Les autorités compétentes, en concertation avec les acteurs des deux filières, sont à pied d’œuvre pour prévenir tout risque de pénurie susceptible de déclencher une tendance haussière
Nos autorités semblent avoir une conscience claire des enjeux liés à une hausse des prix de la farine du blé et du ciment. Elles multiplient les démarches inclusives visant à explorer toutes les pistes de solutions possibles pour les maintenir à la portée du Malien lambda. Visiblement alerte, le ministre de l’Industrie et du Commerce a initié des rencontres visant à «anticiper» une hausse éventuelle des prix des denrées de consommation. Mahmoud Ould Mohamed a, en fin de semaine dernière, consulté les acteurs de la filière blé-farine-pain. Objectifs : «sécuriser les stocks et éviter toutes formes de rétention ou de pénurie».
Les prix de la farine boulangère et du pain restent plafonnés respectivement à 22.000 Fcfa le sac de 50 kg et 250 Fcfa la baguette de 250 g. Cela grâce à la signature d’un protocole d’accord entre le gouvernement et les acteurs de la filière. La farine de blé a été, la semaine dernière, cédée au détail entre 400 et 500 Fcfa le kg. Ce qui correspond à un prix moyen estimé à 439 Fcfa, contre 386 Fcfa le kg l’année dernière à la même période, selon des notes du département en charge du Commerce.
Cette hausse survient dans un contexte de conflit entre la Russie et l’Ukraine. Les deux pays européens sont respectivement 2è et 4è producteurs de blé soit 29% de la production mondiale et 40% du commerce mondial de blé. Une guerre entre Russes et Ukrainiens suffit pour faire fléchir la courbe des prix vers le haut.
Ainsi, le cours du blé a gagné du terrain sur les places boursières passant de 269,25 euros (environ 172.413 Fcfa) la tonne au cours du mois de février dernier, à 316 euros la tonne à la date du 24 février (début de la guerre), avant de redescendre à 290 euros la tonne. Le cours devrait encore grimper pour atteindre plus de 400 euros la tonne (environ 260.000 Fcfa), selon certaines prédictions.
60.000 TONNES- Cette situation risque d’impacter les prix sur le marché national au regard de l’importance de cette matière dans la consommation quotidienne du Malien. En la matière, le besoin annuel de consommation nationale en farine boulangère produite à partir du blé tendre importé est estimé à environ 60.000 tonnes. La France est considérée comme le premier fournisseur du Mali en blé, suivie de la Russie, de l’Argentine et de l’Ukraine.
Les stocks de farine boulangère sur le territoire national s’élèvent à 19.764 tonnes. 7.798 tonnes sont disponibles au niveau des unités industrielles. Les 12.000 restants sont dans le circuit de distribution auprès des commerçants grossistes et demi-grossistes. Disponibles au niveau des pays de transit, 8.023 tonnes de blé attendent d’être évacuées. Au regard des stocks disponibles (environ 4 mois de consommation), la crise en Ukraine n’aura probablement pas un impact immédiat sur l’approvisionnement de notre pays, rassure la direction générale du commerce, de la consommation et de la concurrence.
Toutefois, pour prévenir tout risque de pénurie susceptible d’entraîner une hausse des prix, il urge de diversifier les sources d’approvisionnement du pays. Cela en accompagnant «nos industriels et minoteries à souscrire rapidement des contrats d’achat avec les négociants afin d’anticiper sur une probable augmentation des cours en prélude à la prochaine campagne de commercialisation du blé à partir du 2è semestre 2022». D’où la rencontre précitée ayant réuni les acteurs de la filière autour du ministre en charge du Commerce.
Consultation à la fin de laquelle il a été décidé, à court terme, de procéder à l’évaluation rapide des stocks au niveau des ports de transit et solliciter l’accompagnement des opérateurs économiques afin «d’éviter le dérapage des prix et la rupture des stocks». À moyen terme, il apparaît nécessaire de diversifier nos sources d’approvisionnement et accompagner nos unités industrielles dans la recherche de nouveaux partenaires commerciaux et des facilités de financement, ont prôné les participants. La solution la plus durable retenue étant de promouvoir la culture du blé au niveau national et la fabrication du pain à partir d’autres céréales.
50 CAMIONS DE KLINKER-Ce remède ultime devrait être injecté au secteur du ciment dont les prix grimpent face au moindre choc. En effet, la tonne de ciment est passée de 95.000 Fcfa à 120.000 Fcfa le lendemain de l’imposition, le 9 janvier dernier, de sanctions «illégales, injustes et illégitimes» au peuple malien par les chefs d’État de la Cedeao et de l’Uemoa.
Cette hausse serait consécutive, à croire les quincaillers, à la rupture de stocks, à l’augmentation des frais de manutention consécutive à l’embargo économique de ces institutions sous régionales, à l’incidence de la hausse du prix des papiers d’emballage et de certaines matières premières intervenant dans la production de ciment.
Concernant la rupture de matières premières entrant dans la fabrication du ciment, la douane malienne a récemment réceptionné plus de 50 camions de Klinker en provenance du Port de Conakry pour la production du ciment au Mali. Contactée, une source à la direction générale des douanes confirme cette information, rappelant qu’il y a «quelques jours des convois totalisant près de 300 camions ont emprunté le corridor Conakry-Bamako sans difficulté majeure». Les deux douanes ont créé les conditions nécessaires à cet effet, précise-t-elle.
La disponibilité du Klinker, «constituant du ciment obtenu par calcination d’un mélange d’acide silicique d’alumine, d’oxyde de fer et de chaux», pourrait être considérée comme un début de réponse aux préoccupations des producteurs nationaux de ciment.
Présentes à une rencontre entre le patron du Commerce et de l’Industrie et les acteurs du BTP, les trois usines de production de ciment opérationnelles sur le territoire national avaient sollicité l’accompagnement et le soutien du gouvernement pour les aider à faire baisser le prix.
Les consommateurs espèrent sur le respect strict des prix plafonds de ciment convenus. Les brigades de surveillance de la DGCC doivent sévir. Les premiers suspects étant sans doute les grossistes et les semi-grossistes. Ceux-ci détenant un monopole de fait de l’importation et de la distribution des produits sur le marché national.
Source : L’Essor