Le Mouvement du 5 juin, Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) et le Comité national pour le Salut du peuple, deux acteurs majeurs, du coup d’État du 18 août 2020, se sont rencontrés dans la nuit du samedi au dimanche à Kati. L’objectif de la rencontre, qui était de dissiper les malentendus, a été l’occasion pour le M5 de remettre son document de proposition à la junte. Selon nos conifères de RFI qui ont affirmé avoir pris connaissance de son contenu, le M5 propose une transition dirigée par civil.
Se considérant comme l’acteur majeur du coup d’État contre le président IBK, des membres du Mouvement du 5 juin, d’un ton de colère et d’indignation, sont sortis de leur silence pour décrier la conduite des militaires pour la mise en place d’une transition et de sa gestion. Parce que la démarche d’inclusion prônée par les soldats mutins n’est pas partagée par le M5. Celui-ci, est dans la dynamique d’une transition qui ne sera gérée qu’entre eux et le CNSP. Le coup de gueule de Issa Kaou N’DJIM après la cérémonie d’hommage aux victimes du 10, 11 et 12 juillet dernier et le refus du M5 de prendre part à la rencontre entre le CNSP et les forces vives de la nation qui a été reportée sine die attestent le malaise entre les deux acteurs majeurs du coup d’État.
En effet, les deux parties sont divisées par rapport à la notion du changement et le nouveau départ pour le Mali. Pour le M5, ceux-là qui sont restés avec IBK jusqu’à ses derniers jours ne doivent pas être sollicités pour la mise en place de la transition et de sa gestion. Cette responsabilité doit être dévolue uniquement au M5 et au CNSP. En somme, les responsables du mouvement de contestation veulent une justice de vainqueurs. Après la bataille réussie contre IBK, ils veulent être les privilégiés du CNSP pour la gestion de la transition.
En revanche, la démarche des soldats mutins est d’aller à une gestion concertée avec l’ensemble des forces vives de la nation sans aucune exclusion.
« On n’a aucun lien particulier avec le M5. On va travailler avec l’ensemble des Maliens », avait déclaré le porte-parole de la junte, Ismaël WAGUIE, lors d’un entretien avec nos confères d’Africable. Le CNSP compte bien évidemment sur les conseils de l’ancienne classe politique, mais les militaires sont résolus à faire en sorte qu’une nouvelle génération dirige la Transition. Réussiront-ils à résister à l’assaut de la vieille garde politique qui utilise le M5-RFP pour s’imposer ?
Donc, la réunion de ce 29 août entre le M5-RFP et les militaires du CNSP, à Kati, était placée sous le double saut de dissiper les malentendus et de clarifier les positions. Cette nuit, la forte délégation conduite par Choguel Kokalla MAIGA comprenait en occurrence l’ancien Premier ministre Modibo SIDIBE ; la présidente des femmes du M5 ; Issa Kaou DJIIM coordinateur de la CMAS, Amadou Dounga MAIGA, chargé de communication de la CMAS.
Dans la garnison de Kati où ils ont été reçus par le Colonel Malick DIAW, les échanges ont porté tout naturellement sur la gestion de transition, selon plusieurs sources. D’entrée de jeu, selon une source, le CNSP a refusé la surmédiatisation de la rencontre en demandant à la presse de rester à l’extérieur. Pour la même source, les militaires auraient indiqué qu’ils veulent compter avec tous les Maliens et pas seulement un groupe. « Nous avons voulu leur rendre leur dû en allant jusque sur le lieu du meeting à la place de l’indépendance, mais on ne peut pas faire plus », ajoute-t-il.
Après des discussions et échanges pendant près de deux heures, le porte-parole du M5-RFP, Choguel Kokalla MAIGA, a accordé des interviews à la presse. L’ancien ministre a précisé que l’un des objectifs de la rencontre était de clarifier le type de rapport qui devrait lier le M5 au CNSP étant entendu, selon lui, que ce sont ces deux mouvements qui constituent les forces du changement.
« C’est l’organe politique qui a opéré le changement le 18 août 2020. Le CNSP a parachevé la lutte héroïque du peuple malien porté par le M5-RFP. Donc, ce sont les deux acteurs majeurs du changement. Naturellement, ces deux acteurs doivent convenir, harmoniser leur position pour d’avis sur le sens que nous devons donner au changement », a rappelé M. Choguel Kokalla MAIGA.
Le porte-parole a déclaré avoir attiré l’attention des militaires sur l’attitude des forces qui voulaient pas le changement, les partisans de l’ancien régime : « Nous sommes limités à attirer l’attention du CNSP sur le fait que tout le monde ne donne pas le même sens au changement au Mali. Nous avons vu ici des Maliens de tout bord, des partis politiques, des associations confessionnelles, des syndicats, des ONG se retrouver pour demander le changement. C’est l’ensemble de ces organisations qui sont au sein du M5. Nous avons, de l’autre côté, les forces qui ne voulaient du changement qui sont venus envahir la cour du CNSP. Ils ont été également remplir la salle du CICB à la première heure pour venir jouer à la quantité », a critiqué M. MAIGA.
Pour lui, le changement doit être d’abord une question de qualité, un état d’esprit en prenant en compte l’aspiration du peuple. Qu’est-ce que nous voulons changer, de quoi nous ne voulons plus sont d’après Choguel les points d’interrogation à répondre. Et en la matière, les positions du M5 sont les mêmes. Elles n’ont pas changé. Au contraire, elles ont été d’ailleurs réaffirmées au CNSP.
Et comment aboutir à cela, le porte-parole du M5 a affirmé avoir remis aux militaires leur document de proposition sur la transition. Il détermine les articulations, définit les rôles des organes de la transition, a-t-il précisé. Quelle transition, quelle orientation, quel organe de la transition et l’articulation entre tous ces organes sont entre autres des aspects qui y sont abordés. Dans tous les cas, à comprendre Choguel, la transition doit être gérée par les acteurs qui se sont mobilisés pour le changement.
Quant au choisi du président de la transition, le M5 ne souhaite pas que sa victoire soit volée par la junte. Puisqu’elle est venue parachevée une lutte. Ce faisant, il appelle le CNSP à faire attention aux notes venant de certains politiques leur demandant de diriger la transition.
« Nous avons vu des forces qui ne voulaient du changement venir au CNSP qu’il faut que les militaires gardent le pouvoir qu’il ne faut pas donner le pouvoir aux civils. Ces forces sont devenues des experts qui produisent des notes, des schémas de transition. Nous avons dit au CNSP d’être vigilants qu’il ne faut pas qu’on se trompe de partenaires, ni d’alliés, ni de combat, ni de sens à donner à l’action des uns et des autres. Je pense qu’on s’est bien compris sur ce plan », a déclaré Choguel Kokalla MAIGA.
Par ailleurs, l’on apprend des confrères de RFI, qui affirment avoir pris connaissance du document du M5, remis à la junte, que le mouvement de contestation contre le régime de l’ex-président IBK, propose une transition de 12 mois minimum. Aussi, le M5-RFP souhaite-t-il que la transition soit gérée par un civil.
Par Sikou BAH
Source : Info-Matin