Devons-nous encore révéler ce qui est un constat pour tous les Maliens ? – Les actions et décisions prises par la classe dirigeante de notre pays au cours de ces dernières décennies ont affamé notre peuple, déplumé nos forces de défense et de sécurité, détruit notre tissu social et économique et mis notre pays dans le chaos actuel. Pourtant, notre histoire doit être un repère pour nous tous. Les réussites et échecs de nos ainés devraient pouvoir éclairer davantage le présent et l’avenir. Or, cette classe politique continue de faire payer à nos jeunes la disparition inexorable de nos repères et de nos valeurs ainsi que la lourde facture d’une gestion des affaires publiques calamiteuse depuis nombre d’années.
Cette caste politique qui en réalité méprise la décence fondamentale et les codes de la démocratie dont elle prêche hypocritement des louanges n’a jamais été une chance pour le Mali. Dans sa variante malienne, la démocratie n’est en fait qu’une contradiction du gouvernement du peuple. La classe politique sert davantage les intérêts des élites économiques. L’État lui-même a été réduit à une machine créatrice d’environnements favorables à la corruption. Les partis politiques sont davantage des machines de d’enrichissement illicites. Les députés ont oublié qu’ils doivent réellement représenter leurs électeurs. Les élections truquées sont légions et le doute a toujours été sur la légitimité de l’élection des maires, députés, et même des Présidents. Les Maliens ont enfin découvert la véritable nature de cette classe politique. Ce fut plus long qu’envisagé mais c’était inéluctable. Au Mali, on dit ”quand ça pourrit, ça se sent !”. A présent, aucune combine, aucune ressource n’empêcheront le peuple malien de surligner l’incompétence de cette classe d’hommes politiques et de la dénoncer en chœur. Cette caste politique n’est pas sensible au malheur public ; la politique est un art, pense-t-elle, et la politique spectacle, elle s’y connaît bien. C’est la démocratie selon ces politiques à plusieurs faces et sans conviction dont les Maliens connaissent, par le menu, les tartufferies, les implications désastreuses et les moindres fourberies.
Pour remédier à la situation catastrophique imposée à notre pays par ces ‘‘démocrates’’ et qui fort heureusement vient forclore cette période calamiteuse, nous devons surement faire face à nos responsabilités citoyennes en prenant part à l’écriture de notre destin collectif. En effet, les défis auxquels nous faisons face actuellement devraient être une grande opportunité pour nous d’apprendre davantage et de mieux préparer l’avenir. La crise économique, les grands défis sociaux qui traversent et fragilisent notre société́, sont autant de sujets vitaux qui réclament des réponses nouvelles et audacieuses.
L’HEURE EST GRAVE.
Face aux évènements en cours et à venir dans notre pays, les hommes politiques ont enseveli dans l’oubli la crise que nous vivons et se positionnent en s’enveloppant avec des mots comme la ‘‘démocratie’’, le ‘‘renouveau’’ ou encore la ‘‘refondation’’ à travers des discours démagogues, y compris ceux de la classe politique qui gouverna notre pays pendant des décennies. Faut-il en rire ou être écœuré ? Une chose est sure, nous sommes convaincus que la construction d’un nouveau modèle de croissance et la renaissance de l’idéal malien font partie des défis qui nous attendent. Pour nous, le débat est très simple. Nous sommes fiers de partager l’histoire de notre pays avec tous les maliens. Cependant, malgré l’obsession et la fixation de certains politiques sur nos thèmes, nous ne partageons pas forcément les mêmes idéologies ou la même vision pour notre pays avec ces regroupements politiques. Nonobstant, nous lutterons pour la cause malienne et œuvrerons toujours pour partager le même destin que tous les maliens.
Il nous appartient aujourd’hui, comme d’autres l’ont fait avant nous à travers l’œuvre de Kurukan Fuga, d’entreprendre la construction d’un projet politique et social ancré dans les valeurs qui sont les nôtres et suffisamment fort pour porter les permanences et les nécessaires changements. Nous savons cela comme étant une très simple vérité et nous devons avoir le courage de la dire : les maliens se sont toujours retrouvés autour des valeurs et les idées que nous avançons. En effet, ces valeurs et idées sont celles que les maliens ont toujours embrassées et partagées. Celles de la classe politique actuelle, imposées à notre pays depuis plus de trois décennies, ont échouées et trahies le peuple malien. Conséquemment, il devient urgent de changer de classe politique. Nous ne pouvons pas imaginer une politique différente avec la même classe politique. Force est de reconnaitre que beaucoup de leaders politiques se sont compromis avec cette classe politique au cours de ces dernières décennies et ils ont encore le toupet de vouloir donner des leçons et l’ambition de jouer à nouveau un rôle politique et économique majeur. Les Maliens n’ont surement pas grand-chose à attendre dans l’immédiat et dans l’urgence tant de ces leaders que la classe politique qu’ils représentent. Des gens qui disent tout et rien à la fois. Ils se contredisent à chaque instant dans leurs actes et verbiages. Ce qui est très grave pour des ‘leaders politiques’ ! Les Maliens voulaient simplement des dirigeants intègres et dignes de confiance capable de trouver des solutions à la crise profonde qui touche notre pays, mais ces dirigeants n’ont jamais pu être à la hauteur de leur fonction. Hélas plus écœurant encore, c’est d’écouter ces mêmes hommes politiques nous parler de ‘‘démocratie’’, ‘‘renouveau’’ ou de ‘‘refondation’’ âpres avoir passé des décennies à la commande d’un état essoufflé qui se cherche aujourd’hui. Les Maliens ne sont pas dupes. Ils sont aujourd’hui suffisamment édifiés quant aux responsabilités de la situation actuelle.
Pour ceux qui continuent à défendre cette classe politique ou les leaders issus en son sein, nous portons à votre connaissance qu’elle ne pourra jamais faire différemment ce qu’elle a déjà fait ou défait depuis plus de trente ans. Ils ont fait le peu du peu qu’ils pouvaient pour notre nation. En effet, depuis toujours, ces dirigeants peinent à trouver une issue heureuse à partir de laquelle notre pays pourrait trouver la capacité de chercher des conquêtes en lui-même, de valoriser ses atouts, de défendre ses valeurs, et jouer un rôle de valeur sur la scène internationale. Nous ne pouvons plus continuer à ignorer les causes de la crise que nous vivons. Nous subissons depuis plusieurs décennies des assauts constants contre nos valeurs socioculturelles, nos valeurs économiques, et nos religions. Les crises que nous vivons sont le résultat de choix faits par cette classe politique et ses leaders. Cette classe politique en est directement responsable et nous ne devons pas accepter qu’elle se dédouane en invoquant de quelconques raisons. Il devient urgent de mettre un terme à cette situation tragique que les Maliens subissent par l’incurie d’hommes politiques que nous ne savons plus comment qualifier hormis réitérer que les millions de Maliens ne pèsent pas lourd face à leurs intérêts et l’affirmation de leur ego. La stabilité du pays et le bien être des maliens sont les moindres de leur souci sauf lorsqu’ils peuvent fournir un prétexte pour détruire tout ce qui n’est pas suffisamment favorable à leurs intérêts. Il est grand temps d’arrêter l’hémorragie.
Leur modèle de démocratie abâtardie s’est essoufflé. Les rebellions, scandales politiques, financiers et militaires donnent l’impression profonde que notre façon de faire et de vivre ne convient plus. Il faut changer de logique. Les moments difficiles que nous vivons offrent à nous tous une occasion unique de remodeler les politiques de gouvernance à l’image de notre culture et de notre identité, d’en faire un véritable instrument de changement capable d’améliorer la vie des citoyens de notre Nation. Nous devons nous engager ensemble pour construire un projet de redressement national afin de recréer l’espoir et changer la vie.
Il se peut que nous ne fussions pas en mesure de contrôler les circonstances qui ont provoquées ces crises dans notre pays, mais nous devrons être en mesure de contrôler les réponses à ces circonstances. L’une des bonnes réponses à ces circonstances est de changer de logique et de refonder la classe politique. Nous ne pouvons préparer et protéger l’avenir qu’avec la mobilisation du peuple malien et de leaders visionnaires et ambitieux. Nos citoyens aspirent à des politiques tournées vers l’avenir et fondées sur une vision capable de porter leurs aspirations pour les cinquante années à venir et au-delà.
Le Mali fait face à un choix épique. Nous vivons des moments inédits qui seront consignés dans l’histoire. Au cours de ces dernières décennies, une grande partie de ce qui nous est cher a été foulée au pied – nos normes, nos valeurs, et mêmes nos lois. La réputation du Mali en tant que leader régional compétent en est détruite. Sans le changement nécessaire, l’ensemble des politiques mal réfléchies des leaders politiques incompétents et insouciants sera toujours une menace imminente pour la sécurité de notre nation et un sérieux danger pour sa survie. En effet, l’incompétence et la maladresse de ces politiques face aux problèmes de société ont quotidiennement des conséquences fatales sur nos populations et menacent notre pays dans son existence. Dans les mois à venir, les résultats de nos actions définiront notre pays pour la génération future. Mais avec votre participation massive au processus véritablement démocratique, nous pouvons remettre notre pays sur le devant de la scène. Nous ne devons plus continuer à ignorer les actions et politiques mal réfléchies de cette sulfureuse classe politique face aux crises qu’elle nous a imposées et que nous vivons amèrement. Mais il est aussi très important de comprendre que pour relever les défis de la crise multidimensionnelle et s’affirmer dans un monde en plein bouleversements géopolitiques, nous avons l’obligation morale et le devoir patriotique d’élaborer une stratégie commune basée sur des objectifs réellement nationaux prenant en compte les aspirations et les préoccupations de l’ensemble de notre peuple.
Cheick Boucadry Traore
Source : Le Républicain