Le dimanche 12 août 2018, 8.000.462 maliens étaient appelés aux urnes pour le 2ème tour de l’élection du Président de la République. A cette occasion, Caritas Mali, avec l’appui de ses partenaires, Secours Catholique France, Caritas Espagne et MISEREOR, a déployé, comme lors du premier tour, le 29 juillet 2018, une Mission d’Observation Electorale sur l’ensemble du territoire national (à l’exception des régions de Kidal et Tombouctou). Cette mission composée de 513 observateurs et superviseurs dont 142 femmes a couvert 167 communes sur les 703 et observé 692 bureaux de vote.
La Mission d’Observation Électorale de Caritas Mali (MOECM) s’est inspirée de: la lettre pastorale des évêques du Mali ainsi intitulée : « A la Communauté Catholique et à tous les maliens de bonne volonté à l’occasion des élections générales de 2018 », afin de parvenir à « Une mentalité nouvelle pour un Mali nouveau » ; la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance de 2012 ; la Déclaration de l’OUA/UA sur les principes régissant les élections démocratiques en Afrique de 2002 ; les Directives de l’Union Africaine pour les missions d’observation et de suivi des élections de 2001 ; la Déclaration de Bamako du 03 novembre 2000 pour la tenue d’élections libres, transparentes et fiables.
A la veille du second tour du scrutin, le samedi 11 août 2018, la MOECM a publié un communiqué pour appeler les autorités publiques à garantir l’expression libre, transparente et apaisée du scrutin et à redoubler d’efforts pour assurer la sécurité des personnes et des biens tout au long du processus électoral. Elle a aussi encouragé les citoyennes et les citoyens maliens à assumer leur droit de vote dans la paix et le calme.
Les données collectées par la plateforme virtuelle mise en place par Caritas Mali, à partir des informations émanant des observateurs, des superviseurs au niveau des différentes localités et du district de Bamako, ont été centralisées traitées ; et analysées en temps réel.
CONSTATS FAITS SUR LE SCRUTIN DU 12 AOUT 2018
Les faits marquants du scrutin dans les bureaux de vote observés par la MOECM portent sur l’heure d’ouverture des bureaux de vote, la disponibilité des matériels et des documents électoraux, la présence et la ponctualité des agents électoraux, le fonctionnement des bureaux de vote, la présence des forces de sécurité, l’affluence des électeurs dans les bureaux, l’heure d’ouverture et de fermeture ainsi que le dépouillement.
Sur l’ouverture, la clôture du scrutin et le dépouillement
De façon générale, les bureaux de vote observés par la MOECM ont ouvert et fermé à l’heure. Toutefois, à Mopti, les bureaux de vote délocalisés des villages de Danna, Daladougou et Korienwel à Fatoma, ouverts dans un premier temps, ont été fermés avant de rouvrir vers 11h, après la visite du gouverneur.
Le faible éclairage de certains bureaux de vote rendant le dépouillement pénible dans certains centres de vote observés.
Sur la disponibilité des matériels et des documents électoraux
Les matériels et les documents électoraux étaient disponibles dans la grande majorité des bureaux de vote observés. Cependant, la MOECM a constaté l’absence des listes électorales affichées au niveau de certains bureaux de vote, notamment au Centre Mamadou Goundo Simaga, 1er cycle et 2ème cycle, de Badalabougou du District de Bamako.
La MOECM a aussi relevé, s’agissant du fonctionnement, la mauvaise qualité par endroits de l’encre indélébile.
Sur la présence et la ponctualité des membres des bureaux de vote
En dehors de quelques retards enregistrés, le personnel électoral dans son ensemble a été ponctuel et présent dans les bureaux de vote. Les assesseurs de l’opposition et de la majorité étaient présents. A Mopti, cependant, dans la Commune de Fotoma, le Maire a profité du retard d’un assesseur pour en imposer un de son choix, en l‘occurrence un électeur, alors que le président du bureau de vote avait déjà procédé au remplacement du retardataire.
Concernant l’affluence dans les bureaux de vote
Les observateurs de Caritas Mali ont constaté une très faible affluence dans les bureaux de vote. Même si la tendance s’est légèrement inversée avant la clôture des bureaux de vote, le constat est resté le même à la fermeture des bureaux de vote.
Dans certaines localités, comme dans la Commune de Sio, au village de Youré dans la région de Mopti, les électeurs ne se sont pas présentés aux bureaux de vote parce qu’ils ignoraient la date du scrutin pour le 2ème tour.
En ce qui concerne la sécurité, il a été noté la présence des forces de sécurité dont de nombreuses patrouilles ont été déployées. Les observateurs de la Caritas ont noté également le manque de dispositif pour assister les électeurs ayant des besoins spécifiques à savoir les personnes âgées, les handicapés physiques, les malvoyants, les femmes enceintes,…
LES MOTIFS DE SATISFACTION
La MOECM a constaté le déroulement du scrutin dans un climat serein et apaisé en dépit des dysfonctionnements constatés et de la faible affluence des électeurs ; la prompte réaction de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) qui a permis la correction de nombreux dysfonctionnements constatés au premier tour ; la présence rassurante des missions d’observation électorale nationales et internationales ; la présence des délégués de la Cour Constitutionnelle, de la CENI, de la Délégation Générale aux Elections (DGE) et la bonne couverture du scrutin par les organes de la presse nationale et internationale.
En conclusion, la bonne tenue du scrutin dans les 692 bureaux de vote observés démontre que des défis majeurs ont été relevés, notamment sur les points liés à la transparence et à la sincérité du vote.
LES ENSEIGNEMENTS TIRES DU PROCESSUS
Relativement au processus électoral :
L’introduction de la veille électorale et de l’alerte précoce dans l’observation des élections a permis de prévenir et d’anticiper sur les incidents, irrégularités et dysfonctionnements liés au processus électoral,
La présence discrète et rassurante des forces armées et de sécurité qui a permis de créer un environnement serein et de confiance,
Relativement aux populations :
La confirmation de la maturité civique des populations, notamment le calme et la sérénité, toutes choses qui confortent l’enracinement progressif de leur culture démocratique.
Relativement à la société civile :
La MOECM note que ce 2ème tour du scrutin présidentiel s’est déroulé dans des bonnes conditions. Les dysfonctionnements constatés n’ont pas entaché la sincérité du scrutin dans les bureaux observés.
La MOECM tient cependant à souligner que des défis restent à relever. Dans cette optique, elle formule les recommandations suivantes :
RECOMMANDATIONS
La MOECM recommande à l’Administration Territoriale de : Formaliser dans la révision de la loi électorale publication des résultats bureau de vote par bureau de vote pour la transparence ; Formaliser et renforcer le cadre de concertations administration territoriale, partis politiques et société civile ; constituer un vivier d’agents électoraux et de persévérer dans le renforcement de leurs capacités opérationnelles.
A la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) de : continuer à renforcer son rôle de suivi et de supervision du processus électoral ; faciliter la collaboration entre les différentes missions d’observation tant nationales qu’internationales.
Aux candidats de : engager toute contestation éventuelle, dans le strict respect des textes juridiques régissant les élections ; s’abstenir de faire toutes déclarations susceptibles de porter atteinte à la paix, à l’ordre public et à l’unité nationale, notamment avant la proclamation des résultats provisoires par le Ministère de l’Administration Territoriale et des résultats définitifs par la Cour Constitutionnelle.
Aux partis politiques de : accomplir leurs missions de service public, de formation de l’opinion publique, des militants, de l’encadrement des élus, conformément aux dispositions de la Charte des partis politiques.
A la presse nationale et internationale de : garder leur rôle d’informateur ; s’abstenir de publier des résultats non officiels et de fausses tendances.
Aux leaders d’opinion et de la société civile de : continuer leur travail de sensibilisation des populations au calme, à l’esprit civique et à la responsabilité citoyenne ; continuer leur travail de sensibilisation des populations pour la promotion de la réconciliation nationale, la concorde et la participation citoyenne.
Aux citoyennes et aux citoyens maliens de : participer davantage au processus électoral afin de relever le taux de participation ; éviter et de rejeter toutes formes de violence, renforcer leur engagement civique et citoyen en faveur de la démocratie et du développement intégrale et durable du Mali ; renforcer la veille citoyenne.
REMERCIEMENTS :
La MOECM remercie les missions d’observation telles que celles de la CEDEAO, de l’Union Africaine, de l’Union Européenne, de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), etc. Une mention particulière est adressée à l’ensemble des Partenaires techniques et financiers, à savoir : Secours Catholique France ; Caritas Espagne ; MISEREOR.
La MOECM félicite et encourage : les forces armées et de sécurité, dont la présence sur le terrain a contribué à la tenue du scrutin ; la presse nationale et internationale, qui a accompagné positivement le processus. L’ensemble des observateurs qui, par leur présence, ont contribué à la transparence du scrutin et au renforcement de la confiance des électeurs et des acteurs.
La Mission d’Observation Electorale de Caritas Mali, félicite l’ensemble du peuple malien pour sa maturité et son sens de responsabilité qui ont prévalu tout le long du processus et l’exhorte à persévérer davantage pour la consolidation de l’unité nationale.
Caritas Mali, sous l’égide de la Conférence Episcopale du Mali, s’engage à continuer à œuvrer à la promotion et à la tenue d’élections apaisées, crédibles et équitables pour le renforcement d’une démocratie durable au Mali.
Fait à Bamako, le 14 août 2018
Le Chef de la Mission d’Observation Electorale de Caritas Mali (MOECM),
Théodore TOGO
Secrétaire Général de Caritas Mali