26 mars 1991-26 mars 2022 ! Il y a 31 ans que l’armée malienne, sous la conduite du Lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré, parachevait une insurrection populaire en mettant fin au régime civilo-militaire du général Moussa Traoré. Ce qui a ouvert la voie à la démocratie après vingt trois (23) ans de règne du CMLN-UDPM.
En 31 ans, le processus démocratique a connu deux ruptures de la légalité constitutionnelle avec l’irruption de l’armée sur la scène politique. Une alternance pacifique du pouvoir à travers le passage du témoin entre Alpha Oumar Konaré et le général Amadou Toumani Touré en 2002. A l’exception du Président Konaré, aucun chef d’Etat démocratiquement élu n’est arrivé au bout de ses dix ans.
L’état dans lequel se trouve le Mali n’est pas reluisant. Les progrès enregistrés ne sont pas à la hauteur des attentes des populations. A ce niveau, l’échec de ceux qui ont tenu le gouvernail du pays ne souffre d’aucune ambiguïté. Lisez plutôt Issa N’Diaye, professeur de philosophie, citoyen engagé dans sa tribune « Faut-il désespérer du Mali d’IBK ? » en mai 2014 : « La “démocratie” a fini par faire pire que la dictature, surtout au niveau de la qualité des ressources humaines. Elle a injecté sur la scène politique toutes sortes de gens, parfois de véritables voyous. Les éléments les plus sains ont fini par être, presque tous, marginalisés au profit d’une génération spontanée de politiciens sans foi ni loi ».
Lors de son discours d’hommage à Soumeylou Boubèye Maïga, décédé le 21 mars dernier en détention provisoire, Tiébilé Dramé déclarait : « Il nous faut assumer nos erreurs et nos fautes et ne pas laisser à d’autres, trop mal placés, le soin de l’inquisition. Ne pas raser les murs, assumer le bilan, rassembler tous ceux qui se reconnaissent dans les idéaux et les acquis de mars, telles sont les tâches aujourd’hui et maintenant, demain et après-demain ! ».
Pour l’ancien ministre de la justice, Malick Coulibaly, « les soubresauts du processus démocratique ne doivent pas occulter la lutte héroïque du Peuple malien et le sacrifice de nos martyrs de mars 1991. Œuvrons à raffermir la paix et la cohésion sociale dans un Mali uni et démocratique ».
Les erreurs et errements d’une certaine élite dirigeante ne doivent nullement conduire à mettre en cause la démocratie. Et malheureusement depuis les événements du 18 août 2020, règne une atmosphère de confusionnisme avec des propos visant à confondre les comportements déviants de certains acteurs politiques et les valeurs démocratiques. La haine et l’intolérance ont envahi l’espace public, empêchant tout débat contradictoire. La corruption, le népotisme, le clientélisme et d’autres vices aggravés par excellence après les événements de mars 1991 ne sont encouragés par aucune démocratie. L’impunité, le non-respect des lois par ceux qui se sentent impuissants ou forts de leur pouvoir ou leur fortune, la mauvaise distribution de la justice qui gangrènent la société malienne ne sont pas des valeurs démocratiques.
La démocratie est en danger. Les acteurs politiques, sans discernement, sont condamnés par une frange importante de l’opinion publique. Dans ce jugement sans circonstances atténuantes, le tribunal populaire ne pipe aucun mot de l’état de putréfaction de « l’Homme malien ». Le temps est venu pour le « Malien » de se remettre en cause. Il faut formater le logiciel « Malien » pour l’avènement d’un citoyen modèle plus regardant sur la défense de l’intérêt collectif.
Par Chiaka Doumbia
Source : Le Challenger