Le ministre ou l’autorité publique, ordonnateur d’un budget, finit, par des contraintes sociales, à croire qu’en apportant assistance et aide à ses semblables, son indélicatesse face aux deniers publics est absoute. Que nenni ! Mais la lutte contre la corruption est-elle devenue notre mythe de Sisyphe ?
L’éthique, la probité morale et intellectuelle imposent un respect strict du bien public, une bonne gestion des ressources publiques. Mais certaines valeurs sociétales ou traditionnelles constituent des freins à ces principes.
Est-ce un mythe de Sisyphe ?
Rappel historique : Sisyphus (Sisyphe) est le fils d’Aeolus (roi de Thessalonie) et d’Enarete, et il fut celui qui a fondé Corinthe. Il a institué les jeux d’Isthme. Selon la tradition, il était habile et criminel; il volait et tuait des voyageurs. Il a trahi les dieux en révélant des secrets divins, et il a enchaîné le dieu de la mort, Thanatos, de façon d’empêcher les morts d’atteindre les enfers. Hadès est intervenu en personne; et Sisyphus fut sévèrement puni. Pour s’être rebellé contre la volonté des dieux en confiant leurs secrets aux humains, Sisyphe fut condamné par Hadès à pousser un énorme rocher jusqu’au sommet d’une montagne dans le royaume des morts. A peine ce but atteint, le rocher roulait jusqu’au pied du versant d’où Sisyphe devait le remonter.
Et donc, le procédé se répète pour l’éternité. Sa punition figurait sur bien des vases grecs. On le représente nu ou portant une fourrure sur les épaules, en train de rouler un rocher.
Pour les Grecs anciens, ce mythe rappelait aux mortels qu’une rébellion contre les dieux et leur implacable justice était une pure folie.
Comment pouvons-nous bien traiter cette photologie, la corruption, dans un pays où certaines valeurs sociétales vont potentiellement du haut cadre de l’Etat « une « bonne personne » (môgô nyenema) s’il fait sentir une certaine générosité ? J’allais dire une certaine libéralité ! Et il est méchant (môgô djougou) s’il n’arrive pas à donner de l’argent aux visiteurs et autres nécessiteux.
C’est ainsi que nos autorités, ministres, Directeurs centraux des services publics, chefs d’institutions, etc, sont plus ou moins contraints à partager de l’argent (des deniers publics) aux nombreux visiteurs qui envahissent les services publics pour, dit-on, des « salutations »/ Peut-on s’étonner plus tard de la gestion plutôt approximative des fonds à gérer ? C’est là toute la problématique de la lutte contre la corruption dans un pays où la solidarité n’est pas un mot mais un mode de vie, obligatoire.
Dans ce contexte, notre confrère Info-Matin peut, à bon droit, écrire ceci, concernant le Vérificateur Général ; « Sur la base de quelle transparence à géométrie variable le Vérificateur qui se porte en champion de la glasnost se permet-il de publier les rapports individuels concernant les structures contrôlées et garde secret dans un coffre-fort, hyper-sécurisé le rapport d’audit le concernant (la gestion de son prédécesseur) ? Cabale pour cabale : n’est-ce pas une attaque contre la transparence que de ne pas publier les rapports concernant la gestion du BVG lui-même ? Avant de publier pour les autres, publiez d’abord pour le BVG lui-même. Transparence à double vitesse, quand tu nous tiens ». et nous de nous poser la question de savoir si la lutte contre la corruption est notre mythe de Sisyphe.
Boubou SIDIBE
Source : Maliweb