Le gouvernement français continue à nier la frappe de Barkhane qui aurait ciblé des civils à Bounti, au Centre du Mali, malgré la publication des conclusions de l’enquête conduite par la division des droits de l’Homme de la MINUSMA. Un rapport qui confirme qu’au moins 19 civils ont été tués lors de cette frappe de l’armée française visant plutôt des hommes réunis dans le cadre d’un mariage que des terroristes.
Les éléments disponibles, qu’il s’agisse de l’analyse de la zone avant et après la frappe, comme de la robustesse du processus de ciblage, permettent d’exclure la possibilité d’un dommage collatéral », a rassuré l’État-major des Armées françaises dans un communiqué du 7 janvier. Ces observations auraient permis d’identifier « un groupe d’une quarantaine d’hommes adultes dans une zone isolée », précise l’État-major dans son communiqué avant de lever toute équivoque au sujet de cette frappe : « L’ensemble des éléments renseignement et temps réel ont alors permis de caractériser et d’identifier formellement ce groupe comme appartenant à un GAT ».
« Nous n’avons jamais caché quoi que ce soit »
Seulement, la France semble être la seule détentrice de ces éléments de précision qu’elle évoque pour nier toute possibilité de « bavure ». Dans son rapport du 31 mars 2021, la MINUSMA indique qu’« aucune information sur les éléments et renseignements probants dont disposait la Force Barkhane » ne lui a été communiquée. Pourquoi ces informations n’ont-elles donc pas été communiquées à cette équipe d’enquête de la MINUSMA ? Dans quel intérêt la France entretiendrait-elle le flou autour de cette affaire ?
Devant les députés français, le 12 janvier dernier, Florence Parly, ministre français des Armées, donnait pourtant cette assurance : «Nous n’avons jamais caché quoi que ce soit, nous respectons le droit de la guerre et le droit humanitaire international : tout est fait pour éviter les dommages collatéraux ».
« Il importe de faire la lumière sur tout cela »
Mme Parly prenait ces allégations comme « une forme de guerre informationnelle ». Mais aujourd’hui, ce n’est plus seulement les «réseaux sociaux » et « certains médias » qui font « état d’une “bavure” », mais plutôt une enquête menée par une équipe composée de quinze (15) chargés des droits de l’Homme, de deux (2) experts de la police scientifique des Nations Unies et de
deux (2) chargés de l’information publique d’une organisation mandatée par l’ONU. Aujourd’hui, pourrions-nous encore parler de «guerre informationnelle » ou de « désinformation » ? S’il y en a, qui en sont les responsables et qui en sont les victimes ?
Finalement, les citoyens maliens ne savent pas à quel saint se vouer dans cette affaire qui ressemble à un jeu de « ping-pong ». On a l’impression que tout le monde se dit se battre pour la vérité et la justice, contre la « désinformation », mais au fond chacun ne travaillerait qu’à maintenir les citoyens dans le flou.
Pour reprendre Drissa Traoré, porte-parole de la Coalition citoyenne pour le Sahel, « l’heure n’est pas à la remise en cause de ce rapport », mais plutôt à « l’ouverture d’une enquête judiciaire pour établir les faits et le cas échéant situer les responsabilités ». Dans tous les cas, « il importe de faire la lumière sur tout cela », comme l’avait laissé entendre la ministre des armées françaises.
Fousseni Togola
Source : Maliweb.net