L’agenda «africain» du président Macron chamboulé par la crise

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Le président Français Emmanuel Macron lors d'une videoconférence avec des artistes, à l'Elysée, le 6 mais 2020. Ludovic MARIN / POOL / AFP
Le président Français Emmanuel Macron lors d'une videoconférence avec des artistes, à l'Elysée, le 6 mais 2020. Ludovic MARIN / POOL / AFP

Le sommet Afrique-France reporté, la saison Africa 2020 décalée, le déplacement du président en Afrique du Sud et en Angola remis à plus tard… la crise du Covid-19 a largement impacté le calendrier africain d’Emmanuel Macron, qui fête ce jeudi le 3e anniversaire de son accession à l’Élysée. Pas de quoi néanmoins remettre en cause la trajectoire engagée à Ouagadougou. « Sur les fondamentaux, on garde le cap », assurent à RFI les conseillers diplomatiques du président français.

Ce devait être l’année de l’Afrique en France. Tout avait été préparé en ce sens depuis de longs mois. Mais la crise du coronavirus est passée par là et l’Élysée a dû revoir une partie de sa stratégie. Si la saison culturelle Africa 2020 – qui devait initialement débuter le 1er juin – devrait être décalée de quelques mois et commencer avant la fin de l’année, le sommet Afrique-France – prévu du 4 au 6 juin à Bordeaux – n’est pas simplement reporté à 2021. En raison de la pandémie, « la teneur du projet » sera repensée, confie-t-on dans l’entourage du chef de l’État. Autre conséquence : le déplacement d’Emmanuel Macron en Afrique du Sud et Angola prévu pour la fin du mois de mai – et qui devait marquer une nouvelle étape de l’ouverture aux pays non francophones – est remis à plus tard.

Un cap maintenu mais des chantiers probablement retardés

Malgré ces impondérables, l’Élysée l’assure, il n’y aura « pas d’inflexion notable » sur la politique menée : « L’agenda de Ouagadougou reste la ligne directrice. » Sur tous les « fondamentaux », comme la fin annoncée du franc CFA, la restitution des biens culturels, l’ouverture des archives sur le Rwanda ou l’augmentation de l’aide publique au développement, le président entend « garder le cap ». Il compte également « accélérer sur certains marqueurs de la politique engagée », car la pandémie est venue conforter certains des choix opérés. Le rapprochement engagé avec plusieurs pays non francophones a porté ses fruits lors de l’initiative lancée pour lutter contre l’épidémie sur le continent. « Le président Kagame, le Premier ministre Abiy, le président Ramaphosa ont été des partenaires moteurs avec nous », explique l’un des conseillers d’Emmanuel Macron en référence au Rwanda, à l’Éthiopie et à l’Afrique du Sud. L’éducation et la santé, sur lesquelles la France s’est investie, ont également été « de bons marqueurs, de bonnes priorités, juge-t-on dans l’entourage du président, et il faut sans doute accélérer la manœuvre sur ces deux priorités ».

Si le cap est donc maintenu, la crise due au coronavirus devrait néanmoins retarder certains chantiers. Le chamboulement du calendrier législatif aura pour probable conséquence le report de la présentation et de l’examen de plusieurs textes très attendus. À quelle date sera ainsi soumis au conseil d’État puis au Parlement le projet de loi engageant la fin du franc CFA ? Quand sera présentée la loi de programmation sur le développement, qui doit notamment acter un recentrage de l’aide sur les pays sahéliens ? L’Élysée assure que ce dernier texte sera présenté « dans les semaines qui viennent ». Mais le passé pousse à la prudence : depuis février 2019, la présentation de ce projet de loi a été maintes fois repoussée. Quid enfin du projet de loi permettant la restitution des biens culturels ? Là non plus, aucune date n’est arrêtée. Si dans l’entourage du président, on estime que « le travail a été fait pour qu’une loi puisse être rapidement présentée au conseil des ministres », on admet aussi ne pas avoir de visibilité sur le nouveau calendrier législatif.

Vers l’annonce d’un maintien de Barkhane ?

Seul dossier, au final, à être peu impacté par la crise : la lutte contre le terrorisme. Malgré la pandémie, le sommet G5 de Nouakchott – qui doit se tenir les 29 et 30 juin prochains – devrait être maintenu. Comme il l’avait dit lui-même sur RFI le 15 avril et comme le confirme encore l’Élysée cette semaine, Emmanuel Macron a bien l’intention de s’y rendre afin de dresser un bilan des engagements pris au sommet de Pau, le 13 janvier dernier. Y annoncera-t-il le maintien de l’opération Barkhane ? S’il est encore trop tôt pour le dire, l’entourage du président juge aujourd’hui « la dynamique favorable à la fois sur le plan opérationnel comme sur le plan politique ». Comme décidé à Pau, l’effort a été mis sur la zone dite des trois frontières. Et l’Élysée estime aujourd’hui que « le rapport de forces s’est inversé » dans cette zone, grâce à « la combinaison d’efforts entre Barkhane et les forces du G5 Sahel », combinaison qui « a permis de reprendre le contrôle de certains espaces ».

Même jugement positif au sujet de l’évolution du processus politique malien, où on note « un regain de dynamique notamment dans la mise en œuvre de l’accord de paix au nord avec des étapes symboliques importantes comme la visite du premier ministre à Kidal et le début de redéploiement des forces armées maliennes dans cette zone ». L’annonce d’un maintien de Barkhane semble donc se dessiner, même si à moins de deux mois du sommet, l’Élysée prend bien soin de préciser que « toutes les options » restent sur la table.

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