LE PRESIDENT DE LA COUR SUPRÊME DU MALI A LA PRESSE : «Vous et nous devons retisser un lien de confiance avec lecteurs, auditeurs et justiciables»

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Sur initiative du Cadre de Concertation des directeurs de publication (CCDP), la Cour suprême du Mali a organisé une journée d’information des hommes de médias sur ses missions, fonctionnement, domaines de compétences, décisions, les recours devant elle. C’était le mardi 16 novembre 2021 à  la Cour suprême, sous la présidence de M. Wafi OUGADEYE, président de ladite Institution,  de M. Baba BERTHE, professeur de droit et ancien ministre. Outre, la cérémonie a marqué la présence massive des directeurs de publication de la presse écrite, des Radio et télévisions, avec à leur tête M. Aboubacar Bani ZAN, président du CCDP. L’objectif de la journée était de situer la consolidation et l’affirmation de la liberté de presse et l’indépendance de la justice.

La rencontre entre le monde des médias et de la communication et les membres de la Cour suprême, la première du genre constitue, une retrouvaille entre les deux familles complémentaires qui ont beaucoup de points en communs. Car, pour le président de la Cour suprême, ces deux familles partagent des valeurs communes telles que l’indépendance, l’impartialité, l’objectivité, la recherche de la vérité et la protection des libertés. Aussi elles sont toutes deux profondément attachées au respect du secret tant des sources que des enquêtes et de l’instruction judiciaire. «L’une comme l’autre reçoit des faits pour l’atteinte de leurs missions : informer, éduquer, sensibiliser, instruire, faire connaître ou rendre la justice. Ces faits sont traités pour être transformés en information ou en actes juridiques», a affirmé le président de la Cour suprême. Selon lui, ce rendez-vous du donner et de recevoir entre la presse et les sages de la Cour suprême aura permis  de partager les sciences infinies dans les domaines respectifs. Aussi, il aura permis d’ouvrir avec un sens remarquable de la méthode, de la pédagogie et de la responsabilité un domaine jusque-là perçu comme hermétique ou tout au moins difficile à appréhender. Et il s’agissait enfin d’irriguer des réflexions sur divers domaines d’intérêt commun, notamment la communication au niveau des juridictions, la recherche du juste équilibre entre l’indépendance de la justice et la liberté d’expression, la conjoncturation du secret tant de l’instruction judiciaire que des sources de l’information que certains considèrent comme la pierre angulaire de la liberté de la presse, le spectre de la dépénalisation des infractions à la loi sur la presse et d’autres sujets d’intérêts communs.

Le pouvoir judiciaire et le monde de la presse ont vocation à contrebalancer les autres. Pour le président de la Cour suprême, les deux corps doivent être à l’abri d’une instrumentalisation ou d’une manipulation d’où qu’elle vienne. «Vous et nous devons retisser un lien de confiance avec lecteurs, auditeurs et justiciables», a poursuivi le président de la Cour suprême.

D’autre part, ladite journée aura permis au président de la Cour suprême d’offrir aux hommes de médias une approche très brève et concrète de la vénération institution. Pour lui, la Cour suprême présente deux originalités essentielles : elle est unique pour toute la République. Elle a une mission d’unification de la jurisprudence sur tout le territoire national. Aussi, elle ne juge pas les parties au procès, mais les jugements et arrêts rendus en derniers ressort. Ensuite, elle est appelée non pas à trancher les litiges mais à dire si la décision attaquée par le pourvoi devant elle, fait ou ne fait une exacte application de la loi. Dans le premier cas, elle rejette le pourvoi, alors que, dans le second, elle casse la décision attaquée. Outre, il dira que la Cour suprême peut brièvement être perçue sous trois angles: la Cour suprême en tant qu’institution, juridiction et elle peut être perçue en tant qu’autorité  juridique et morale. D’une part affirme-t-il, le binôme liberté d’expression et Justice est solidement ancré dans les débats de société en lien avec l’actualité. Il s’agit des erreurs judiciaires, du  terrorisme, lutte contre la corruption et la délinquance économique et financière. Il y a aussi les lanceurs d’alerte, statut du ministère public, prison, les atteintes et restrictions à la liberté de la presse, la nécessité de garantir la liberté de la presse et l’obligation d’en réprimer les abus, le droit à l’oubli numérique, le droit à l’autodétermination informationnelle, le droit au référencement, les déplacés victimes de la crise sécuritaire, la pandémie du COVID 19, et autres. D’autre part, souligne-t-il, aujourd’hui l’influence des médias dans toutes les sociétés est une réalité qu’une personne raisonnable ne saurait nier. Cette influence touche divers secteurs de la vie quotidienne y compris la justice. Ainsi selon lui, la relation entre médias et Justice peut intriguer dans la mesure où de cette relation peut naître un conflit entre la liberté d’expression des médias et l’indépendance de la justice. Car comme le disait un éminent juriste «la justice ne se rend pas dans la rue, ni sur les réseaux sociaux et ni sur les médias». Cependant, pour le président de la Cour suprême, loin d’une vision conflictuelle, nos rapports doivent être apaisés et responsable en évitant toute dérive et dérapage. «La justice et la presse ont beaucoup de similitudes. Toutes deux travaillent et traitent des sujets et faits sensibles se rapportant au corps social», a dit le président de la Cour suprême M. Wafi OUGADEYE.

Par ailleurs, le président de la cour suprême a invité le coordonnateur du CCDP de s’informer pour mieux connaître et comprendre les structures rencontrées dans leur composition que dans leurs procédures respectives. En effet, dit-il, par ses articles, ses commentaires ou des points de vue, le journaliste peut provoquer le mécontentement voire la colère d’une personne physique ou morale ou même d’un gouvernement. Car, poursuit-il, lorsque l’information donnée relève de sordides questions d’intérêts, ou qu’elle porte sur des aspects ultra sensibles peut occasionner des émeutes ou manifestations susceptibles de provoquer d’importants dégâts. Enfin, face à la presse le président a proposé que dans les affaires importantes et sensibles que la presse et la justice mettent en place un cadre de concertation permettant aux médias d’accéder dans la mesure compatible avec le secret de l’instruction, par le canal du parquet, à la vraie et bonne information. Aussi, il a demandé à la presse à ne surtout pas violer les règles de l’éthique et la déontologie du journalisme. Car dit-il, le journaliste doit éduquer les citoyens au lieu de les effarer ou les dérouter, il doit informer et apaiser les tensions et non les raviver et les désinformer.

Soumaïla SAGARA

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