La Commission électorale nationale indépendante (CENI) a été créée au Mali, à la demande pressante des acteurs politiques, qui n’en croyaient plus en la bonne foi du gouvernement, et l’administration territoriale, vue comme une machine électorale pour plier les résultats au bénéfice du parti au pouvoir.
Ainsi, s’inspirant de cas précédents de réussite de cet organe dans la sous région, les partis politiques voulaient un organe unique de gestion des élections. Mais c’était sans tenir compte du facteur humain, les acteurs ne se comportant pas forcement de la même manière d’un pays à un autre, les mêmes causes pouvant produire des effets différents, selon que l’on soit au Bénin, au Togo ou au Mali. Nous sommes en avril 1997, les premières élections – les législatives – organisées par la CENI ont été les plus mauvaises dans l’histoire de la démocratie multipartite au Mali, au point que la Cour constitutionnelle les a annulées. Pour certains, le temps imparti à la CENI pour se mettre en place et organiser, était trop court (trois mois) ; pour d’autres, la tendance à voler les élections était bien réelle chez les acteurs politiques, pouvoir et Collectif des partis politiques de l’opposition (Coppo) dont l’actuel Premier ministre Choguel Kokalla Maïga était un irréductible apôtre.
Plus de vingt ans après, cette tendance à frauder a-t-elle changé ? Les dernières élections législatives de mars- avril 2020, dont les résultats ont donné un parlement hybride, composé de député élus et d’autres mal élus, ‘’nommés’’, disaient certains, par la cour constitutionnelle.
Entre temps, la CENI, dont l’avènement avait suscité tant d’espoir, a montré ses limites, incapable d’organiser des élections tel qu’on attendait de lui.
Rebelote, on revient à l’organisation des élections par le gouvernement (administration territoriale). On se rappelle le bout de phrase lancé par le ministre de l’Administration territoriale Moussa Sinko Coulibaly, lors de la proclamation des résultats provisoires du premier tour de l’élection présidentielle de 2013, qui disait « si les tendances se confirment, IBK pourrait être élu dès le premier tour », un tel propos venant de l’organisateur de l’élection présidentielle était assez révélateur de la volonté du pouvoir de la transition de 2013 de faire élire le président IBK, et dès le premier tour. Entre la CENI et l’Administration territoriale, rien n’a changé, en termes de transparence et de crédibilité. Notre pays n’a connu que péripéties et désenchantement, sans jamais parvenir à organiser des élections transparentes et crédibles, après les élections générales de 1992. L’organe unique de gestion des élections pourrait-il être une panacée, là où la CENI et l’Administration territoriale ont échoué?
Qu’est ce qui est en cause, si les élections ne sont pas transparentes et crédibles? Les structures, leur fonctionnement ou les hommes ? Pas que les animateurs des organes de gestion (émanant des formations politiques, de l’administration, des forces de défense et de sécurité…), mais aussi, les électeurs, les militants, les responsables des partis politiques, les candidats, les observateurs nationaux et étrangers.
Si les organes ne valent rien que par leurs animateurs, leur fonctionnement, il va sans dire que le facteur environnement sécuritaire servira de prétexte à certains, pour tenter d’assouvir leur gourmandise en s’installant à demeure dans la fraude, comme de part le passé. Il est dit que l’organe unique de gestion des élections se devra d’être indépendant. Mais indépendant par rapport à qui ou à quoi ? Peut-il évoluer sans dépendre de l’administration dans les confins du pays, des forces de défense et de sécurité ? Demandez aux membres d’organe unique de gestion dans les pays qui ont déjà vécu cette l’expérience.
B. Daou
Source : Le Républicain