Le processus de sortie de crise au Mali ressemblerait à une série des tâtonnements dans laquelle on fait et défait des initiatives comme celles consistant à engager des pourparlers avec des jihadistes.
Dans un récent rapport sur la crise sécuritaire qui secoue le Mali depuis 2012, l’organisation International Crisis group préconise la nécessité de dialoguer avec les jihadistes maliens, en particulier avec la katiba d’Amadou Koufa en vue de pacifier le Centre du pays.
Interrogé par RFI sur cette piste de solution, le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Boubacar Alpha Bah s’est montré engagé dans la réflexion pour entamer ce dialogue afin d’accélérer le processus du retour de l’Administration dans les régions du centre du pays. Et d’affirmer que le dialogue avait été entamé au niveau des chefferies traditionnelles de la région de Mopti, qui « avaient pris langue » avec des acteurs extrémistes et qu’il faille les « formaliser » et leur donner le contenu souhaitable.
Or, ce n’est un secret pour personne que le Premier ministre Abdoulaye Idrissa Maïga avait initié ce type de discussions avec certains jihadistes tant dans le nord qu’au Centre du pays à travers ce qu’il avait appelé les « missions de bons offices » dirigées par l’Imam Mahmoud Dicko. Et ces missions ont été ensuite désavouées par le chef de l’Etat. Ce qui a, du reste, été l’un des éléments de discorde entre IBK et l’ex-président du Haut Conseil Islamique et l’ex-Premier ministre.
Dans cette affaire, le locataire du palais de Koulouba s’est montré laxiste et négligeant au point de donner l’impression plus tard qu’il n’était pas au courant du lancement des missions de prendre langue avec Iyad Ag Ghaly et Amadou Koufa. Pourtant, Abdoulaye Idrissa Maïga avait solennellement annoncé, lors de la présentation de sa déclara de politique générale à l’Assemblée nationale, que son gouvernement compte aller parler aux milieux extrémistes et jihadistes du centre et du septentrion du pays. Mais, comme sous une certaine pression de Paris, IBK a fait une volte-face en refusant la poursuite de ces contacts de discussions avec Bamako.
Par ailleurs, alors qu’il était l’un des opposants les plus virulents au pouvoir IBK, l’actuel ministre des Affaires étrangères, Tiébilé Dramé n’hésitait pas à réclamer que le pouvoir engage le dialogue avec les terroristes et jihadistes maliens. Mais, Paris se refusait systématiquement à cette option. L’on se pose alors la question de savoir si l’arrivée de Tiébilé Dramé à la tête de la diplomatie malienne a aidé à assouplir cette ligne de refus de se mettre autour d’une table avec les Iyad Ag Ghaly et Amadou Koufa. L’on peut le croire que lors de sa récente visite au Quai d’Orsay, le ministre Dramé s’est réjoui d’avoir eu « des échanges fructueux et francs » avec son homologue français, Jean-Yves Le Drian. Et cette évolution doit être liée au blocage observé depuis plusieurs semaines dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger : Point dans le processus du DDR, absence de l’Armée à Kidal, absence de l’Administration dans plusieurs zones du pays, des centaines d’écoles fermées, etc.
Un accord qui a suscité un incident récent contre le représentant de l’ex-rébellion, présent à la cérémonie de célébration de la journée de l’Afrique, où Tiébilé Dramé a dû sortir de ses gonds. «Mais l’accord d’Alger, c’est aussi le respect de l’unité nationale. C’est pourquoi je déplore, tout à l’heure, quand le chant du Mali était entonné, que le président en exercice de la CMA, mon frère Sidi Brahim Ould Sidati se lève avec du retard et ensuite croise les bras de façon désintéressée. L’hymne national du Mali, c’est le chant du Mali ! Il est souhaitable que tous les Maliens le respectent ».
Boubou SIDIBE