La présidence de la Transition : Une fonction hyper politique

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© AFP - Michele Cattani Le président de transition malien, Bah Ndaw, et le colonel Goïta, chef de la junte au pouvoir depuis le putsch du 18 août, ont prêté serment devant la Cour suprême, le 25 septembre 2020, à Bamako
Le Président de la transition, chef de l'état Assimi Goita et l'ex président de la transition Bah n'daw (image d'archive)

D’après le Titre III, article 29  de la Constitution malienne de 1992, le président de la république est le Chef de l’Etat. Il est le gardien de la Constitution. Il incarne l’unité nationale. Il est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect des Traités et Accords Internationaux. Il veille au fonctionnement régulier des pouvoirs publics et assure la continuité de l’Etat.

C’est le président  qui nomme le Premier ministre et les autres membres du Gouvernement. Il peut les démettre de leurs fonctions. C’est le président de la république qui promulgue les lois votées par l’Assemblée nationale etc. C’est une fonction multiple que remplit un président de la république  élu au Mali. Mais actuellement, on est  en période de transition et la Constitution n’est pas suspendue. Elle a toujours cours aux côtés de la Charte de la Transition. Au regard de la Constitution de 1992, les fonctions  du président  de la république font  qu’il prend des décisions politiques : nomination du Premier ministre, ministres etc.

Le président  de la Transition doit  donc se raviser. Même  s’il n’est  pas issu  d’une élection présidentielle,  la fonction qu’il  occupe  est hyper  politique.  Elle demande  donc du discernement dans les prises de décision. Bah N’Daw  ne peut donc se  « mettre au-dessus de la mêlée ».  La fonction  présidentielle de Transition à lui confiée  demande, en plus d’une grande  sagesse et d’humilité, une bonne dose de  politique. A cet effet,  même  si Bah N’Daw  n’est pas un homme politique  ordinaire, en tant que  Chef de l’Etat malien, il  est désormais condamné à faire, sans être partisan, de la politique pour pouvoir gérer  le pays.

Le  Mali traverse, depuis 2012,  une crise multidimensionnelle. Durant  quatre mois, le pouvoir  du régime IBK  a été vivement combattu par des forces sociopolitiques qui l’ont mis à genou. Une junte militaire, le CNSP, est venue « parachever »  l’insurrection populaire pour  mettre fin à ce régime. Leur légitimé  des armes ne peut être supérieure à celle du peuple souverain.  Or, de  la façon où se passent les choses,  les militaires du CNSP sont en train de mépriser  le peuple (incarné par les organisations  politiques, syndicats et société civile) pour  s’accaparer  l’ensemble des pouvoirs de la Transition. C’est cela la  dure réalité du moment et elle est  très conflictuelle.

Le président de la Transition doit  savoir qu’il ne peut et doit dire  tout bonnement  que  « J’ai signé un décret et je m’en tiens à l’esprit de ce décret». Cette réponse  de Bah N’Daw,  à la question d’un confrère  relative au rejet par certains partis politiques de la clé de répartition et des modalités de désignation des membres du Conseil national de Transition (CNT), constitue  une fuite de responsabilité. Notre pays a plus que jamais besoin d’un président de la Transition qui sait manager son pays  et l’ensemble de ses acteurs politiques pour faire l’économie d’une nouvelle crise politique. En l’occurrence en période de Transition.

Le président de la Transition du Mali, compte tenu de cette situation politique fragile et l’immensité des tâches, doit  être  constamment  à l’écoute de tous les acteurs sociopolitiques et  des militaires du CNSP (désormais maîtres  du jeu politique par la force des armes) afin de pouvoir aplanir  leurs divergences. Pour  cela, Bah N’Daw  doit  comprendre  qu’il ne peut pas se contenter  de signer  systématiquement des décrets présidentiels qui engagent la vie de la nation sans  essayer  d’en mesurer  leur  impact.

Ce bon réflexe pour  évaluer  les conséquences  de tout  décret  avant  sa signature doit être le credo  de Bah N’Daw. Il aurait dû être animé d’un tel reflexe  lorsqu’il  signait  les deux derniers  décrets relatifs à la création  du Comité National de Transition (CNT). Tant il est évident  que ces deux décrets  sont  controversés que polémiques. Ils accordent à un seul homme, fut-il le président du CNSP, le droit de nommer tout  seul  les hommes et les femmes  qu’il faut pour siéger au CNT, l’organe législatif de la Transition. C’est arbitraire, antidémocratique et non consensuel.  Ces deux décrets  ne sont  malheureusement pas de nature à apaiser le climat sociopolitique  plus que délétère que vit  notre  pays.

En conséquence,  le président de la Transition doit absolument  s’évertuer  à  faire   dorénavant de la politique afin de prôner l’écoute et le consensus entre les composantes sociopolitiques du Mali et le CNSP. Sans cela, la Transition qu’il préside sera  indéniablement  tumultueuse. Et à l’heure du bilan, ce serait  hélas bien regrettable pour lui et le Mali !

Falaye Keïta

Source : Le Pélican

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