’État. Rappelez-vous également pour ce qui concerne la Guinée et ce qu’on avait appelé ‘’l’opération persil’’. Et comme la Guinée avait refusé la communauté, elle a eu sa propre monnaie dont elle n’avait pas, comme c’est le cas des autres pays qui avaient accepté la communauté pour monnaie le franc colonial qui était le franc CFA.

Face à cette situation à l’époque, la France a fabriqué des donnes de faux billets pour l’injecter dans l’économie guinéenne et la déstructurer. Et jusqu’aujourd’hui, la Guinée paye le lourd tribut de ces actions punitives.

Dans ce que le Mali est en train de subir aujourd’hui, avec ces sanctions, totalement, illégales, illégitimes de la CEDEAO ; avec l’acharnement de la France et de ses alliés africains, c’est justement qu’il a été décidé de punir le Mali : il ne faut surtout pas que la transition réussisse.

Le deuxième élément qui démontre ce qui se passe aujourd’hui au Mali, c’est qu’il ne faut pas qu’à l’issue de cette transition, le chef de l’État malien soit le fruit de la volonté populaire. En d’autres termes, il ne faudrait pas qu’il soit un président légitime. D’où le lieu pour la France et ses valets de la Cedeao d’empêcher cette transition de mettre sur pied un certain nombre d’institutions et d’organes à même de garantir aux maliens une élection juste et transparente. Parce que l’enjeu derrière, c’est que ces pays qui veulent absolument tenir le Mali, roulent afin que le prochain président malien soit une personnalité qui leur est favorable. Voilà d’un trait, pourquoi la France et ses alliés veulent organiser les élections dans un climat chaotique. De ce fait, ils pourront manipuler pour mettre, finalement, à la tête de l’État quelqu’un que les maliens n’auront pas choisi. Et celui-là naturellement leur sera redevable et remettra alors en cause tous les acquis de la transition.

Le deux poids, deux mesures de la France

Il faut bien comprendre que la précipitation avec laquelle on veut pousser le Mali à organiser les élections est voulue. On se rappelle, la Côte d’Ivoire a été forcée, en son temps, dans un contexte de crise d’organiser des élections, alors qu’une partie du pays était totalement jonchée de rebelles encore en armes. Le résultat, tout le monde le connaît, c est le chao. Mais le résultat pour ceux qui avaient mené cette opération a été largement atteint, parce qu’enfin de compte est arrivé au pouvoir en Côte d’Ivoire, celui qu’ils avaient choisi. Et la déclaration du président français, Nicolas Sarkozy, avant même la proclamation officielle des résultats en Côte d’Ivoire, lève le voile sur le dessein caché de la France sur ses anciennes colonies : des Chefs d’État soumis et manipulables. Du moins, s’ils veulent éviter des ennuis et boucler leurs mandats.

Quand on suit constamment l’actualité malienne, on constate que la plupart des renversements de régime dans ce pays ont eu lieu au mois de mars. L’on peut bien comprendre que la carte qu’est en train de jouer la CEDEAO et ses alliés est celle du temps. Ils espèrent qu’il y aura une grogne sociale, très bientôt, qui va conduire à une situation de chaos et pouvoir mettre en difficultés, les autorités maliennes de transition et faire main basse sur cette révolution populaire, comme ils ont eu souvent à le faire ailleurs.

Il est très important que les Africains comprennent quelle est le mécanisme. On peut bien se demander pourquoi est-ce qu’on fait une fixation sur les élections alors qu’on sait (et cela a été démontrée à travers le temps) qu’il ne suffit pas d’organiser les élections pour régler des problèmes ? Pourquoi est-ce qu’on laisse certains Chefs d’État modifier à souhait leur constitution, c’est-à-dire commettre des coups d’États  pour se maintenir indéfiniment au pouvoir ?

On se rappelle qu’en 2008, le président Paul Biya au Cameroun, a fait modifier la constitution pour pouvoir être président à vie. Cela a été le cas au Congo. Également, cela fut le cas récemment en Côte d’Ivoire. Et à chaque fois, la fameuse Communauté Internationale est restée totalement muette. C’était aussi récemment le cas en République de Guinée.

Pourquoi on peut se revendiquer être le pays de la liberté, le pays des droits de l’homme et rester totalement silencieux quand ces droits de l’homme ; quand ces libertés sont bafoués dans plusieurs pays dont on a pourtant un regard précis ? C’est le cas notamment au Bénin, aujourd’hui, où Patrice Talon qui avait annoncé ne faire qu’un mandat est finalement à son deuxième mandat. Et pour avoir ce mandat, il a du brimer de manière violente l’opposition béninoise. Plusieurs opposants, aujourd’hui, sont  en prison.

C’est encore le cas au Cameroun qui est aujourd’hui et certainement l’un des pays au sud du Sahara qui compte le plus de prisonniers politiques. C’est le cas aussi récemment en Côte d’Ivoire où le président ADO pour avoir son troisième mandat a violenté certains opposants.

À ce moment là, où était la communauté internationale ? Où était la CEDEAO ? Où était la France ? Il faut bien que les africains comprennent.

Il faut se rappeler ‘’du deux poids deux mesures’’ dont la France fait preuve à chaque fois. Pour revenir à l’élection au Cameroun, le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères de la France, Jean Ives Le Drian, en disait : « Moi, je n’ai pas la capacité de juger puis qu’il n’y avait pas de missions de contrôle et de vérification initiées où la France était présente. Je constate qu’il y a eu des élections qui se sont déroulés néanmoins dans le calme même si il y a eu quelques difficultés dans les régions anglophones. Je constate qu’un président a été déclaré élu, Paul Biya. Je le constate par les institutions camerounaises. Nous avons à l’égard de Paul Biya une relation de confiance ».

Comme vous le voyez, Le Drian donne comme argument le fait que la France n’a pas envoyé d’observateurs au Cameroun. C’est pour cela que ce simulacre d’élection a été adoubé en France. On l’aurait pu lui accorder du crédit sauf que quelques mois plus tard, il y a eu une nouvelle élection, cette fois là, en République Démocratique du Congo (RDC).

Tenez-vous bien ! Comme au Cameroun, la France n’a pas envoyé d’observateurs au Congo. Mais à entendre Le Drian au lendemain des résultats de la présidentielle en RDC, on découvre la France. « Il semble bien que les résultats proclamé, M.Tessekedi déclaré vainqueur ne soient pas conforme aux résultats que l’on a pu constater. La Conférence Épiscopale du Congo a fait des vérifications et a annoncé des résultats qui étaient totalement différents. Je pense d’abord qu’il faut qu’on passe au calme, qu’on évite les affrontements et puis, que la clarté soit faite sur ces résultats », a martelé Le Drian. Avant de préciser : « La France agit par ce qu’elle est membre du Conseil de Sécurité de l’ONU. Elle a saisi le Conseil de Sécurité en fin de semaine dernière pour que les résultats constatés soit des résultats réels ».

En fait, on ne comprend rien dans l’attitude de la France. Mais tout cela est voulu. C’est pour cela qu’elle fait tout pour que jamais un président légitime, ne se retrouve à la tête de nos États. Parce que si un président est légitime avec une assise populaire certaine, il pourra faire comme le Mali.

Un autre élément important à relever, c’est le fait que depuis au moins Jacques Chirac, les présidents français après lui, annoncent qu’ils vont rompre avec la France-Afrique : « C’est fini, la France ne bat pas ;  nous voulons une nouvelle relation ; nous voulons un nouveau partenariat avec l’Afrique… ». De Sarkozy à Emmanuel Macron en passant par François Hollande, ils l’ont tous annoncé.

Mais la question que l’on peut se poser, c’est qu’une fois à l’Élysée, personne ne respecte plus ses engagements, vis-à-vis de l’Afrique. La réalité aujourd’hui, c’est que la France dépend énormément de l’Afrique. Et avec Macron, certains africains avaient beaucoup d’espoirs. Parce qu’on disait : « lui, il vient d’une autre école, il n’est pas de la vielle politique française. Il n’est ni de la gauche ni véritablement de la droite. Avec lui, ça sera différent ! ». Quelle déception ?

Et ce qui se passe aujourd’hui au Mali est l’illustration parfaite ‘’du deux poids, deux mesures de la France’’ sur les crises en Afrique.

Jean Pierre James

Source : Nouveau Réveil

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