Le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, a reconnu officiellement le 10 février 2020 que le gouvernement du Mali est disposé à dialoguer avec Iyad Ag Aghaly et Amadou Kouffa. C’était à Addis-Abeba dans une interview accordée à France 24 et RFI en marge du 33ème Sommet de l’Union Africaine.
C’est la première fois que le président IBK évoque publiquement sa disponibilité et celle de son gouvernement à tendre la main aux chefs djihadistes. IBK a cité nommément Iyad et Kouffa. Il a eu quelques mots aimables à l’endroit du chef de Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans en rappelant quelques souvenirs de Koulouba au moment, où ils étaient tous conseillers du président Alpha Oumar Konaré.
Il y a quelques semaines, le Haut représentant du président de la République pour les régions du Centre, Pr Dioncounda Traoré, a déclaré avoir envoyé des émissaires à Iyad et Amadou. Le président de la Transition se dit prêt à aller à la rencontre de deux chefs du Gsim qui revendiquent des opérations meurtrières contre les Forces armées de défense et de sécurité du Mali.
Même si le revirement spectaculaire pourrait désorienter plus d’un notamment certains partenaires occidentaux, le président IBK fait preuve de réalisme. Deux pays voisins du Mali, la Mauritanie et l’Algérie, ne seraient pas aussi hostiles à un éventuel dialogue avec les «djihadiste». La Mauritanie a une expérience en la matière. De même que l’Algérie. Ces pays ont la particularité de connaître, à des échelles différentes, les années noires du terrorisme.
De nombreux leaders de la Coordination des mouvements de l’Azawad (Cma) et la Plateforme des mouvements du 14 juin ne sont pas des ennemis jurés d’Iyad. Le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (Hcua), la composante la plus importante de la Cma, est un résidu du mouvement djihadiste Ansardine. Les troupes de la Cma sont rarement prises pour cible par les groupes djihadistes. Contrairement à une opinion largement répandue, Iyad Ag Ghaly et le général Gamou ont certes des différends mais, ils sont loin d’être des ennemis jurés.
Le temps est le meilleur juge, nous enseigne un adage populaire. Le président IBK donne finalement raison à tous ceux qui avaient suggéré ou entamé une telle démarche, des années plus tôt. Sur ce registre, il faut saluer la clairvoyance de l’ancien Premier ministre Abdoulaye Idrissa Maïga, qui avait perçu très tôt la nécessité d’explorer d’autres voies que celles jusque-là, préconisées par certains partenaires. Il n’a pas été compris à l’époque. Plus grave son émissaire, à savoir l’Imam Mahmoud Dicko, a été traîné dans la boue accusé de tous les péchés d’Israël.
Après l’annonce du président de la République et son Haut représentant pour les régions du Centre, nul doute que c’est le plus dur qui commence à présent. Il ne faut pas croire que cette annonce de dialogue va mettre fin aux attaques contre les Forces armées de défense et de sécurité. Il ne faut pas aussi croire qu’elle va aboutir du jour au lendemain à une cessation des hostilités. Pour rencontrer Iyad Ag Aghaly et Amadou Kouffa, traqués dans leurs derniers retranchements par les moyens humains et technologies de dernière génération, il faut du temps. Il faut aussi de la patience.
Les actions en cours permettront à coup sûr de déraciner localement un lot important de combattants djihadistes. Ceux qui refuseront de prendre la main tendue de la République seront alors combattus et chassés du territoire national. Du moins, nous l’espérons……
Chiaka Doumbia
Source : Le Challenger