La semaine qui s’est écoulée a été rude pour les Maliens. Individuellement. En tant que peuple. Choqués, éprouvés, scandalisés… la palette des mots pour décrire les sentiments depuis le massacre d’Ogossagou est plutôt riche. Elle a d’ailleurs été partagée par le monde entier, d’où les condamnations, analyses et recommandations sont venues nombreuses, avec une seule et même finalité : tirer la sonnette d’alarme. Appeler les « uns » et les « autres » à freiner cette horreur qui a surpris tout le monde par son ampleur.
Étonnement ? Qui peut réellement, sans mauvaise foi, être étonné de là où nous sommes rendus aujourd’hui ? Décemment, aucun d’entre nous. Car il y a bien des années que la fréquence et la violence des incidents aurait dû nous interpeller, nous déranger et nous pousser à réagir. En tant que peuple. Individuellement. Réagir et agir, ramener les « uns » et les « autres », quels qu’ils soient, à la raison, à se rappeler tout ce qu’ils ont en commun, au lieu de s’accrocher aux rancœurs, passées et contemporaines, au lieu d’apporter de l’eau au moulin de la haine et de la vengeance.
Aujourd’hui, notre silence nous rattrape. Il nous regarde dans la glace et nous demande : qu’as-tu fait de ton frère ? Car, oui, nous sommes des frères. Chacun des nôtres dont le sang est versé sur la terre que nous avons en commun est une part de nous qui disparait. Qui songerait à se couper un membre ? Alors que celui-ci est partie de lui, utile et nécessaire ? À tuer l’humain en face de nous, nous tuons l’humain au-dedans de nous. Autant par les coups, les armes, que par les mots, mais aussi par … notre silence. Et cette terre que nous noyons du sang de nos frères est celle que nous avons en partage. Pour toujours. N’en déplaise aux « uns » et aux « autres ».
Célia d’Almeida