Sur le papier, l’accord récemment conclu reste très modeste: Moscou, qui a déjà fait don au pays de deux hélicoptères d’attaque MI-35 en 2017, compte vendre deux autres appareils à Bamako et lui fournir une assistance technique.
Et, selon l’une de ces sources basée au Sahel, « ils vont arriver, ça y est », la décision d’implanter une unité Wagner au Mali ayant, d’après elle, été entérinée lors du premier sommet Russie-Afrique à Sotchi, en octobre dernier.
Ce groupe, avec qui Moscou dément tout lien, fournit des services de maintenance d’équipements militaires, entre autres activités. Ils ont été aperçus ailleurs en Afrique: en Libye, on les dit alliés au maréchal Haftar. Dans le nord du Mozambique, ils combattraient avec l’armée une rébellion jihadiste et des médias occidentaux ont fait état d’une présence à Madagascar et au Soudan.
« On ne va pas mettre tout le Mali dans un seul sac et croiser les bras », a-t-il fait valoir pour justifier la conclusion de partenariats d’assistance militaire à la fois avec Paris et Moscou.
Au delà de la sphère sécuritaire, l’agence russe d’information Sputnik a proposé un partenariat aux organisateurs du Forum de Bamako, rassemblement international de décideurs en février, selon deux sources.
– Méfiance –
Moscou, qui a également signé un accord de coopération avec le Burkina voisin en août 2018 et doit lui livrer deux hélicoptères, met ainsi un petit pied dans la porte en Afrique de l’Ouest francophone, dont il était quasi-absent jusqu’ici.
Côté français, on met en garde contre une surinterprétation des liens ténus retissés entre Bamako et Moscou, qui relèveraient plutôt de l’affichage.
Au Mali, « on n’est pas du tout sur l’ampleur de l’implantation russe dans d’autres pays comme la RCA », abonde une source diplomatique occidentale à Bamako. Début 2018, l’arrivée d’armes et de dizaines de « conseillers militaires » russes en Centrafrique avait permis à la Russie de faire un spectaculaire retour sur le théâtre africain, agrémenté d’une violente campagne de désinformation anti-française.
Cela n’empêche pas une forme de méfiance, au moment même où le sentiment anti-français se fait de plus en plus sonore dans les rues de Bamako.
« Nous soupçonnons les Russes d’encourager le sentiment anti-français » dans la bande sahélo-saharienne où sont déployés les militaires français, glisse un haut gradé.
Sur la scène politique interne, certains groupes d’opposition maliens militent depuis longtemps contre la présence de l’ancienne puissance coloniale et en faveur d’un rapprochement avec Moscou. Ce militantisme pro-russe est notamment porté par le « groupe des patriotes du Mali », une organisation de la société civile dont la page Facebook est sertie d’une photo de Vladimir Poutine.
Questionnée début novembre à Bamako sur la coopération russo-malienne, la ministre française des Armées Florence Parly a prudemment salué l’engagement de Moscou tout en s’interrogeant à demi-mot sur ses motivations profondes.
« La France est prête à collaborer avec tous ceux qui souhaitent continuer à l’émergence de la paix et de la sécurité. Évidemment il faut que ce soit un engagement de bonne foi, mais je n’ai pas de commentaire à faire là-dessus », a-t-elle déclaré.
Dans un jeu d’influence, Moscou se réserve-t-il la possibilité de souffler sur les braises pour porter atteinte aux intérêts français? Un tel comportement n’est pas à exclure, préviennent certains observateurs.
« Il faut tenir compte de ce facteur: même avec des moyens limités, les Russes peuvent exercer un vrai pouvoir de nuisance si on les embête », analyse un expert
Source : AFP