MALI : PR. CLÉMENT DEMBÉLÉ : «LE RETRAIT DE LA PLAINTE DE TAPILY N’ENGAGE QUE LUI…»

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Sur les réseaux sociaux, des propos imputés au Pr. Clément Dembélé mettent mal à l’aise ses amis journalistes. Il lui est également reproché de s’affubler du statut de « plus grand intello ou instruit en République du Mali». En outre, dans cette entrevue,  il nous parle de la médiation initiée par le Recotrade et les autorités traditionnelles pour concilier le président de la Cour suprême Nouhoum Tapily et le président du Conseil national du patronat malien Mamadou Sinsy Coulibaly.

Pr. Clément Dembélé, sur les réseaux sociaux, il vous est reproché d’avoir dit «être le plus grand intellectuel en République du Mali». Dites-nous comment et dans quel contexte vous placez ces propos.

Pr. Clément Dembélé : Je commence par dire qu’il y a mes enseignants qui sont encore au Mali. Des gens qui m’ont enseigné du primaire à l’Ensup. Je ne peux pas dire que je suis le plus grand intellectuel au Mali. C’est faux. Je ne le serai pas et je ne le dirai pas. Quelqu’un qui a, ne serait-ce que deux neurones dans sa tête, ne dirait pas qu’il est le plus grand intellectuel du Mali. Celui qui a écrit ces propos est venu de lui-même à la conférence de presse que j’ai animée à la Maison de la presse. Je ne connais ses motivations, dans tous les cas, il a sorti carrément mes propos dans leur contexte. Il a utilisé les réseaux sociaux pour faire le buzz.

Dans mes propos, je dis que le problème du Mali vient de ses intellectuels que nous sommes. Le plus grand diplôme étant le doctorat, dont je suis moi-même détenteur, je me rends compte que ce sont ces grands diplômés qui sont le problème du Mali. Cela ne veut pas dire que je suis le plus grand intellectuel. Nous sommes le problème parce que nous n’assumons pas notre responsabilité d’informer, de bien former, de sensibiliser et de mobiliser le peuple malien. Je dis que l’heure est arrivée pour que tous les intellectuels se lèvent pour lutter contre la corruption. Il ne peut y avoir autant de corruption au Mali et autant d’intellectuels. Cela est inconcevable. Voilà tout le propos.

On vous reproche d’avoir dit que les journalistes sont des gens qui se sont reconvertis dans la presse par manque d’emploi. Expliquez-nous votre logique.

Quand j’ai fini d’interpeller les intellectuels, je me suis tourné vers les journalistes en ces termes : «Vous les journalistes, mes amis, vous m’avez toujours soutenu et on a tout fait ensemble. Mais je vous demande une chose, ce combat contre la corruption est votre combat. Vous êtes les plus concernés, vous avez le devoir d’informer les Maliens, de les sensibiliser. D’autant plus qu’au Mali, la plupart des amis journalistes sont devenus journalistes parce qu’ils ne veulent plus rester dans la fainéantise à la maison. Sinon, le diplôme que vous détenez vous permet d’exercer autre métier que le journalisme.

Parce qu’il y a un petit groupe qui prend la part de ce qui vous revient. Ce droit qu’on vous a volé fait que certains sont devenus journalistes. Autrement dit, vous serez dans d’autres fonctions de l’Etat. Ce combat est votre combat pour qu’on vous remette votre droit, ce qu’on vous a volé. Je ne pense pas avoir dénigré qui que ce soit. Au contraire, je soutiens et supporte les journalistes afin qu’ils se libèrent des chaînes de la corruption. Corruption qui empêche un grand nombre d’exercer le métier de leur rêve.

Le Recotrade et les familles fondatrices de Bamako veulent que Tapily et Coulou enterrent la hache de guerre. Ne pensez-vous pas que cela constitue un frein à la lutte contre la corruption ?

Je pars sur le principe que le Recotrade et les autorités traditionnelles jouent un rôle dans le tissu social. Mais il y a des choses dans lesquelles on n’intervient pas, comme il y a des choses dans lesquelles on peut intervenir. Il faut que les choses soient clarifiées. On parle quand même de la corruption avec une personnalité désignée. Ce n’est pas n’importe qui, il est le président de la Cour suprême, une des plus grandes institutions de notre pays. Il doit incarner normalement la probité et doit être une référence de la justice.

On l’accuse d’être corrompu et moi je m’attendais à ce que M. Tapily sorte pour démentir. Il ne s’agit pas seulement de venir faire des annonces mais qu’en démentant, qu’il déclare et justifie tous ses biens. Tapily n’a pas démenti en disant que M. Coulibaly Sinsy a menti. Il n’a pas déclaré ses biens encore moins démissionné pour se mettre sur le même pied d’égalité que Mamadou Sinsy Coulibaly à la justice. Il est resté président de la Cour suprême et a porté plainte pour «outrage à magistrat» ; ce qui n’a rien à voir avec le fond du problème qui est la corruption et il veut amener Coulou sous cet angle.

Ce que je ne conçois pas dans cette affaire, soit Tapily sort pour déclarer ses biens et les justifier et amène Coulou à la justice, si celui-ci ne peut pas prouver le contraire, ou il ne peut pas amener Coulou pour «outrage à magistrat». Je ne dis pas qu’il n’y a eu d’outrage, mais il y a pire qu’outrage à magistrat : c’est la corruption.

Le Recotrade est venu faire la médiation avec Tapily, il a retiré sa plainte. C’est son droit de porter plainte tout comme il lui revient de retirer sa plainte. Mamadou Sinsy Coulibaly m’a dit qu’il n’avait rien au moment où ils sont venus le voir. Il m’avait demandé de venir quand ils sont arrivés, je lui ai dit que je ne viens pas. À la suite de M. Coulou, quelqu’un d’autre m’a appelé pour me dire qu’ils sont tous là, si je pouvais venir pour discuter pour la négociation et la paix.

J’ai dit que je ne venais par principe que je ne suis pas un supporteur de Mamadou Sinsy Coulibaly, encore moins le président du club de soutien à Coulou. Je suis Malien intellectuel qui estime que quand une telle affirmation est faite, il revient à Tapily d’éclaircir les gens. Il ne l’a pas fait, il n’a pas démenti, il veut amener Coulou au Tribunal. Les choses ne se passent pas comme ça, voilà mon combat. Le Recotrade a fait la paix entre Tapily et Coulou, mais les Maliens attendent toujours que Tapily déclare et justifie ses biens ou qu’il démissionne.

Gabriel TIENOU 

SOURCE: LE REPORTER

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