Les héros du 18 Août 2020 sont désormais entre l’honneur, le respect de la parole donnée et la renonciation. Accueillis en libérateurs par une écrasante majorité du peuple malien, après nous avoir débarrassé du régime corrompu et scélérat d’IBK, les hommes forts du Mali sont en passe de décevoir leurs partisans en voulant diriger la transition. Ils se seraient dédits en revenant sur leur premier engagement qui était d’organiser une transition civile. Cette attitude serait contraire à la parole donnée et exposerait le Mali à des sanctions de la Communauté internationale. Qu’ils sachent que le pouvoir Kaki ne fait pas bon ménage avec la gestion républicaine et démocratique, tout comme il ne s’accommodera pas avec la perception que la communauté internationale fait de la gestion de la transition, même en cas de coup d’Etat. Donc pour ne pas prolonger la souffrance des maliens la junte doit accepter de céder le poste de président de la Transition. Assimi Goita et ses frères d’armes vont-ils écrire une page glorieuse de l’histoire de notre pays en remettant le pouvoir aux civils ? L’élégance qui a prévalu au moment de la démission du Président de la République va-t-elle se poursuivre jusqu’à la fin de la transition en concédant le pouvoir ?
Des jeunes officiers regroupés au sein du Comité National pour le Salut du Peuple, CNSP, ont mis fin au régime incompétent et corrompu d’IBK sans aucune effusion de sang. Cette manière élégance avec laquelle l’opération a été menée par Assimi Goita et ses hommes, prouve à suffisance leur maturité militaire, leur solidarité et leur capacité intellectuelle à se surpasser à s’oublier pour le Mali. C’est pourquoi quelques heures après la démission du Président de la République, ils se sont adressés à la Nation pour expliquer au peuple malien les raisons qui ont été à la base de leur intervention. Cette brève allocution a été conclue par un engagement fort, celui d’organiser une transition civile afin de sortir le Mali de la crise.
Entre le mercredi 19 Août et aujourd’hui beaucoup d’eau semble couler sous le pont, car la première intention qui était celle de permettre à un civil de diriger la transition a connu une évolution, pour devenir :« la transition pourrait être dirigée soit par un militaire ou par un civil ».Qu’est ce qui s’est passé entre temps pour qu’Assimi Goita et ses frères d’armes du CNSP, puissent changer de position ? Ont-ils cédé au son de sirène des opportunistes qui ne cessent de demander aux militaires de s’assumer en dirigeant la transition ? Les membres du CNSP ne doivent pas perdre de vue que le combat qu’ils n’ont fait que parachever, a été mené par un Mouvement populaire, le M5 RFP. C’est ce mouvement qui a sans nul doute la légitimité, donc ne pas faire du M5 RFP l’allié principal serait une erreur fatale. Le Mouvement de l’Imam Dicko, de Cheick Oumar Sissoko, de Choguel Maiga, de Modibo Sidibé, de Mme Sy Kadiatou Sow, de Me Demba Traoré, de Clément Dembélé, de Nouhoum Sarr, de Issa Kaou Djim, de Me Mountaga Tall, de Me Mohamed Ali Bathily, pour ne citer que ces figures, est incontournable dans la gestion de la transition. Qu’on ne perde pas de vue, le M5 RFP est le premier soutien de taille de la junte et semble même la protéger contre d’éventuelles sanctions de la Communauté Internationale.
Assimi Goita le Président du CNSP, nous a-t-on dit, est un militaire aguerri, un homme de terrain, qui ne serait pas prêt à troquer son kaki militaire au basin bien amidonné et à la veste bien blasée pour se maintenir au pouvoir, donc il semble désintéressé, mais par contre lui et tous ses compagnons d’armes et héros de la libération du peuple tiennent à la stabilité, à la bonne gouvernance, à l’amélioration des conditions des maliens, à la lutte contre la corruption et la délinquance financière. Ont-ils été alors influencés par tous ces laudateurs, ces flagorneurs qui ne cessent de chanter à leurs oreilles de gérer la transition ? Vont-ils revenir à leur première déclaration ?Le CNSP, en arrêtant la boucherie, la gabegie, la corruption, le népotisme et la saignée de notre économie a déjà écrit une autre glorieuse page de l’histoire de notre pays, après le coup d’Etat du 26 mars 1991. Il ne pourra parachever cette esthétique œuvre qu’en cédant tout ou partie, aux forces vives civiles pour la gestion efficiente de la transition.
Si les militaires cèdent il se seront mis au rang des héros du Mali indépendant et écriront en lettres d’or leurs noms dans les annales de l’histoire, pour avoir été les précurseurs d’un nouveau Mali. Mais s’ils refusent de céder par simple appétit du pouvoir, ils finiront de la plus mauvaise des manières et risqueront de causer plus de tort que le régime qu’ils ont chassé. Car ils feront subir le pays un embargo de la CEDEAO, une suspension de toutes les aides des pays amis et une rupture de coopération avec les partenaires financiers. Le Mali traversant déjà une crise multidimensionnelle, ne pourrait pas supporter une autre souffrance au risque de disparaitre. Donc que les hommes forts de Kati comprennent les enjeux et sachent se remettre en cause pour leur honneur et pour la stabilité du Mali.
En définitive, Assimi Goita et ses frères d’armes membres du CNSP ont encore une fois entre leurs mains le destin de notre pays. Par leur action, ils ont su éviter à notre pays une situation déplorable et compromettante pour la paix, la stabilité et le vivre ensemble, donc ils ne doivent pas mettre à l’eau cette prouesse. Ce coup de force salvateur va-t-il être vain à cause de leur entêtement et de leurs ambitions démesurées?
Youssouf Sissoko
Source : Inf@sept