La période transitoire doit permettre à tous les Maliens de se retrouver pour analyser ensemble ce qui a pu arriver au Mali pour qu’il se retrouve là où il se trouve aujourd’hui et voir quelles sont les solutions durables qui permettront de sortir de cette crise. Mais, les agissements de certains ne contribuent pas à asseoir ce cadre d’échange entre Maliens. Et c’est ce que regrette Tièman Hubert Coulibaly, président du parti UDD.
Au congrès statutaire de l’Alliance des Forces Démocratiques (AFD) tenu les 16 ; 17 et 18 septembre 2021 au CICB, Tièman Hubert
Coulibaly a pris la parole pour expliquer la vision qu’il a pour une réussite de la transition au Mali. Il n’a pas manqué non plus de répondre à ceux et celles qui le traitent d’apatride à cause de ses prises de positions politiques et met en garde contre ce genre de dérives qui menacent la cohésion sociale.
Hommage appuyé au professeur Aly Nouhoum Diallo… Tièman Hubert Coulibaly a rendu un hommage au professeur Aly Nouhoum Diallo, cadre politique et ancien président de l’Assemblée nationale, présent dans la salle. Pour lui, cet « invité d’honneur » au congrès statutaire de l’AFD, mérite tous les honneurs « pour ce qu’il a été et pour ce qu’il continu d’être ». « Le prof Aly Nouhoum Diallo, est un militant pour l’indépendance, un combattant pour la liberté, un dirigeant brillant pour le Mali. En sa qualité de médecin, d’enseignant et de parlementaire, président de l’Assemblée nationale de 1992 à 2002, puis président du parlement de la CEDEAO de 2000 en 2006, le professeur Aly Nouhoum Diallo, dans le contexte qui est le nôtre aujourd’hui de conflits exacerbés à travers notre territoire ; des démons qui ont été réveillés entre nos communautés, a prouvé qu’il continuait d’être ce dirigeant pour le Mali, en acceptant, de participer à des négociations et discussions extrêmement complexes dans un contexte ou la confiance entre les Maliens a été dévastée et dans un contexte où il ne restait beaucoup d’espoir, pour coller au thème du congrès » a lancé Tièman Hubert Coulibaly à l’endroit du doyen de la politique malienne avant de lui demander de rester au service du Mali pour continuer à prodiguer des sages conseils. « Le professeur s’est comporté de telle manière que lors des discussions concernant la pacification et les efforts de réconciliation au centre du Mali, que ceux qui ont décidé de se rebeller contre l’Etat et souvent avec des motifs qui sont soutenables, ont dit que le professeur était un interlocuteur valable et crédible. Alors, étant donné que ces difficultés ne sont pas terminées, mon cher oncle je vous demande de rester au service du Mali, de continuer à fournir tous les efforts possibles afin que non seulement le
dialogue ne se rompe jamais avec nos parents en rupture avec l’Etat ».
Personne n’a le monopole de la vérité…
Pour Tièman Hubert Coulibaly, une seule personne ne fera pas le Mali. C’est l’ensemble des filles et fils de ce pays, qui feront le Mali dont nous rêvons tous. Pour ce faire, il faut cultiver des valeurs d’humilité et de sagesse et savoir que l’autre a toujours une pièce qui contribuera à constituer la vérité. « Personne n’a entièrement tort personne n’a
entièrement raison. Mais si au-delà des cœurs, les cerveaux arrivaient à computer sur les programmes des uns et des autres, je suis convaincu que nous pourrons trouver des solutions. Tout le monde parle du Mali, mais de quel Mali parlons-nous. Il nous faut nous mettre d’accord sur quel Mali nous voulons ? Cette crise qui dure depuis très longtemps a
des fondements » a expliqué le président de l’UDD et d’ajouter que depuis bien des années les militaires font de la politique.
« Et c’est d’ailleurs le problème de notre armée. Les militaires font de la politique et sont munis d’une analyse qui mérite peut-être des dispositions à prendre. J’observe qu’en 1990-1991 beaucoup de sacrifices ont été faits dans ce pays pour que la liberté politique soit une réalité. Certains trouveraient curieux que moi, président de l’UDD, ayant été considéré pendant quelques années après 1991 comme le parti de la restauration que je puisse dire aussi qu’en 1991 beaucoup de sacrifices ont été faits pour la liberté politique. Cela c’est la vérité historique. Au sein même du parti l’UDPM qui a été renversé, des gens se battaient pour cette liberté politique ; c’est aussi ça la vérité. C’est pour ça que personne n’a entièrement tort ou raison. Les sacrifices qui ont été faits en 1991 méritent le respect. Aujourd’hui notre comportement doit faire en sorte de préserver ces acquis qui sont importants. »
Ne plus accepter un nouveau règne militaire de 23 ans…
Pour Tièman Hubert Coulibaky, il est essentiel de lutter à préserver les droits de l’homme au Mali et cela doit être un réflexe. « Ceux qui ne peuvent plus aller tranquillement dans leurs champs, ou conduire tranquillement leur cheptel, sont ainsi privés d’un droit fondamental qui est celui de s’épanouir dans son environnement ; d’exercer honnêtement une profession, un métier qui permet de vivre décemment et dignement. Nous devons continuer de lutter pour préserver ces droits. Mais en effet, ça ne pourra jamais se faire tant que nous n’arriverions pas à trouver un principe pouvant nous permettre d’être unis. Il n’y aura pas 100% d’unité mais nous devons faire le maximum parce qu’en démocratie, il faut une opposition et une majorité. Et ça c’est quand les droits démocratiques sont exercés. Aujourd’hui, si nous ne prenions garde, ce droit démocratique pourrait être menacé. C’est vrai qu’en 1968 un coup d’Etat a été fait. Il était prévu qu’il dure pour 6 mois. Après un an, il a duré près de 23 ans. Il est hors de question que cela se reproduise dans ce pays. Nous ne pourrons jamais l’accepter » a dit Tièman Hubert Coulibaly qui rappelle qu’il est un ancien ministre de la défense. Et en tant que tel, dit- il « J’ai une relation spéciale avec l’armée. Je veux dire ici que j’aime l’armée. J’ai souvent dit que mon cœur bat pour l’armée du Mali. Et c’est la vérité ;
mais l’armée du Mali dans son rôle pour le Mali. Je ne suis pas d’accord que quoi que ce soit puisse venir prendre la place de notre armée sous quelque prétexte que ce soit. Il y a des pays qui sont tombés très bas et qui ont pu se relever parce qu’en effet, les forces essentielles celles qui étaient capables de faire bouger les lignes, ont réussi à se mettre ensemble. Nous devons faire des efforts pour reconstruire l’armée et c’est la tâche de toute une génération. Ça ne se fera pas en 5 jours ou 5 ans c’est une longue tâche. Je le dis ici, sans complexe et je suis prêt à participer à n’importe quel débat pour parler de l’armée et pour parler de ce que moi-même j’ai fait en tant que ministre de la défense, sans aucun complexe ».
Arrêter avec l’ethnicisation du débat politique…
Tièman Hubert Coulibaly a en profité pour mettre en garde ceux et celles qui le traitent de traite et de non patriote sur le seul fait qu’il ne partage pas la même approche qu’eux. « Le règne du mensonge ne dure jamais. Beaucoup de gens disent assez de choses parce qu’ils ne savent pas et se trompent et ne savent pas qu’eux- mêmes n’ont pas compris.
La posture qui est la mienne est que nos actions politiques doivent concourir à faire de notre système de défense un système de défense efficace capable de reconquérir notre indépendance et notre souveraineté dans un Mali uni. Regarder, aujourd’hui un débat politique dominé par des questions ethniques. Qui eût cru qu’au Mali
nous en arriverions à ce genre de considération. Je vous dis que ce débat aujourd’hui domine le paradigme de notre pratique politique. Nous devons arrêter ça. Comment peut-on simplement sur la base d’une différence d’approche, simplement parce que je ne suis pas d’accord avec votre point de vue, que vous décidez que je ne suis pas patriote et pire que je suis un traitre à la nation ».
Des mises en garde pour préserver l’unité et la cohésion sociale.
« Je voudrais m’adresser ainsi à ceux qui tiennent ce genre de discours, qui l’on tenu il y a quelques jours parce que nous avons mis en place un cadre d’échange des partis politiques, pour aider à la réussite de la transition. Nous avions dit que nous ne sommes pas d’accord avec des positions du Premier ministre et ses projets. Nous avons dit que nous ne sommes pas d’accord mais que nous voulons rencontrer le président de la transition afin de discuter et de chercher ensemble les points
d’équilibre. C’est comme ça qu’un communiqué est commis qui nous fait passer pour des traitres à la nation. Ce n’est pas acceptable, ce n’est pas bien dans un tel contexte. Il faut accepter votre contradicteur pour le recevoir, parler avec lui. Vous ne devez pas l’appeler, l’installer dans une salle lui tenir des propos comminatoires, remplir la salle de vos militants afin de le huer avant qu’il prenne la parole ou d’applaudir à tout rompre quand vous parlez. Nous savons tous faire ce genre de manipulation. Le Mali n’a pas besoin de ça aujourd’hui. Je m’adresse à ceux qui ont fait ce communiqué et qui nous font passer pour des traitres à la nation ou des apatrides, en leur disant que nous les considérons comme des frères et qu’ils nous accueillent en frères peut être en frères qui ne sont pas d’accord mais en frères. Je ne me lasserais jamais de discuter avec celui qui n’est pas d’accord avec moi. Ceux qui ne sont pas capables de faire ça, n’ont rien à faire dans la politique. Ceux qui ne sont pas capables d’entendre un point de vue différent, d’accepter l’existence d’un élément diffèrent n’ont rien à faire en politique » et de faire des mises en garde : « Et ceux qui pensent que
nous sommes minoritaires, nous pourrions leur démontrer le contraire. Qu’ils fassent attention. Si la rue se rempli, si la clameur ne cesse de monter, un jour la vague va vous submerger. L’échec réside dans la violation des règles et je mets en garde les dirigeants que les règles finissent toujours par se venger. Je dis cela pour m’adresser aux auteurs de ce communiqué qui veulent nous faire passer pour des traitres à la nation. Je leur demande de faire attention, d’écouter la raison pour que nous puissions nous donner la chance de réussir au Mali d’aujourd’hui, au Mali de demain surtout. »
Ce discours rempli d’enseignement va-t-il tomber dans l’oreille d’un sourd ? Le colonel Assimi Goita, président de la Transition doit écouter les murmures autour de lui et faire attention au « griotisme politique » qui consiste à dire au chef que tout est bien alors que c’est le contraire.
El hadj Tiémoko Traoré
Source : Le Pouce