Il n’est pas objectif d’entretenir certains amalgames comme ceux autour de la dissolution récente de la CENI qui semble faire l’effet d’une tempête dans un verre d’eau.
Le Décret n°0003/PT-RM du 8 janvier 2021 portant abrogation du Décret n°2017-0214/P-RM du 13 mars 2013 portant nomination des membres de la CENI est parfaitement légitime en tant qu’acte de rétablissement de la légalité au sein de cette institution. Une institution hors la loi dont le mandat légal des membres avait par deux fois, pris fin depuis belle lurette et qui continuaient malgré tout, et en toute connaissance de cause, à squatter les locaux de l’institution et à agir impunément en son nom par pure usurpation de fonction.
Que dit la loi électorale en ses articles 17 et 18 que le décret de dissolution ne fait que rétablir ?
Que « Le mandat de la C.E.N.I. prend fin trois (03) mois au plus après la proclamation définitive des résultats du référendum et des élections générales ».
Qu’« à la fin de son mandat, la CENI adresse un rapport au Président de la République ».
Que « ce rapport est publié au Journal Officiel dans un délai maximum de trois (03) mois ».
Qu’« à la fin du mandat de la CENI, ses archives, documents et matériels sont transférés au ministère chargé de l’Administration Territoriale ».
Que « ces archives et documents seront mis à la disposition de la nouvelle CENI qui sera installée ».
POURQUOI LA CLASSE POLITIQUE EST RESTÉE INDIFFÉRENTE FACE A LA DOUBLE EXPIRATION DE MANDAT DE LA CENI INTERVENUE LE 18 NOVEMBRE 2018 ET LE 31 JUILLET 2020 ?
C’est en violation flagrante des articles 17 et 18 de la loi électorale que le régime du Président IBK a artificiellement entretenue la CENI du 13 mars 2013 avec la bénédiction complice de l’ensemble de la classe politique qui a préféré sacrifier la légalité républicaine sur l’autel des intérêts partisans.
La CENI mise en place par le Décret n°2017-0214/P-RM du 13 mars 2013 avait pour mission d’assurer la supervision et le suivi de la Présidentielle de 2018 dont les résultats définitifs ont été proclamés le 20 août 2018, ouvrant ainsi le processus de déguerpissement des membres devant avoir lieu dans un délai maximum de trois (03) mois.
Dans l’indifférence générale, et au mépris de ce délai légal de fin de son mandat, la CENI illégale depuis le 18 novembre 2018 est restée en fonction (1) an et (6) mois, jusqu’aux dernières législatives du 29 mars 2020 qu’elle n’aurait jamais dû superviser.
Mais le comble est que cette CENI illégale, déjà disqualifier à superviser les législatives du 29 mars 2020, va une fois de plus se maintenir au-delà des trois (03) impartis pour déguerpir.
Les résultats définitifs du 2ème tour des législatives de 2020 ont été proclamés le 30 avril 2020. Par conséquent, le mandat de la CENI illégale a de nouveau pris fin le 31 juillet 2020, c’est-à-dire dans le délai maximum de trois (03) mois après la proclamation définitive des résultats des législatives.
Dans l’esprit de la loi électorale, il s’agit bien d’une fin de mandat de plein droit qui n’a donc pu survivre que par la violation passive du régime de IBK protégée par le silence complice des autres acteurs électoraux.
Le Décret abrogatif n°0003/PT-RM du 8 janvier 2021 délivre en quelque sorte la CENI condamnée depuis le 18 novembre 2018 à la peine d’illégalité qu’elle n’avait toujours pas fini de purger. Il y va de sa crédibilité institutionnelle. Il faut s’en réjouir. Il faut aussi préciser que le fait de s’en réjouir ne préjuge en rien de ce qui adviendrait de sa reconstitution future.
Dr Brahima FOMBA, Université des Sciences
Juridiques et Politiques de Bamako (USJP)
Source : L’Aube