Edito : Transition au Mali, un exécutif à trois têtes

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Le président de transition, Mali Bah Ndaw, lors de sa cérémonie d'assermentation au CICB, à Bamako le 25 septembre 2020.
Le président de transition, Mali Bah Ndaw, lors de sa cérémonie d'assermentation au CICB, à Bamako le 25 septembre 2020.

Le top départ de la troisième transition au Mali a été donné le vendredi 25 septembre 2020 par l’investiture de son Président et de son vice-président au Centre International de Conférence de Bamako, CICB.

Ce qui reste à faire après la double investiture est  le nom du futur Premier ministre. Quand nous mettions sous presse la troisième tête de l’exécutif n’était pas encore connue. Qu’à cela ne tienne, nous assisterons désormais au Mali à un exécutif à trois têtes pour conduire une transition du 18 mois. « Ce tricéphalisme » à la tête de l’exécutif,  au lieu d’être un atout pour la bonne gestion de la transition ne va-t-il pas être un handicap ? Le risque de conflits de compétence ou d’intérêt n’est-il pas grand ? Le vice-président Goita, arme au poing et soutenu par ses frères d’armes, ne soumettrait-il pas le Président Bah N’Daou à une pression telle qu’il finira par démissionner, pour ensuite prendre le pouvoir conformément à la fameuse charte de la transition ? L’exigence de la CEDEAO de ne point mentionner dans la charte que le vice-président remplacerait le Président en cas d’empêchement ou de vacance du pouvoir ne doit-t-elle  pas être prise en compte par le CNSP ?Que dire du Premier ministre qui est lui aussi un des pans importants de l’exécutif en tant que chef de l’administration ?

Cette série de questions vaut son pesant d’or, surtout quand on sait que les militaires n’ont jamais caché leur volonté de diriger la transition.Ils resteront aux aguets et n’hésiteront pas un seul instant à bondir sur la toute première faille du Président de la Transition pour s’accaparer de nouveau du pouvoir. Il revient aux forces démocratiques nationales, aux organisations sous régionales, africaines et internationales de ne nullement tergiverser quant au respect des principes sacrosaints de la gestion du pays par les civils. La CEDEAO, fidèle à sa charte de démocratie et de bonne gouvernance n’acceptera  de lever les sanctions qu’après la satisfaction de ses recommandations par la junte. Elle doit surveiller la transition malienne comme du lait sur feu afin qu’elle ne dérape pas ou qu’elle ne soit prise en otage par un groupuscule armé.

Le Président de la Transition, le colonel Major à la retraite Bah N’Daou, aura sans nul doute du pain sur la planche. A en juger par son discours d’investiture et surtout par les grandes priorités auxquelles il compte s’atteler, on peut déjà lui prêter le bénéfice de la bonne intention, mais sa tâche est loin d’être facile.  Il aura en face de lui non seulement ceux qui sont réfractaires au changement, les nombreux frustrés du M5 RFP, mais aussi et surtout ceux qui ont pillé les deniers publics. Il sera également buté aux dures réalités du terrain politico-socio-économique, avec les différentes revendications corporatistes et aux réformes institutionnelles  majeures indispensables pour la bonne mise en route de notre démocratie chancelante depuis 1992. C’est pourquoi le nouveau Président de la transition doit avoir un soutien populaire fort pour légitimer son pouvoir et pour ne pas être très vulnérable. Le peuple doit être son seul support, son dernier rempart, sa dernière digue contre toute tentative de sabotage de ses actions ou de renversement de son pouvoir

En somme, le coup d’Etat du 18 Août est le  quatrième pour une jeune République comme celle du Mali, qui n’a que 60 ans. N’est-il pas temps d’en mettre un terme en jetant les bases solides, les fondements consistants de notre démocratie ?La transition qui vient de débuter ce 25 septembre ne pourrait être  la dernière que si chaque malienne et chaque malien change de comportement

Youssouf Sissoko

Source : Inf@sept

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